"Le syndicalisme poursuit la coordination des efforts ouvriers, l'accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d'améliorations immédiates. (...) Mais cette besogne n'est qu'un côté de l'œuvre du syndicalisme : il prépare l'émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l'expropriation capitaliste."
Charte d'Amiens
Pyrénées-Orientales : le Train jaune à l'arrêt pour 10 semaines, "La SNCF favorise sciemment la route", dénonce la CGT
Publié le
par FSC
SOURCE : L'Indépendant
Publié le
Il faudra être patient pour espérer revoir la silhouette familière du Train jaune serpentant à travers le haut-Conflent et la Cerdagne. Depuis ce lundi 28 février, le trafic est totalement interrompu jusqu'au 6 maiafin de réaliser plusieurs travaux sur la ligne. Un "prétexte", s'insurgent les représentants du personnel CGT qui soutiennent qu'il était possible de faire autrement. Ils pointent une manœuvre de la SNCF visant à vider la ligne de sa substance, et ainsi justifier à terme... sa fermeture.
Fin du trafic, une nouvelle fois, entre Villefranche-de-Conflent et Latour-de-Carol. La ligne d'une soixantaine de kilomètres inaugurée en 1903 avance en pointillé depuis plus de 5 ans. Avec des pauses régulières de plusieurs semaines. L'an dernier à la même date déjà, le Train jaune était resté sur une voie de garage entre le 1er mars et le 7 mai. Remplacement de traverses, renouvellement de câbles de haute tension et rénovation d'ouvrages d'art avaient justifié cette longue mise à l'arrêt. Puis rebelote à l'automne, même menu avec les mêmes conséquences... Depuis fin septembre, la ligne n'avait été rouverte qu'au 10 novembre.
Alors, le canari catalan commencerait-il à s'essouffler ?
Pour les représentants CGT Cheminots du Train jaune, ces "fermetures chroniques" ne sont que le symptôme d'une volonté de la direction de la SNCF de saboter un outil qui fonctionne mieux que jamais. "Historiquement, on fermait 15 jours pour ce genre de travaux, aujourd'hui on arrive à des mois entiers", interroge Frédéric Roy, secrétaire général de la section. "Au départ, il y a quelques années, on ne s'y était pas opposé car il s'agissait de remplacer la voie", poursuit le syndicat. Mais cette fermeture, "en deuxième semaine des vacances de février de notre zone", souligne son camarade Joël Molinier, elle ne passe plus. "Pour nous, c'est voulu! Ce n'est pas possible que ce ne soit pas fait sciemment! Ailleurs, ça n'existe pas.",tempêtent les syndicalistes.
"Comme cette ligne de montagne est à voie unique,avait justifié en février 2021 un responsable des chantiers pour SNCF Réseau, nous sommes obligés de couper la circulation des trains. Ajoutez à cela des conditions difficiles, une voie en montagne est bien plus technique qu'en plaine."Certes, admettent les agents syndiqués, mais "en général, on cherche à ménager l'intérêt des usagers, en privilégiant les travaux de nuit ou entre les circulations de train. Ici, ces pistes n'ont pas été explorées."Sans compter - preuve de l'abandon de la ligne aux yeux de la CGT - l'absence cette année de deux dispositions visant à atténuer l'impact de la fermeture : le maintien de la partie "haute" de la ligne, qui serait possible à partir de Mont-Louis ou Font-Romeu, car "Il s'agit d'un entretien courant de la ligne, la seule complexité est sur la partie basse du pont Gisclard";et la mise en place de liaisons de remplacement par autocar calquées sur les horaires des trains.
Pendant ce temps, les agents CGT de la SNCF se désespèrent de voir chaque week-end de saison hivernale la route nationale engorgée de bouchons. "La SNCF favorise sciemment la route alors que le Train jaune est un outil formidable pour désenclaver la 116!", tonnent-ils ensemble.
Il y a 30 ans, le trajet durait moins de 2 heures, aujourd'hui c'est entre 3 heures et 3h30
Tout ceci "empêche les habitudes de se faire sur une utilisation du Train jaune pour des trajets de travail", dénonce Frédéric Roy. Un"esprit de sabotage" de cette vocation de la part de la SNCF qu'il illustre par un autre argument de poids. "Voilà une trentaine d'années, le voyage Villeranche-Latour durait moins de deux heures. Aujourd'hui, c'est minimum 3 heures, jusqu'à 3 h 30 l'été. Plus on se modernise, plus c'est lent. Partout ailleurs, la tendance est inverse. Ici, on n'est volontairement pas concurrentiel." "La vitesse avait été passée en mode dégradé quand les équipements étaient vieillissants,précise Christophe Montané, un autre élu CGT Train jaune,mais aujourd'hui, techniquement rien n'empêche qu'on revienne au moins en partie sur cette réduction de vitesse."
Dans le même temps, les représentants du personnel déclarent avoir échoué à convaincre la direction de maintenir le service complet sur les guichets, comme à revoir la politique tarifaire ou encore intégrer le service commercialisation pour favoriser le retour des trains étudiants ou des correspondances entre le Train jaune et la ligne Perpignan-Villefranche. Autant d'éléments qui selon la CGT décloisonneraient le canari de la catégorie "touristique" dans laquelle la direction l'enfermerait à dessein. "Il y a une volonté très marquée de ne pas remettre le Train jaune à sa place de ligne du quotidien", interprète Frédéric Roy. "Économiquement, ce ne sera pas viable,prédit le responsable syndical. Et ce sont les mêmes qui aujourd'hui interrompent le trafic qui bientôt diront qu'on ne peut pas entretenir un train qui n'a que quelques mois d'exploitation dans l'année."