ALSTOM : le scandale d'état continue !
Gouvernement PS, médias continuent d'embrouiller l'opinion derrière la complexité d'une situation et de décisions qui s'enchaînent depuis des années pour masquer les responsabilités des politiques (PS en tête) et de l'oligarchie dans ce qui constitue un véritable sabotage de l'industrie de notre pays.
Pour s'en tenir à la période récente, fin 2016 devant la menace réelle de la fermeture de l'entreprise de Belfort et la suppression de centaines d'emploi et la crainte de se voir accuser de laisser-faire en période des présidentielles le pouvoir a fait miroiter un mégacontrat du RER nouvelle génération commandé par la SNCF: 371 RER de 3 milliards d’euros !
C'était promis, c'était sûr : le patriotisme industriel l'emportait, l'état indirectement pouvait encore!
PATATRAS!
Libération 6 février 2017
L'Etat semble s'être engagé un peu vite dans une commande de rames TGV destinée à relancer l'activité de l'usine de Belfort était menacée d'un plan social. A la SNCF de se débrouiller maintenant
L'affaire ressemble fort à une patate chaude que toutes les parties cherchent à se refiler. Le 4 décembre 2016, l'Etat annonce une commande de matériel ferroviaire pour un montant de 400 millions d'euros. Elles sont destinées à redonner de l'activité à l'usine belfortaise d'Alstom, spécialisée dans la construction de locomotives. La décision a été prise, en urgence, afin d'éviter une fermeture du site qui emploie 480 salariés.
En revanche, les modalités de cette commande n'ont pas été, à ce moment là, une priorité. Et pour cause : la SNCF n'a pas vraiment besoin de rames TGV qui vont circuler à moins de 200 km/h, sur des lignes classiques entre Bordeaux et Marseille. L'entreprise publique s'en remet donc à l'Etat pour l'intendance d'un dossier dont elle se serait bien passée. De son côté, Bercy compte justement sur la SNCF pour faire avancer le dossier, une fois sa volonté exprimée. Ambiance et dialogue de sourds…
Or, voilà que la manière dont vont être commandées 15 rames de TGV, pour un montant de 400 millions d'euros, devient depuis le début de l'année un vrai casse-tête. L'Etat ne peut acheter ces trains en direct, au risque de se faire sérieusement remonter les bretelles par Bruxelles. La Commission européenne pourrait considérer qu'il s'agit là d'une aide d'Etat, pratique ô combien illégale.
Qu'à cela ne tienne, la SNCF pourrait alors passer commande elle-même. Dans cette hypothèse, elle devrait alors passer par un appel d'offres en bonne et due forme et examiner, voire retenir, les propositions de concurrents d'Alstom comme Siemens ou encore Bombardier. Plutôt gênant pour une opération déclarée de sauvetage d'un industriel français. Sans compter les risques de retard pour la livraison de rames, dont la mise en service est prévue en 2021.
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DERNIERES NOUVELLES
Le plan de sauvegarde de l'usine Alstom à Belfort est-il compromis pour des motifs juridiques ? Le ministre de l'Industrie affirme qu'il n'en est rien et que la commande de 15 rames de TGV sera confirmée d'ici fin février.
C'est un article publié hier dans le quotidien Les Echos qui a mis le feu aux poudre. S'appuyant sur une note des juristes de Bercy, le journal explique que le plan de sauvetage de l'usine Alstom de Belfort menacé de fermeture, consistant en l'achat par l'état de quinze rames de TGV pour un montant de 400 millions d'euros, pourrait être compromis en raison d'obstacles juridiques et de non respect de la mise en concurrence.
Mais hier après-midi, le secrétaire d'Etat à l'Industrie Christophe Sirugue a vivement réagi, assurant que l'engagement donné en octobre pour sauver le site industriel serait confirmée «avant la fin du mois de février» à l'occasion d'un comité de suivi sur ce dossier prévu au ministère de l'Economie.
