Après le congrès de la FSM

Publié le par FSC

Après le congrès de la FSM

Les enjeux du dernier congrès de la Fédération Syndicale Mondiale (F.S.M. - W.F.T.U.) . Belair Philippe

 

Du mercredi 05 au samedi 08 Octobre, s'est déroulé le 17ème Congrès de la Fédération Syndicale Mondiale à Durban, en Afrique du Sud. Il faut rappeler que cette fédération a été, pendant longtemps, la plus importante sur le plan international jusqu'aux années qui ont suivi la dite "chute du mur de Berlin" ou la Confédération Syndicale Internationale (C.S.I.), réformiste affichée et financée par les tenants du libéralisme, a bénéficié de la propagande anti-lutte de classe. Mais depuis quelques années, réalité de la lutte oblige ("Les faits sont têtus " disait Lénine !), beaucoup reviennent au bercail et de nouvelles organisations ont rejoint la F.S.M. qui compte, désormais, 92 Millions de militants sur 126 Pays.

La F.S.M. c'est, donc, une augmentation de 14 millions de ses membres, soit 18 %, la création de sept nouveaux bureaux régionaux. L'ambition de la F.S.M. est de former de nouveaux cadres qui n'usent pas du "moi" mais du "nous". Chaque syndicat de base doit lutter sur le plan local sans jamais oublier l'international

C'est précisément ce seuil des presque 100 Millions de membres (ses objectifs affichés d'atteindre les 100 Millions dès le prochain Congrès, d'ici 2020) qui doit être mis en adéquation avec le lieu choisi, un pays membre des BRICS. Un pays organisateur, au travers d'une organisation syndicale le COSATU, qui fêtait ses trente ans de combat alors que la FSM fêtait ses 71 ans. Ce 17 ème congrès était l'occasion de faire le bilan de plus de 40 années de barbarie capitaliste et de préparer la riposte en formant de jeunes cadres offensifs sous la triptyque : Lutte - Internationalisme - Unité.

La présence physique du Président Jacob ZUMA, de sa ministre du travail et du secrétaire général du Parti Communiste (SACP) sont des signes de la volonté de créer un monde au moins bipolaire, à défaut de multipolaire, en s'assurant d'une base de lutte internationale face à la volonté monopolistique du libéralisme économique mené par les Etats-Unis.

Les propos de ZUMA ont été claires : " L'unité des travailleurs est la clef pour réussir par des actions mondiales concertées dans l'intérêt de ces derniers", celui de sa ministre du travail aussi : "Les organisations syndicales sont la pupille de la classe ouvrière, ne laissez personne la crever !".


 

Le secrétaire général du S.A.C.P. (Parti Communiste Sud-Africain), par ailleurs Ministre de l'enseignement supérieur de l'alliance A.N.C. au pouvoir, Blade NZIMANDE, faisait part, aux congressistes, des salutations révolutionnaires du S.A.C.P.. Il poursuivit sur le fait que, comme tous les autres pays du monde, l'Afrique du sud était aussi frappé par la crise capitaliste mais que la matrice de la lutte était encore là malgré le fait que l'impérialisme ne supporte pas que des mouvements de libération soient au pouvoir... Le ton était donné !

Les interventions des délégations ont cerné nombre de problématiques contemporaines qui font l'actualité et déterminent la nécessité de la lutte de classe, n'en déplaise à la médiocrité intellectuelle courante qui se cache derrière la prétendue "résistance aux changement" 1 pour cacher sa complicité et son apathie systémique. Citons en vrac :

  • L'action néfaste du capitalisme sur la planète et la conscience collective. Les organisations de base ont, à nouveau, un rôle important dans la réorganisation des travailleurs en leur démontrant le manque de justice du système capitaliste.

  • La non-reconnaissance, par la F.S.M., du nouveau Gouvernement Brésilien. Ce gouvernement est le pur produit d'un coup d'Etat organisé contre l'ancien qui menait des actions en faveur de la population. Sous le fallacieux prétexte de corruption, jamais prouvée, on a installé un véritable corrompu qui met à mal toutes les mesures sociales en faveur des plus pauvres.

  • La mobilisation du monde du travail contre le coup d'Etat au Brésil.

  • La dénonciation, par la F.S.M., de l'occupation de la Palestine et de la tentative de coup d'Etat permanent de la droite vénézuélienne. Les forces Israéliennes tuent quotidiennement, où sont l'O.N.U. et les "défenseurs des Droits de l'Homme" ? La droite Vénézuélienne (soutenue par les Etats-Unis), défenderesse du capitalisme, organise la pénurie économique pour contraindre le gouvernement bolivarien à capituler.

  • Le capitalisme qualifiant les dirigeants politiques progressistes et protectionnistes de tyrans qui doivent être combattu si ce n'est suspendus de leur fonction par un coup d'Etat ou une fausse révolution.

  • Le financement de la déstabilisation de l'Ukraine, par les Etats-Unis. Il y a bien un risque de guerre civile généralisée pour couper l'Europe de la Russie. Ce pays se destine à être balkanisé comme la Yougoslavie et la Lybie. Au Donbass, l'an dernier, la maison des syndicats a été incendiée avec des syndicalistes à l'intérieur, information restée sous silence jusqu'à ce jour.

  • L'essoufflement de l'impérialisme, stade ultime du capitalisme, mais qui tient parce que la classe ouvrière n'est pas préparée faute de mouvements adéquats et de la présence du social-libéralisme qui dévie la classe ouvrière. Certains syndicats font alliance avec le capitalisme, ce qui détourne la classe ouvrière du mouvement syndical en général.

