Réflexions suite aux législatives : André PRONE
EXTRAIT :
Conséquences de la crise économique, écologique, politique, sociale sur les rapports électoraux et les rapports de classe
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Par André Prone, poète, essayiste et penseur militant
(auteur de « Capitalisme et Révolution », nouvelle édition, l’Harmattan 2019)
Introduction
Pour comprendre les modifications des rapports électoraux et des rapports de classe, il est utile de revenir sur les aspects concrets de la crise économique, écologique, politique et sociale qui frappent notre pays, et ceux de la triade Europe, États-Unis, Japon, en regard des autres pays en développement du « grand Sud », y compris la Russie et la Chine. Cela implique d’éclairer la complexité de la crise structurelle qui affecte le système capitaliste mondialisé depuis plus de quarante ans (ce qui en fait la plus longue crise structurelle du système capitaliste depuis son avènement vers la fin du 18e siècle) et de décortiquer son impact global, y compris culturel, au sens gramscien du terme, sur les mentalités, ainsi que le processus de fascisation en cours.
1 – Considérations liminaires sur la crise structurelle qui affecte l’ensemble du système capitaliste mondialisé
En quoi la crise structurelle qui sévit depuis la fin des années 1970 est-elle différente des crises structurelles qui l’ont précédée ? Assurément par l’ampleur de celle-ci, mais surtout parce qu’elle
signe un changement de paradigme dans l’organisation du système capitaliste lui-même de par :
- sa globalisation à l’échelle planétaire et la concentration sans précédent des capitaux entre les mains de quelques grands groupes transnationaux ;
- la collusion sans cesse accrue des États avec les visées expansionnistes et impérialistes du capital, laquelle collusion renforce leur dimension autoritaire et guerrière, et par les énormes potentialités qu’offrent la dernière révolution technologique arrimée à la cybernétique, qu’accompagne l’inféodation de l’ensemble des secteurs de la recherche publique dans son processus congénital d’accumulation, lui-même accru par la financiarisation et la marchandisation déchaînée de cette économie mondialisée ;
- la dégradation inédite à l’échelle de la planète des équilibres écosystémiques et leurs répercussions sur l’ensemble du milieu vivant et, à fortiori, sur l’humanité toute entière.
Les conséquences de cette crise socio-écosystémique sur les rapports électoraux et les rapports de classe sont donc considérables.
Sans prétendre à un recensement exhaustif listons en les aspects les plus marquants :
- une défiance de plus en plus marquée des couches populaires et des classes laborieuses à l’égard des institutions et de leurs représentants politiques dans l’ensemble des continents (notons que cela ne touche pas que la question politique, mais aussi la question syndicale : si un nombre toujours plus grand de citoyens à travers le monde désertent les urnes, plus nombreux encore sont les salariés qui désertent le champ syndical – bien sûr, quand celui-ci est autorisé par les États –,
en France, 2/3 des salariés ne votent plus aux élections professionnelles et la moyenne d’âge des syndiqués est autour de 50 ans) ;
- une perte de repère de ces mêmes populations par rapport aux enjeux de classe et la méconnaissance progressive de la dimension idéologique, notamment celle qui avance la nécessité d’une appropriation des moyens de production et d’échanges par ceux qui produisent les richesses, et donc leur désintérêt relatif pour l’action collective ;
- une confusion quant aux réelles causes de la crise environnementale (que la propagande médiatique entre les mains du capital ou de l’État amplifie), les conduisant soit à une culpabilisation stérile, soit à une confiance aveugle dans d’improbables remédiations technologiques ou, dans le meilleur des cas, dans des manifestations et des actions citoyennes hors du champ concret les conséquences de l’accumulation
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