La note rédigée par Bercy montrait les obstacles juridiques posés par la stratégie initialement avancée par le gouvernement, qui souhaitait s'appuyer sur un ancien contrat-cadre passé avec l'opérateur ferroviaire, s'affranchissant ainsi de tout appel d'offres.
La SNCF maintient son engagement
«Ce que je trouve extraordinaire, c'est que l'on ait aujourd'hui une communication de presse sur une note qui date de début décembre et qui - si je n'en remets pas en cause les éléments - en tout cas repose sur un scénario qui n'est pas celui qui a été retenu par l'Etat», a commenté M. Sirugue.
Le secrétaire d'état explique qu'en réalité «depuis le début», l'idée est de voir «comment la SNCF peut passer la commande», via un appel d'offres, «sachant que bien évidemment l'Etat financera dans ce cadre-là», a précisé le secrétaire d'Etat.
M. Sirugue a aussi assuré que l'engagement de la SNCF à répondre à un tel appel d'offre restait intact. La commande n'est «absolument pas remise en cause», avait pour sa part affirmé un peu plus tôt Marie-Guite Dufay, présidente (PS) de la Bourgogne-Franche-Comté, rapportant un entretien avec Guillaume Pepy, président de la SNCF.
Le site Alstom de Belfort emploie à l'heure actuelle 400 personnes. En octobre dernier, l'industriel français avait annoncé son intention de fermer le site.
Lot de consolation pour la CAF de Bagnères
Pas aussi ancien, grand et médiatique qu'Alstom-Belfort, le site plus que centenaire du constructeur ferroviaire espagnol CAF, basé à Bagnères-de-Bigorre ( Hautes-Pyrénées), est pourtant lui aussi sur la selette après avoir perdu un contrat géant de 3,7 milliards d'euros pour la fabrication de 271 trains destinés au RER francilien. Le groupe espagnol, qui compte aujourd'hui une centaine de salariés vient toutefois d'obtenir une maigre consolation. Il a annoncé hier avoir remporté avec la RATP un contrat pouvant aller jusqu'à 65 millions d'euros, pour des locomotives de maintenance, qui seront fabriquées dans son usine bigourdanne.
Au fond on en arrive là en raison d'une démission nationale pliant tantôt sous le chantage des USA (menace de procès contre l'entreprise pour avoir utilisé le dollar dans une opération avec le Japon), tantôt en pliant aux injonctions de la Commission européenne pour outrage aux règles de la concurrence!
4 octobre 2016 Benoit Hamon : "Je regrette qu'on soit arrivé à cette solution de bricolage industriel" a réagi sur France Inter l'ancien de ministre après les rumeurs d'achats de 16 rames TGV par l'Etat pour sauver Alstom. "La chance des employés d'Alstom c'est la proximité avec la présidentielle" a d'ailleurs souligné le candidat à la primaire de la gauche.
Cette commande anticipée de 15 rames de TGV Euroduplex par l'Etat avait été annoncée début octobre dans le cadre d'un plan visant à maintenir l'activité de production du site Alstom à Belfort et à sauvegarder ses 400 emplois, alors que la direction d'Alstom avait envisagé un transfert en Alsace.
Elle portait sur 15 rames de TGV destinées à équiper la ligne Intercités Bordeaux-Marseille par anticipation de la transformation des tronçons Bordeaux-Toulouse et Montpellier-Perpignan en lignes à grande vitesse (LGV) en 2025-2030. Cette commande d'un montant d'environ 500 millions d'euros avait suscité de nombreuses critiques.