  • La technologie, de plus en plus pointue, qui met en danger la notion de travail, donc reconsidère le rôle moteur de la classe ouvrière. Ce qui se passe dans les pays du nord se passera dans les pays du sud, à commencer par ceux dits "émergeants".

  • Le retour progressif, partout dans le monde, des organisations syndicales classistes (de lutte de classe) contre trente années d'occupation des syndicats réformistes.

  • La création d'une nouvelle et grande fédération syndicale de Russie (Membre du BRICS) qui a adhérer à la F.S.M., il y a une véritable crise des conditions de travail dans ce Pays. Beaucoup ont cru, après 1991, que l'économie de marché allait sauver la Russie. La déception est grande, les conditions de vie des travailleurs se sont détériorées. L'hypocrisie des institutions Européennes, à l'origine des difficultés de la classe ouvrières des pays membres.

  • Le nécessaire combat contre la pauvreté et pour l'accès libre et gratuit à l'enseignement et à la santé.

  • La résistance humaine et organisée, même peu, qui surprend et insupporte le capitalisme.

  • Attaquer, de front et courageusement, les problèmes de la classe ouvrière.

  • La destruction, par l'impérialisme, de nombre de pays (Irak, Libye, Syrie...) pour imposer une nouvelle vision du monde et sortir des contradictions du capitalisme.

  • L'urgence de l'unité de la classe ouvrière mondiale et l'impérieuse initiative politique et idéologique, par un grand mouvement internationaliste, pour faire tomber le régime néolibéral et mondialiste.

  • La manifestation de l'austérité à l'Union Européenne, en Grande-Bretagne, au travers du Brexit.

  • La demande d'une résolution politique pour défendre l'accord de paix en Colombie, en dépit de son rejet par référendum (Très peu de votants à ce référendum).

  • Le gaspillage d'argent injecté dans les sales guerres du capitalisme alors qu'on se fonde sur une nécessaire austérité budgétaire pour ne pas financer la santé et le bien-être social.

  • Les changements climatiques qui sont le fait uniquement du capitalisme et non de l'Homme tout court. La COP21 ne lui suffira pas pour s'en tirer à bon compte.

  • Le rôle déterminant des femmes dans la lutte d'émancipation sociale : "Qui décide sans nous, décide contre nous !" diras l'une d'entre elles.

  • L'impérative pédagogie à avoir pour initier la classe ouvrière à la problématique de la mondialisation.

  • Le redressement du mouvement syndical classiste (de lutte de classe) aux Etats-Unis. Les organisations de lutte de classe se mobilisent contre le racisme et pour la libération des prisonniers politiques.

  • Parmi toutes ces interventions, le délégué de la C.G.T.G. a tenu à faire le point sur la situation sociale en Guadeloupe, mais aussi sur les tentatives de destruction menées contre la C.G.T.G., unique syndicat Guadeloupéen se réclament clairement de lutte de classe. Il est donc revenu sur l'affaire HUYGUES-DESPOINTES, et a remercier la F.S.M. et toutes les organisations sœurs pour leur soutien.

    Le secrétaire général sortant (élu au dernier congrès d'Athènes), Georges MAVRIKOS, a été réélu sur la base d'un bilan évident : le retour de la FSM sur le plan International malgré les entourloupes des réformistes dans les institutions internationales du travail (B.I.T., O.I.T.). Le secrétaire général de la F.S.M. de conclure son discours comme suit :" Ils arriveront toujours à corrompre nombre d'entre nous mais jamais nous tous. Nous ne sommes pas des nostalgiques, nous sommes des combattants permanents pour le progrès social et humain ! Nous vaincrons ! ". Mais à côté de sa réélection, un événement de taille : le nouveau Président de la F.S.M. est Mzwandila Méchiel Makwaïba du Cosatu. Un congrès sur une terre du sud, l'Afrique, qui clos ses travaux en élisant un digne fils de cette terre à la Direction de son Conseil présidentiel, là aussi c'est un signe que quelque chose se passe là où on ne l'attendais pas.

    Il faut, en effet, lier cet événement à la posture d'autres pays du BRICS, la Russie sur le plan militaire et la Chine sur le plan économique. Au moment même où la Chine est en passe de supplanter les Etats-Unis sur les places économiques et financières, la Russie est en train de faire une démonstration de stratégie militaire en stoppant les ambitions destructrices et expansionnistes des Etats-Unis et de ses satellites, au moyen orient. Au sein de la FSM, la majorité des membres vient d'Amérique latine et d'Inde (Membre du BRICS).

    Il semble bien que le monde soit en train de changer sous nos pieds, malgré le silence assourdissant des médias occidentaux qui s'accrochent à un discours désormais obsolète en traitant la contestation de passéiste. Que sera demain au vu de cette nouvelle configuration qui s'annonce, y compris sur le plan syndical ? Est-ce une alliance de circonstance entre, certes des intérêts pas forcément convergeant, ou l'ouverture d'un véritable front anti-impérialiste qui fait feu de tous bois ? Ce qui est sûr, c'est que les choses bougent et nous avons intérêt à nous accrocher à cette réalité et quitter la téléréalité néolibérale.

     

    1 Concept d'ingénierie sociale de l'école comportementaliste de Chicago, repris par les théoriciens du néolibéralisme en première application au Chili de PINOCHET contre les militants progressistes.

     

 
 
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