Le barême des indemnités prud'homales "s'assoit sur le principe de libre application des juges"

Publié le par FSC

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"Sécurisation" pour la majorité, "cadeau aux employeurs" pour la gauche: le barème des indemnités prud'homales en cas de licenciement abusif a agité jeudi l'Assemblée nationale, au troisième jour de débat sur la ratification des ordonnances réformant le code du travail.
A main levée, dans un hémicycle clairsemé, les députés ont donné leur feu vert à l'ordonnance sur "la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail" contenant ce barème. Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, la mesure a le soutien du patronat contre la "peur" d'embaucher, mais est critiquée côté syndical -y compris par la CFDT.
En jeu, la création d'un plafond des sommes décidées par les prud'hommes, fixé à un mois de salaire en dessous d'un an d'ancienneté, et augmentant progressivement jusqu'à 20 mois de salaire. L'ordonnance fixe aussi un plancher, d'un mois à partir d'un an d'ancienneté, puis de trois mois à partir de deux ans, avec des niveaux dérogatoires dans les très petites entreprises (TPE), de moins de 11 salariés.
Les trois groupes de gauche ont tenté vainement de supprimer cette ordonnance, dénonçant l'objectif d'un "Code du travail au rabais", un "feu d'artifice de cadeaux" aux employeurs, et affirmant qu'elle vise à "rendre le licenciement moins coûteux".
Le communiste Sébastien Jumel, pour qui la barémisation "s'assoit sur le principe de libre application des juges", a jugé cette ordonnance "au cœur du projet libéral" du gouvernement.
La barémisation revient à une "sécurisation des licenciements", a dénoncé l'Insoumis Eric Coquerel, jugeant globalement que les ordonnances "sont une abomination".
Adrien Quatennens (LFI) a, lui dénoncé un système qui "sera presque toujours défavorable au salarié". Il s'est appuyé sur des cas concrets publiés par le quotidien Libération, tel celui d'"Helena, salariée dans un Ehpad (maison de retraite) qui, avant, pouvait prétendre à 42.000 euros de dommages et intérêts et qui, désormais, avec vos ordonnances pourra prétendre à entre 6.800 et 27.300 euros".
Helena sera "donc sécurisée?", a demandé Adrien Quantennens à l'adresse de la ministre du Travail, Muriel Pénicaud.
Pour Nouvelle Gauche, Boris Vallaud a dit contester le "présupposé" selon lequel les employeurs embaucheront plus facilement s'ils peuvent licencier plus aisément. Ce socialiste a critiqué "une mauvaise affaire faite aux salariés", ajoutant que la hausse des indemnités légales de licenciement ne suffisait pas à "exonérer" le gouvernement.
Les plafonds "concernent 150.000 salariés par an" alors que la hausse de l’indemnité légale "bénéficiera aux 700.000 salariés licenciés en moyenne tous les ans", selon la LREM Catherine Fabre.
Le rapporteur Laurent Pietraszewski (LREM), issu des ressources humaines, a, lui, défendu l'ordonnance comme "vecteur de sécurisation", d'autres LREM vantant une mesure "pragmatique".
La ministre, qui avait jugé en commission le barème "rassurant" pour employeurs et salariés, a aussi insisté sur le besoin de "confiance" et "d'agilité" des entrepreneurs. Elle a rappelé que le plafond ne s’appliquera pas en cas de harcèlement ou discrimination.
Tous les amendements, Insoumis, communistes ou socialistes, pour rétablir le droit antérieur ou revoir les barèmes ont été rejetés.
Ces élus ont aussi critiqué le passage au périmètre national pour apprécier les difficultés économiques des groupes licenciant, ou le CDI de chantier étendu, "CDD sans la prime de précarité". Un amendement communiste, l'un des rares adoptés sur l'ordonnance, vise à donner une priorité d'embauche après un tel contrat.
Sur la rupture conventionnelle collective controversée, le gouvernement a fait préciser qu'il faudra une homologation préalable pour éviter des "préretraites déguisées" et que les salariés bénéficieront de mesures d'accompagnement.
La ministre, ex-DRH, a dénoncé globalement un "présupposé" des opposants aux ordonnances. "A chaque fois qu'on propose que ce soit le dialogue social qui règle un sujet, vous répondez que ça ne marchera pas" et que c'est à la loi de définir "à la place des partenaires sociaux ce qui concerne entreprises et salariés", s'est-elle emportée, appelant à faire "confiance".
Eric Coquerel a jugé ses propos "assez hallucinants". "Où sont vos partenaire sociaux? (...) Vous avez le Medef, vous avez le Medef et vous avez le Medef", a-t-il lancé.
 
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