CHALLENGES 11 janvier
Le consortium Alstom-Bombardier a remporté ce mercredi le contrat du RER nouvelle génération, un des plus importants dans l'histoire du ferroviaire en Europe, avec une première tranche de 1,55 milliard d'euros et dont le montant total pourra aller jusqu'à 3,75 milliards. Cette commande doit permettre de sécuriser l'emploi alors qu'était annoncé la quasi-fermeture de l'usine Alstom de Belfort en septembre: environ 2.000 personnes travailleront sur cette commande au sein du consortium, à la fois sur le site de Bombardier à Crespin (Nord), et sur huit sites d'Alstom en France - Valenciennes, Reichshoffen, Ornans, Le Creusot, Villeurbanne, Tarbes, Petit-Quevilly, et Saint-Ouen. Et plus de 8.000 emplois doivent être pérennisés au sein
de la filière ferroviaire française.
20 MINUTES 6 février 2017
PLAN DE SAUVETAGE Cette commande sera confirmée avant la fin du mois de février, a assuré le secrétaire d'Etat à l'Industrie, coupant court aux rumeurs...
La commande de quinze rames TGV à l’usine Alstom de Belfort sera confirmée « avant la fin du mois de février ». Le secrétaire d’Etat à l’Industrie, Christophe Sirugue, a réaffirmé, ce lundi, l’engagement pris par le gouvernement en octobre 2016 afin de sauver le site industriel situé en Bourgogne-Franche-Comté. Cette annonce intervient alors que, selon une note des services juridiques de Bercy datant de début décembre et relayée par la lettre spécialisée Mobilettre, ce plan de sauvegarde semblait être remis en cause, pour des raisons juridiques.
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Hier, Philippe Martinez a enclenché la première phase d’une mobilisation interfédérale pour lutter contre l’arrêt de la production ferroviaire à Alstom Belfort et pour la mise en œuvre d’une politique de transport nationale cohérente.
«Le maintien du site de Belfort passe par des choix politiques et des stratégies d’entreprise qui ne soient pas guidés par les financiers et quelques actionnaires sans scrupule. » Hier, à la veille du très attendu comité central d’entreprise (CCE) extraordinaire d’Alstom, Philippe Martinez a réaffirmé l’urgence de mettre en œuvre une réelle politique des transports en France. Face à la presse, entouré des représentants CGT du constructeur ferroviaire, des fédérations des travailleurs de la métallurgie, des cheminots et des transports, le secrétaire général de la CGT a dénoncé « la partie de poker menteur qui se joue entre le gouvernement, la direction d’Alstom et les dirigeants des entreprises publiques SNCF et RATP ». Poker menteur, car l’affaire n’est pas nouvelle « et le gouvernement fait mine de découvrir un dossier qui est pourtant sur sa table depuis des mois (...) et qui a été régulièrement abordé au Conseil national de l’industrie et au comité stratégique de la filière ferroviaire, dans lesquels la menace de milliers de suppressions d’emplois a été pointée », a poursuivi Philippe Martinez.
« Le système ferroviaire a été installé dans une spirale du déclin », a pour sa part dénoncé Gilbert Garrel, secrétaire général de la CGT cheminots. Car, en refusant de reprendre à son compte la dette colossale de la SNCF (près de 50 milliards d’euros cumulés), l’État a délibérément fait le choix d’affaiblir la commande publique de matériel, de même qu’en réduisant considérablement le montant des dotations publiques aux régions. Pour la CGT, qui engage une « campagne nationale pour le ferroviaire », la situation que connaît aujourd’hui le site d’Alstom à Belfort est le sinistre résultat des « politiques d’austérité conduites dans le transport public ». Mais pas seulement. La direction du groupe, aussi, est mise en cause par le syndicat, qui déplore « une stratégie consistant à délocaliser la production ferroviaire pour réaliser toujours plus de profits », a souligné Philippe Martinez, rappelant au passage que l’entreprise affiche des carnets de commandes « de plus de 30 milliards d’euros ». Dans ce contexte, « la direction d’Alstom ne s’en cache pas, elle souhaite désormais tout miser sur la maintenance, considérant qu’il y a plus de marge à se faire sur ce secteur que dans la production », a poursuivi le secrétaire général de la CGT.
