RATP : « Va falloir préparer une grève massive ! » Colère au dépôt;de Pantin, en soutien à Ahmed Berrahal
REPRIS du site CGT Unilever Le Meux (OISE)
Plus de 150 personnes ont manifesté leur soutien à Ahmed Berrahal ce jeudi devant le dépôt RATP de Pantin. Dans une ambiance combative et émouvante, plusieurs salariées ont dénoncé le sexisme dans l'entreprise et pointé le rôle de l'élu CGT pour lutter contre. Une première étape dans la construction du rapport de force pour s'opposer à son licenciement.
Crédit photo : Flora Carpentier
Alors que la convocation en entretien disciplinaire est tombée à peine une semaine avant, plus de 150 personnes se sont retrouvées ce jeudi 8 avril pour soutenir Ahmed Berrahal. Délégué CGT sur le dépôt de bus RATP Flandre à Pantin et secrétaire CSSCT, Ahmed est dans le viseur de la direction. Celle-ci l’accuse de harcèlement moral … pour avoir dénoncé l’agression sexuelle d’un chef sur une salariée. La direction n’en est pas à sa première attaque contre Ahmed et l’avait déjà réprimé il y a quelques mois de deux mois de mise à pied pour faits de grève. Cette fois, la RATP pourrait bien aller au bout de ses velléités de licencier le syndicaliste.
Et pour cause, Ahmed dérange. Il a mené de nombreux combats pour défendre les droits des salariés - ces derniers temps face à une direction qui expose les salariés au Covid - mais depuis des années aux côtés de ses collègues femmes victimes de harcèlement ou d’agressions sexistes.
La veille de l’entretien disciplinaire, c’est dans une vidéo poignante, cumulant plus de 20.000 vues sur les réseaux sociaux, que 30 conductrices de bus manifestaient leur soutien à Ahmed, revendiquant le rôle qu’il avait pu jouer à leurs côtés. Pour plusieurs d’entre elles, ce rassemblement aura été le lieu de réaffirmer cette nécessaire libération de la parole sur les violences sexistes dans l’entreprise et l’occasion de dénoncer une direction qui cherche à tout prix à étouffer les cas. L’émotion était palpable quand Christelle, machiniste à Nanterre, a pris la parole pour témoigner de l’agression sexuelle subie de la part d’agents de sûreté RATP et du mépris de la direction à son égard.
Nadia et Delphine, machinistes sur le dépôt de Pantin, allaient dans le même sens, rappelant le rôle joué par le militant pour lutter contre les trop nombreuses agressions sexistes, mais aussi pour faire respecter les droits des femmes dans l’entreprise, exposées à la difficulté de combiner leur vie de famille, et pour nombre d’entre elles de mères isolées, avec le travail en horaires décalés.
Flora, militante à Révolution Permanente et au collectif féministe Du Pain et des Roses, était aussi présente en soutien et a abondé : « Oui il y a du harcèlement sexiste à la RATP, oui il y a des violences sexistes et sexuelles et aujourd’hui il y en a marre de se taire. Il faut dénoncer le sexisme en entreprise, le patronat s’en sert pour opprimer toujours plus les femmes. »
Aux côtés d’Ahmed ce jeudi, de nombreux collègues venus de différents dépôts de région parisienne. Sur place également des cheminots et les grévistes de l’Infrapole SNCF Paris Nord, des agents de la maintenance des voies en grève depuis près de 80 jours. Partant de leur expérience, Anasse Kazib, cheminot syndiqué Sud Rail et militant au NPA s’est exclamé : « Le moment où ils te mettent un cabinet d’avocat, payé des milliers d’euros pour inventer des histoires de harcèlement c’est que derrière ils veulent te virer. Ils savent qu’il y aura du soutien pour Ahmed, mais ce qu’ils entendent vraiment c’est la grève, c’est quand il n’y a plus un bus qui sort du dépôt qu’ils comprennent. A l’infrapole il y a eu 8 procédures disciplinaires et 2 demandes de radiation, 6 blâmes : mais la direction a reculé sur la totalité des entretiens disciplinaires, ils ont reculé parce qu’il y avait grève. L’urgence pour Ahmed c’est de construire la grève. »
Des militant.e.s d’autres secteurs étaient également présents, comme Anissa Amini, aide-soignante en EHPAD, plusieurs enseignants, et une délégation d’étudiants et militants au Poing Levé. Des élus ou militants politiques ont également répondu présents, à l’image de Nathalie Arthaud, porte-parole de Lutte Ouvrière, ou d’un militant de La France Insoumise. La veille, les députés de Seine-Saint-Denis Bastien Lachaud et Marie-George Buffet avaient témoigné leur soutien par courriers adressés à la direction de la RATP.
C’est dans une ambiance combative et émouvante, très entouré, qu’Ahmed est rentré pour son entretien disciplinaire, pendant que les personnes présentes s’activaient à prendre des photos de soutien pour inonder la toile. A sa sortie, il a pu rendre compte de la « mascarade » de cette nouvelle procédure à son encontre, racontant les faits qui lui étaient reprochés, soi-disant constitutifs de harcèlement moral à l’encontre d’un chef : avoir refusé de lui serrer la main pendant la dernière grève (!), avoir déclenché des procédures de DGI (danger grave et imminent) face au Covid19, et avoir transmis la main courante pour agression sexuelle d’une salariée... à des membres de la direction.
Un dossier bien fébrile, donc, qui démontre une fois de plus la détermination de la RATP à se débarrasser d’un syndicaliste qui dérange. « La réalité c’est qu’ils ne veulent plus voir un syndicaliste combatif qui défend les femmes, les hommes, qui dénonce le harcèlement sexuel... », insiste Ahmed, appelant ses collègues à se mobiliser pour le soutenir face à une direction qui a déjà engagé des milliers d’euros pour se payer une enquête à charge contre lui et ne va pas s’arrêter en si bon chemin. « Tout ça montre bien que la tôle n’a aucun scrupule et ne va pas stopper cet acharnement, et moi je n’ai pas de gilet pare-balles, alors on attend quoi ? Si on nous dégomme nous, qui va vous défendre ? Donc il va falloir préparer une grève massive ! »
Alors que la RATP a un mois pour se prononcer sur la suite et une très probable convocation d’Ahmed Berrahal en conseil de discipline, la construction d’un mouvement de grève solide doit en effet être la prochaine étape, déterminante, de la construction du rapport de force.
Publié par REVOLUTION PERMANENTE