Où vont les états-majors syndicaux? Au monde du travail de reprendre l'initiative !

Publié le par FSC

 

Par Anna Persichini syndicaliste métaux,
Georges Gastaud, syndicaliste enseignant
 
 
 
A l'approche d'une présidentielle très verrouillée, l'oligarchie au pouvoir, ses Macron et autre Pécresse flanqués désormais de candidats néo-pétainistes que nous ne nommerons pas, s'apprête  à liquider à la fois ce qui reste de nos acquis (la retraite à 64 ans? A 67 ans comme le réclame Philippe? Plus de retraite du tout?), du "produire en France" (marche à la délocalisation finale de Renault et de PSA), des services publics (dénationalisation finale de l'Ecole publique, privatisation finale du rail et de l'énergie, asphyxie finale de l'hôpital...) et de la souveraineté du pays ("Etat fédéral européen", exige le nouveau chancelier allemand Scholtz; "souveraineté européenne", "armée européenne" lui répond docilement Macron!).
 
Par ailleurs, l'UE enchaînée à l'OTAN poursuit son bras de fer belliciste avec la Russie et avec la Chine. Et c'est à ce moment crucial pour l'avenir du pays, du monde du travail et de la paix que les états-majors syndicaux euro-formatés se montre plus que jamais incapables de prendre la mesure des périls mortels et de proposer les contenus revendicatifs et les modes d'action indispensables pour susciter un sursaut vital du monde du travail dans notre pays.
 
Certes il y a eu la journée massive de grève de l'Education nationale, mais outre que la majorité des manifestants ne se sont pas rangés, le 13 janvier, derrière les banderoles syndicales, à aucun moment les dirigeants de la FSU (nous ne parlons que des syndicats véritables, ceci ne concerne donc ni la CFDT ni l'UNSA, ces accompagnatrices professionnelles de toutes les casses) n'ont été à l'unisson de la base réclamant massivement le départ de Blanquer.
Loin de crier "Blanquer, casseur, dégage!", les directions syndicales sont allées "négocier" au sifflet le soir même, relégitimant de ce fait Blanquer, acceptant que les syndicats lycéens restent à la porte du ministère, et ne traitant pas avec le mépris qu'il mérite les mesurettes ridicules annoncées par Blanquer à seule fin de se remettre en selle. 
 
En outre, rien de sérieux n'a été fait pour mettre en cause, non seulement les protocoles sanitaires scolaires dangereux ou insuffisants, mais pour remettre centralement en cause Parcoursup, la contre-réforme ravageuse du lycée et l'assassinat du bac national (et à travers lui, des conventions collectives nationales: car lorsqu'il n'y aura plus de diplômes nationaux validés par des profs certifiant les niveaux atteints, les conventions nationales de branche s'écrouleront et tout sera négocié de gré à gré entre le patronat tout-puissant et les salariés isolés négociant des "compétences" aux contours indéfinis).
 
Certes il y a le 27 janvier sur les salaires, mais outre que rien n'est fait pour montrer le lien entre la chute du pouvoir d'achat populaire, l'euro-austérité (l'UE et l'euro sont "sanctuarisés" par les états-majors affiliés à la CES ou désireux d'y entrer...), la casse des industries, les euro-privatisations et les euro-délocalisations, le 27 risque fort d'être une nouvelle "journée saute-mouton" sans plan d'action organisant la montée en puissance, sans programme revendicatif clair, sans appel à construire le tous ensemble en même temps par exemple en appelant à une grande manif nationale à Paris, sans tentative de s'unir aux gilets jaunes, et surtout, sans volonté aucune de perturber si peu que ce soit cette campagne électorale atone où tout est fait pour mettre au centre, non pas la question sociale et ses pendants obligés: la reconquête de la souveraineté nationale, la lutte contre les guerres impérialistes, mais une pseudo "identité" à connotation raciste, et totalement dénuée de ses dimensions républicaines, voire socialistes: cela n'a pas été un "point de détail" que la CGT, sous la pression de ses éléments réformistes et européistes, ait retiré de ses statuts la référence à la socialisation des moyens de production et la lutte pour une société sans classes! 
 
Bien entendu, l'état-major de la CGT, trop occupé à chercher un impossible dialogue fraternel avec la très méprisante direction de la CES et de la CFDT (toutes deux présidée par Berger!), n'est même pas capable d'exiger la nationalisation du nouveau monopole privé en voie de constitution Véolia-Suez-Engie. Ni même de défendre vraiment EDF puisque Martinez a signé un appel avec Greenpeace, cet ennemi historique de l'électricien nationalisé français.
 