Il est « indispensable que la direction rende des comptes »
Cette stratégie est dangereuse. Non seulement parce qu’elle sape les savoir-faire français, mondialement reconnus dans le domaine de la construction ferroviaire, mais parce qu’elle crée, de fait, une concurrence entre les salariés d’Alstom et ceux des branches maintenance de la SNCF – qui emploie 15 000 cheminots – et de la RATP. Pourtant, en matière de construction, « les besoins sont énormes », a confirmé Gilbert Garrel. « Ils concernent les lignes D et E du RER, les TET (trains Intercités – NDLR), les TGV dont les rames de première génération sont en passe d’être radiées, le TGV du futur… Mais aujourd’hui, on est en train de créer des cahiers des charges qui favorisent les constructeurs étrangers », a-t-il en outre souligné. Pourtant, alors que « les dirigeants des entreprises publiques SNCF et RATP se cachent derrière l’obligation d’appels d’offres européens pour attribuer des marchés à des entreprises espagnoles ou allemandes soi-disant plus performantes, ils omettent de dire que ces appels d’offres peuvent contenir des critères qualitatifs, sociaux et environnementaux qui permettraient de garantir la production en France », a affirmé Philippe Martinez. Du côté des salariés d’Alstom, c’est l’exaspération. « Nous en avons assez d’avoir des informations par communiqués de presse », a déclaré Christian Garnier, de la CGT Alstom, pour qui il est « indispensable que la direction rende des comptes ». Le CCE d’aujourd’hui devrait être l’occasion pour le PDG du groupe, Henri Poupart-Lafarge, de s’expliquer sur la stratégie du groupe et l’avenir des sites industriels français. « On attend de lui qu’il annonce l’arrêt de ce plan », a renchéri Pascal Novelin, de la CGT Alstom Belfort. « On ne se laissera pas faire », a-t-il poursuivi avant de conclure, sourire aux lèvres : « On a un petit avantage à Belfort, General Electric (GE, qui a racheté en 2014 la branche énergie d’Alstom – NDLR) est installé sur le même site. Si on doit tout bloquer, on bloquera tout. »
Les « Alsthommes » en grève
Aujourd’hui, les 9 000 salariés d’Alstom sont appelés à la grève par l’intersyndicale CGT, CFE-CGC, CFDT, FO. Une manifestation est prévue devant le siège du groupe, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), à 11 heures, durant la tenue du CCE. Les salariés ont choisi d’affréter un TGV pour venir de Belfort et d’Ornans (Doubs). L’intersyndicale attend entre 1 000 et 1 500 personnes.
Alstom a touché 6,3 millions d’euros de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (cice) et 86 millions d’euros de crédit d’impôt recherche (cir) en
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« Aucune remise en cause des éléments convenus »
« Ce qui est dit dans la note, c’est que l’Etat financerait directement l’achat des quinze rames TGV, or, depuis le début », il faut voir « comment la SNCF peut passer la commande », via un appel d’offres, « sachant que, bien évidemment, l’Etat financera dans ce cadre-là », a précisé Christophe Sirugue. Ce dernier a par ailleurs assuré que l’engagement de la SNCF à répondre à un tel appel d’offres restait intact.
La commande n’est « absolument pas remise en cause », a pour sa part affirmé un peu plus tôt Marie-Guite Dufay, présidente (PS) de la région Bourgogne-Franche-Comté, rapportant un échange téléphonique lundi matin avec Guillaume Pepy, président de la SNCF. « Les services de l’Etat travaillent pour que la commande (de 15 rames de TGV destinées à la ligne Intercités Marseille-Bordeaux) puisse être passée », a déclaré de son côté Hugues Besancenot.
Le préfet du Territoire de Belfort était interrogé à l’occasion du lancement, ce lundi, de la modernisation de la voie d’essais du site Alstom de Belfort, qui permettra de faire de ce site le centre européen de maintenance ferroviaire. Cette création faisait partie du plan de sauvegarde de l’usine annoncé par l’Etat en octobre 2016 pour éviter le déménagement en Alsace du site historique du constructeur ferroviaire, qui emploie plus de 400 personnes à Belfort.
