Régis de Castelnau : LES CINQ DÉFIS RELEVÉS PAR VLADIMIR POUTINE
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Depuis deux ans nous avons été confrontés en Occident à une propagande médiatique russophobe à connotation souvent raciste, visant à présenter les Russes comme une population de moujiks imbéciles soumis un vampire assoiffé de sang. Se précipitant dans une opération militaire où des soldats ivrognes, armés de pelles et menés par des incompétents couraient à une défaite sanglante et inévitable. Sous les injures, les quolibets et les menaces, nous fûmes quelques-uns à appeler au sang-froid et à expliquer que l’Occident se lançant dans l’aventure militaire et la guerre économique contre la Russie était peut-être en train de faire une bêtise. Et qu’en tout cas qu’il fallait essayer de mieux analyser le réel et d’arrêter de prendre ses désirs pour des réalités. En vain.
Aussi le retournement qui vient de se produire, et qui voit les mêmes changer d’avis, voire faire acte de contrition provoque nécessairement un peu de joie mauvaise. Parce que, parfois dans une certaine confusion, le système médiatique occidental est quand même en train de prendre acte de la défaite de l’Ukraine otanisée qui se dessine. Et en son sein, nombreux étant ceux qui considère qu’il n’est plus nécessaire de tergiverser et que « la messe est dite ».
Dans la mesure où nous fûmes, à notre place, parmi ceux qui tentèrent, tant bien que mal, de résister à l’emballement guerrier, il nous est apparu nécessaire de revenir sur une description de ce qui s’est réellement passé et sur l’inanité du « récit » qui nous a été imposé par le bloc élitaire occidental.
2007. Discours de Munich : Premier défi accepté
La dislocation de l’Union soviétique est un événement politique considérable qui a dit-on, mis fin à la guerre froide, celle-ci ayant été remportée par les États-Unis. Cette vision a eu deux conséquences dont nous payons aujourd’hui la facture, ou plutôt qui sont à l’origine de la crise que traverse le monde et qui voit une domination occidentale de cinq siècles entrer en déclin. Et que décrit Sergei Narichkine, chef du service de renseignement extérieur russe (SVR) dans un article récent : « Un conflit fondamental entre l’ancien et le nouveau monde, qui a mûri sous la surface au cours des trois décennies qui ont suivi la fin de la guerre froide, est entré dans une phase ouverte avec le début de l’opération militaire spéciale de la Russie et a acquis un caractère géographique global au cours de l’année écoulée. »
La première conséquence est celle de l’hubris qui a saisi l’Amérique, persuadée du diagnostic (stupide) de Fukuyama sur « la fin de l’Histoire », de sa destinée, de son exceptionnelle qualité et de sa puissance. Les USA avaient gagné et le rôle de maître du monde leur revenait. La deuxième conséquence est celle de la catastrophe des années 90 qui a alors frappée une Russie qui venait de perdre son empire et se trouvait livrée aux intérêts américains et russes, qui se précipitèrent pour la piller. Plongeant le pays dans la misère, détruisant les institutions, démantelant la puissance économique nulle et livrant un peuple russe humilié à la pègre. La responsabilité des occidentaux dans ce désastre est entière. Tout occupés qu’ils étaient à corrompre tout ce qui pouvait l’être, comme Boris Eltsine, l’infect ivrogne qu’ils avaient contribué à porter au pouvoir. En se réjouissant de l’abaissement de la Nation russe, ils participèrent résolument au pillage. On saura un jour comment et pourquoi Vladimir Poutine est arrivé au pouvoir au seuil des années 2000, quelles forces ont voulu ce parachutage et pour quel objectif. Comme d’habitude, il est plus facile de raconter l’Histoire quand on connaît la fin, mais force de constater que dès le départ, le président russe qui récupérait un pays détruit avait pour projet de le rebâtir. Il semble avoir compté dans un premier temps sur la compréhension d’un monde occidental dans lequel il souhaitait insérer la Russie. Pour comprendre rapidement, confronté qu’il était aux rebuffades, que cela se ferait sans l’Occident et probablement, rapidement contre lui. Il y eut le fameux discours de Munich en 2007, où il expliqua avec clarté qu’il acceptait le défi qu’on lui lançait. On sait aujourd’hui que Vladimir Poutine est un stratège prudent et un tacticien virtuose. Il aurait mieux valu essayer de le comprendre, plutôt que de se vautrer dans une propagande imbécile à base de mépris, et de mensonges idiots. L’État restauré, l’économie en reconstruction, la confiance en soi rebâtie, le président russe fut contraint de constater que pour des raisons diverses, les États-Unis continuaient à traiter son pays en ennemi.
2014. Coup d’état du Maïdan : Deuxième défi accepté
Survint le coup d’État organisé par les Américains en Ukraine en 2014. Qui fut compris par Poutine très exactement pour ce qu’il était, une véritable déclaration de guerre avec l’installation à sa porte d’un régime russophobe à forte composante néonazie. Et que dire de la bêtise réjouie de ces dirigeants français armés de leur ignorance abyssale de la nature du traumatisme que portent les Russes pour l’Opération Barbarossa et le coût effroyable de la victoire remportée contre la bête nazie en 1945. On ne leur refera jamais un 22 juin 1941. Les occidentaux auraient bien fait d’écouter ce que disait le maréchal Bernard Montgomery lors d’une audition à la Chambre des Lords en 1962 : « La première règle, qui doit figurer à la première page de tout manuel de guerre c’est : ne jamais marcher sur Moscou ».
On connaît la suite. La guerre civile du Donbass, les massacres d’Odessa et d’ailleurs, l’annexion de la Crimée, les tricheries occidentales avec les accords de Minsk, la préparation pour le conflit que Vladimir Poutine savait inévitable, les propositions diplomatiques de la fin de l’année 2021, l’offensive ukrainienne contre les provinces russophones comme seule réponse, et enfin l’intervention du 24 février 2022 et le déclenchement de l’Opération Militaire Spéciale.
Compte tenu du résultat obtenu par les Russes et la défaite infligée à l’Occident collectif certain avancent que les Russes auraient réalisé un sans-faute. Une telle présentation présente trois défauts. Tout d’abord, personne en Occident ne savait ce qu’il y avait dans la tête des planificateurs russes, et on ne peut donc que spéculer a posteriori sur la réalité de leurs objectifs. Ensuite on connaît la référence au stratège prussien Helmut Von Moltke selon lequel aucun plan militaire ne résiste au premier contact avec l’ennemi. Enfin, description est spontanément contre intuitive pour des gens assommés depuis presque deux ans par une propagande imbécile et raciste présentant l’armée russe comme un ramassis de moujiks alcoolisés se lançant à l’assaut avec des pelles. Il ne s’agit pas bien sûr de prétendre que l’armée russe n’a pas subi de revers tactiques, mais de constater cependant qu’elle a très bien maîtrisé les circonstances auxquelles elle était confrontée et qu’elle a atteint les objectifs qui semblent avoir été les siens.
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