Or une grande EDF intégralement renationalisée est par destination le socle indispensable d'une future reconstruction du "produire en France" sans lequel la classe ouvrière de France, française ou immigrée, est majoritairement condamnée au déclassement, voire à la déchéance sociale. Au contraire, c'est le grand silence des confédés sur le fait que l'euro-gouvernement Macron "plombe" comme jamais EDF en le forçant à vendre à bas prix à ses concurrents privés une électricité achetée à haut prix aux industriels allemands producteurs d'une énergie carbonée fortement toxique pour l'avenir du climat !
 
Ajoutons à cela que l'état-major CGT, qui a surtout peur de perdre la majorité au prochain congrès (déjà reporté d'un an) de la centrale (printemps 2023) au profit des bases rouges en nombre croissant semble avant tout pressé de "purger" le syndicat CGT de PSA-Poissy. On voudrait provoquer le départ ou l'exclusion anticipés des secteurs "rouges" de l'organisation, que l'on ne s'y prendrait pas autrement. C'est que tout ce petit monde de plus en plus rosissant, pro-euro, OTAN-compatible et pro-UE, voire carrément anticommuniste (cf la récente lettre commune que Martinez, Berger et Cie ont adressée à Solidarnosc, le "syndicat" clérical et contre-révolutionnaire polonais pour le supplier de revenir aux "valeurs" hautement suspectes de 1980!) veut éviter que se reproduise le schéma du dernier congrès CGT où la direction confédérale avait perdu le vote emblématique sur la Fédération syndicale mondiale, la centrale rouge qui concurrence à l'international la CES et la CSI pro-capitalistes: à l'arrière-plan de cette montée des secteurs rouges de la CGT, le meeting de Gardanne des syndicats rouges et l'émergence dans l'O.S. de nombre de syndicats qui se désaffilient de la CES, mènent le combat de classe et réadhèrent à la FSM, à laquelle la CGT était affiliée durant la longue période où elle agissait main dans la main avec les militants, alors marxistes-léninistes et très euro-critiques, du Parti communiste français (Benoît Frachon, puis Séguy et Krasucki, ces grands patriotes anciens résistants, étaient aussi membres du BP du PCF).
 
Bref, tout se passe comme si l'état-major de la centrale voulait rapidement amputer ses bases rouges contestataires (par l'exclusion directe ou en les écoeurant) avant le prochain congrès. Quitte à réduire la CGT à peau de chagrin, à consolider l'hégémonie de la CFDT jaunâtre et finalement, à aider la CES et Berger à mettre en place le grand "syndicat" réformiste (en réalité CONTRE-réformiste, car le capitalisme moderne et ses petits suiveurs dits "réformistes" n'apportent plus que des régressions) dont l'oligarchie européenne et "française" a besoin pour parachever la mise au pas finale des travailleurs et du peuple français. 
 
Il importe à tous ceux qui sont attachés au syndicalisme de lutte, au grand héritage de la CGT de classe et de masse, mais aussi de la tendance Unité et action de la FSU (ex-FEN/CGT), de réagir vite, fort, ensemble et offensivement pour ne pas subir ce scénario-catastrophe alors que, à nouveau, un vent de lutte aujourd'hui relayé par les enseignants, traverse le pays. 
 
Il importe enfin aux AG syndicales de briser l'omertà sur l'UE et sa nocivité profonde. D'y remettre centralement en débat la lutte pour la paix, contre le surarmement, pour que les milliards n'aillent pas aux marchands de missiles mais à la santé, à l'éducation, à la reconstruction d'un secteur public débarrassé des vampires du capital. 
Que les syndicalistes de classe, plus que jamais se parlent, qu'ils élaborent ensemble une plateforme revendicative nationale unificatrice! 
 
Que dans chaque lutte, rejetant le suicidaire repli corporatiste, les services publics dialoguent entre eux et avec les syndicats du privé! 
 
Que chacun, secouant la torpeur mortifère d'une présidentielle dominée par les "quatre réacs" Pécresse, Macron, Zemmour et Le Pen, ose remettre au centre du débat l'intervention propre de la classe laborieuse en se souvenant que "il n'y a pas de sauveur suprême", et que "l'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes".  
 
 
 
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