C’est ce qu’on appelle un bel unanimisme bêlant. Le plan de sauvetage de l’usine Alstom de Belfort vient de provoquer un de ces tollés dont l’aréopage politico-médiatique français a le secret. L’Etat achète des TGV pour les mettre sur des lignes Intercités? Scandale chez les commentateurs. Oh, la belle impéritie de l’Etat, décidément aussi peu inspiré qu’impécunieux. Oh, le beau scandale qui voit l’Etat, pitoyable rebouteux, essayer de sauver une usine de près de 140 ans d’histoire. Oh, l’infâme idée de faire rouler des trains à 200 km/h sur des lignes classiques quand ils peuvent dépasser les 300 - ce qui n’avait choqué personne quand Alstom a vendu cet été des TGV à l’américain Amtrak, qui ne les fera pas non plus rouler à pleine vitesse.
Bien sûr, la solution retenue par l’Etat est loin d’être idéale. Le plan, élaboré dans l’urgence, fleure bon la décision pré-électorale et le rafistolage de circonstance, même si quiconque a déjà pris un train Intercités sait que l’investissement dans de nouvelles machines était plus qu’urgent. Mais où se situe le vrai scandale? Plus que dans la précipitation d’un gouvernement aux abois, celui-ci réside plutôt dans les errements stratégiques de plusieurs générations de dirigeants et d'actionnaires du groupe, qui ont transformé un conglomérat puissant en industriel focalisé sur le seul transport ferroviaire. Un nain au milieu des géants chinois, des GE, Siemens et autres Hitachi.
Pour comprendre pourquoi, un flash-back s’impose. En 1998, le conglomérat Alcatel-Alsthom, patiemment bâti sur plus de cent ans d’histoire, est démantelé dans l’allégresse générale par Serge Tchuruk. La partie télécoms, Alcatel, se sépare de la partie industrielle (trains, turbines), qui sera désormais un Alstom indépendant, dirigé par Pierre Bilger. Au passage, Tchuruk, désormais patron d’Alcatel, en profite pour piocher sans vergogne dans la trésorerie d’Alstom via un superdividende. Et force son ex-filiale à reprendre Cegelec, filiale d’Alcatel, pour 1,6 milliard d’euros. C’est le péché originel, la tare qui poursuivra Alstom toute son existence: vidé de son cash, le nouveau groupe n’a pas les reins assez solides pour encaisser une crise majeure.
Or celle-ci est au coin de la rue. Elle se déclare dès 1999, lors du rachat des activités d’énergie du groupe helvético-suédois ABB. C’est la deuxième erreur stratégique majeure du groupe. D’abord parce que l’acquisition plombe les comptes d’Alstom qui n’en avaient pas besoin. Ensuite, parce que les turbines d’ABB se révèlent défaillantes, ce qui contraint le groupe français à passer plusieurs milliards de provisions successives. Et comme si une décision catastrophique ne suffisait pas, Alstom en ajoute une autre: la même année, le groupe vend à GE son activité de turbines à gaz de Belfort. Celle-là même qui cartonne aujourd’hui au sein du groupe américain…
Ajoutez la faillite du croisiériste Renaissance Cruises, dont les achats de paquebots étaient garantis par les Chantiers de l’Atlantique, filiale d’Alstom, et vous obtenez un cocktail pas loin d’être fatal pour un groupe affaibli. Patrick Kron, appelé en pompier fin 2002 pour remplacer Pierre Bilger, commence à vendre les bijoux de famille. L’ultra-rentable filiale transmission et distribution (T&D) est vendue à Areva (elle sera rachetée en 2010, au prix fort, par Alstom et Schneider). Les turbines industrielles sont cédées à l’allemand Siemens. Insuffisant: en 2004, Alstom, au bord du gouffre, est contraint de frapper à la porte de l’Etat.
C’est bien la puissance publique, si vivement attaquée aujourd’hui, qui va sauver le groupe français. En 2004, deux ministres de l’Economie successifs, Francis Mer puis un certain Nicolas Sarkozy, décident la nationalisation partielle du groupe (21,5% du capital), qu’ils imposent à Bruxelles à l’issue d’une bataille homérique face à la commission Monti. La contrepartie de l’accord avec la Commission, c’est une grande braderie qui continue. La branche Power Conversion d’Alstom est cédée en 2005 à Barclays Private Equity. En 2006, c’est au tour des chantiers navals de quitter le giron d’Alstom. Les Chantiers de l’Atlantique sont cédés au norvégien Aker Yard. Dix ans plus tard, les deux entités sont en pleine forme: Power Conversion, devenue Converteam, a été rachetée par GE en 2011, qui n'en demandait pas tant. Quant aux chantiers de l'Atlantique (STX France), ils croulent sous les commandes, même si leur propriétaire coréen, en difficulté, les a mis en vente.
Alstom, recentré sur l’énergie et le ferroviaire, maigrit à vue d’œil. D’autant que l’Etat et Anne Lauvergeon refusent la fusion avec Areva réclamée par Patrick Kron. Bouygues, qui avait repris le ticket de l’Etat avec l’idée de fusionner Alstom avec le groupe nucléaire, laisse sa participation en jachère, ne consentant pas les investissements nécessaires au développement du groupe. En 2014, c’est le coup de grâce: Alstom annonce la revente de son activité énergie à General Electric, devenant un « pure-player » du ferroviaire.
Pouvait-on faire autrement ? Le débat reste ouvert. Mais le résultat de cette cure d’amaigrissement forcé est éloquent: quinze années d’un démantèlement quasi-permanent mené par ses dirigeants ont fait passer un fleuron français du statut de conglomérat industriel à celui d’industriel de seconde division. Alstom réalise 6,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires… soit moins que le résultat net de Siemens (7,4 milliards d’euros, pour 75,6 milliards d’euros de ventes)!
L’ironie de l’histoire est de voir revenir l’Etat à la rescousse du groupe, douze ans après le premier sauvetage, et de ne récolter que goudron et plumes. Alstom avait pourtant largement les moyens de reconvertir et de moderniser le site historique de Belfort. Lors de la vente d’Alstom Power à GE, le groupe a touché 9,7 milliards d’euros du géant américain. Il avait consacré le tiers de cette somme (3,2 milliards d’euros) en décembre 2015, à un massif rachat d’actions, annulées dans la foulée pour récompenser les actionnaires. Une fraction, même minime, de ces 3,2 milliards aurait suffi à reconvertir le site historique de Belfort vers des activités plus porteuses que les TGV. Et donc à éviter l’intervention de l’Etat, aussi coûteuse que critiquée. Et si c’était cela, le vrai scandale Alstom?
Jacques SAPIR
"La décision de la société Alstom de fermer son usine de Belfort (sauf les travaux de maintenance) a surpris dans le monde politique. D’Arnault Montebourg à Emmanuel Macron, les critiques ont été virulentes. Mais, en réalité, cette décision n’est pas réellement étonnante quand on considère l’état – à court terme – du marché de la construction ferroviaire. Elle est la suite logique du dépeçage d’Alstom, consécutif à la vente à General Electrics de l’ensemble de ses activités dans la production d’énergie"
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EMISSION France inter du mercredi 8 février2017 : "
En septembre dernier, l’information tombe, provoquant surprise et sidération : la direction d’Alstom annonce son intention d’arrêter la production de trains sur son site de Belfort. En jeu, le transfert d’environ quatre cents salariés et la fermeture du site historique de l’entreprise. Dans la précipitation, le Président François Hollande et son gouvernement trouvent une solution pour sauver le site et repousser, un temps, la fatalité. Mais comment a-t-on pu en arriver là, alors même que deux ans plus tôt, on nous annonçait la conclusion d’une vente qui devait relancer Alstom ?
Au printemps 2014, avec la même surprise, on apprenait la cession de la branche énergie d’Alstom au géant américain General Electric. Personne n’était au courant de ces discussions autour de la cession de l’un des fleurons de l’industrie française. S’engage alors, pendant deux mois, une incroyable bataille économique et politique, où s’affrontent, dans la presse et en coulisses, grands patrons et responsables politiques, pour finalement aboutir à une vente, certes, mais sur laquelle l’État, nous disait-on, avait réussi à imposer sa voix.
Comment expliquer que le pouvoir politique ait pu être autant pris de cours ? Comment comprendre une décision qui acte encore un peu plus la désindustrialisation du pays et renforce nos concurrents ? En quoi révèle-t-elle une forme de renoncement des élites économiques et administratives du pays ? Quels sont les dessous de ce dossier, autrement dit, en quoi certains éléments laissent-ils à penser qu’il pourrait s’agir d’un scandale d’Etat ?
L'invité
Sur ces questions, nous reviendrons en seconde partie d’émission avec le journaliste Jean-Michel Quatrepoint, qui a enquêté sur cette histoire et qui en a fait le récit dans Alstom, scandale d’Etat, paru aux éditions Fayard en 2015.
Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, interrogé mercredi sur le mégacontrat du RER nouvelle génération que le consortium Alstom-Bombardier s'apprête à remporter:
"C'est toujours une bonne nouvelle quand les savoir-faire des salariés d'Alstom sont mis en avant. Et puis ça génère du travail. Il faut que ce soit des emplois pérennes, payés aux qualifications des salariés.
C'est le fruit d'une bataille des salariés d'Alstom, c'est le résultat de la mobilisation et d'une sensibilisation autour de l'industrie française que porte la CGT.
Il faut continuer à développer cette idée qu'industrie et droits sociaux ne sont pas incompatibles. C'est le combat que mène la CGT depuis un moment, et qu'on va continuer puisque nous préparons des initiatives autour de l'industrie en France, sans opposer l'industrie qu'on dit +vieille+ et la nouvelle industrie."
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Une note de Bercy émet un doute sur la validité juridique de la commande des 15 rames TGV passées par l’Etat au constructeur ferroviaire pour sauver son site de Belfort. Le ministère évoque une possible distorsion de concurrence.
En octobre dernier, le gouvernement, pour sauver le site industriel d’Alstom à Belfort, passait commande au constructeur de 15 rames TGV, un marché censé garantir l’activité du site pour au moins quelques années, et le sauvetage des 480 emplois menacés. Montant de l’enveloppe : 400 millions d’euros. Ce plan de dernière minute avait dès le début soulevé quelques questions parmi les quelles la pertinence d’une telle commande. En effet, l’Etat a validé l’acquisition de rames TGV destinées à rouler sur une ligne Intercité entre Bordeaux et Marseille. La CGT y voyait à l’époque, un sauvetage express « un peu artificiel ».
Au-delà du matériel commandé, c’est aujourd’hui le montage juridique du marché qui pose question. Reprenant une note d’information des services juridiques de Bercy, les Echos estiment que le projet s’avère même « très compliqué à mettre en pratique ». Pour commander directement à Alstom, l’Etat s’est servi d’un contrat-cadre existant entre le constructeur et la SNCF et datant de 2007. Mais pour Bercy, cité par le quotidien économique, « cette cession partielle du contrat remettrait nécessairement en cause les conditions initiales de mise en concurrence et constituerait par conséquent un détournement de procédure ». En d’autres termes, ce contrat pourrait relever d’une distorsion de concurrence selon les services juridiques du ministère de l’Economie.
Le gouvernement, pour sa part, s’affiche confiant. « D’après nos informations, une réunion s’est tenue ce matin à Belfort concernant ce dossier lors de laquelle le représentant de l’Etat n’a pas du tout remis en cause la validité de la commande » explique Daniel Dreger, délégué CGT et membre du bureau du comité de groupe européen d’Alstom. Plutôt qu’un achat direct, l’Etat aurait donc opté pour une commande passant par la SNCF, l’entreprise publique achetant les rames TGV sur demande du gouvernement.
Un montage qui devrait être validé fin février lors d’un conseil d’administration de la SNCF. Entre temps, une réunion réunissant les syndicats et Christophe Sirugue, secrétaire d’Etat chargé de l’industrie, est prévue le 17 février. « Ces deux échéances fixées rassurent les syndicats, poursuit Daniel Dreger, ils se sentent confiant mais restent prudent ».
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29 septembre 2016
Interview de Philippe Martinez devant le siège d'Alsthom le jour du CCE.
L'Usine Nouvelle - Ce matin, Pierre Gattaz a mis en garde le gouvernement face à la tentation de passer des commandes "artificielles" à Belfort. Seriez-vous d'accord avec lui ?
Philippe Martinez - Je n'ai pas l'habitude d'être d'accord avec monsieur Gattaz. Ce qui est important, ce dont il y a besoin, c'est d'avoir une vraie réflexion de fond sur la filière ferroviaire française. Il faut mettre ensemble ceux qui construisent les trains et ceux qui les font rouler. Et celà pour pérenniser non seulement Belfort mais aussi tous les autres sites d'Alstom, dont bon nombre sont en difficulté. Au lieu de ça, on a préféré casser le système ferroviaire français et organiser le dumping social.
Quel est ce dumping social que vous dénoncez ?
Aujourd'hui, Alstom exécute des commandes françaises dans des pays à bas coûts, où les salaires sont très bas, où les salariés travaillent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Regardez l'usine Alstom de Katowice, en Pologne ! Elle récupère du travail jusqu'ici confié à Reichsoffen. Il est scandaleux que la commande publique fasse travailler des salariés dans ces conditions. Les appels d'offres publics devraient comporter une charte sociale, compatible avec le droit européen. Il faut mettre fin au dumping social sur la commande publique.
Qu'est-ce que le gouvernement peut réellement faire face aux difficultés des sites d'Alstom en France ?
Repenser le système ferroviaire français, c'est d'abord penser la place du train. Il me semble que la France est le pays qui a organisé la COP21, non ? Le train est un mode de transport qui n'émet pas de CO2 mais regardez le niveau historiquement bas du fret en France ! Regardez comment on a fait évoluer l'équilibre du transport du rail vers la route, comment on ferme des gares partout, réduisant de fait la fréquentation des trains… Si on inverse ces mouvements, c'est autant de commandes de locomotives et de trains pour les usines.
Il reste le problème financier : le système ferroviaire est plombé par sa dette…
Il faut que l'Etat assume ses responsabilités. La SNCF est une entreprise publique, l'Etat peut y injecter du capital. On ne critique jamais une entreprise privée qui procède à une recapitalisation. Pourquoi pousse-t-on toujours des cris d'orfraie quand c'est l'Etat qui investit pour le futur dans une entreprise publique ? Et de l'argent, nous, on sait où en trouver ! J'ai encore lu ce matin que les entreprises du CAC 40 disposaient de plus de 25 milliards d'euros de trésorerie…
Permettre à Alstom de développer l'activité de maintenance est évoqué comme une solution, or ce sont les opérateurs, dont la SNCF, qui en ont aujourd'hui la charge. Qu'en pensez-vous ?
Qu'Alstom veuille prendre l'activité de maintenance de la SNCF, ce n'est pas nouveau. C'était déjà le cas sous la direction de Patrick Kron. On le comprend bien, c'est une activité juteuse. Mais la maintenance n'est pas le coeur de métier d'Alstom. Plutôt que de chercher à piquer le boulot des autres, les entreprises françaises du ferroviaire devraient travailler plus ensemble. Alstom, la SNCF et la RAPT doivent collaborer plus étroitement.
Rédigé par Canaille Lerouge