Gaza : l’introuvable cessez-le-feu ?

Publié le par FSC

Christophe Deroubaix
L'Humanité du 24 mars 2024

Le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, rencontre un enfant palestinien évacué de la bande de Gaza et soigné à l'hôpital général d'El-Arish, dans la province égyptienne du Nord-Sinaï, le 23 mars 2024. © Mark GARTEN / UNITED NATIONS / AFP

Alors que les pourparlers entre le Hamas et Tel-Aviv sur le contenu d’un accord semblent s’enliser, le Conseil de sécurité de l’ONU pourrait voter une résolution allant dans ce sens.
Le secrétaire général de l’ONU parle haut et fort mais l’institution qu’il dirige demeure paralysée. Après le rejet, vendredi, d’une résolution présentée par les États-Unis, Antonio Guterres s’est rendu, samedi, aux portes de Gaza où il a délivré un discours vigoureux, voire poignant.
Il a notamment appelé à l’instauration d’un cessez-le-feu humanitaire immédiat et à la libération de tous les otages. Il a également exhorté tous les États membres des Nations unies à soutenir le « travail de sauvetage mené par l’épine dorsale de toutes les opérations de secours à Gaza, l’UNRWA, l’agence de secours des Nations unies pour les réfugiés palestiniens ».


Si le verbe est puissant, il ressemble pour l’instant à un prêche dans le désert. Son appel à ce « qu’Israël s’engage fermement à assurer un accès total et sans entrave aux produits humanitaires dans tout Gaza » n’a reçu aucune réponse de Tel-Aviv, qui maintient un blocus total. Quant à sa volonté de faire taire les armes, elle se heurte toujours à des blocages entre grandes puissances. Toutes les résolutions présentées devant le Conseil de sécurité échouent sur des veto de membres permanents.

Les Etats-Unis pris à leur propre piège à l’ONU


Washington qui a usé, plus que tout autre, de cette arme a vu cette dernière utilisée vendredi contre son propre texte. Élaboré dans la précipitation, ce dernier visait à desserrer l’étau dans lequel l’administration Biden s’est placée. En apportant dès le 7 octobre un soutien inconditionnel au gouvernement israélien, le président américain est considéré par une frange importante de son électorat comme coresponsable du bilan de la guerre faite à Gaza (32 000 morts, selon le dernier bilan du ministère local de la Santé).
Alors que la campagne électorale débute réellement, les signaux d’alarme se multiplient : Donald Trump en tête dans les sondages et vote de défiance d’électeurs démocrates lors des primaires dans le Michigan et le Minnesota, deux États que le locataire de la Maison-Blanche ne doit pas perdre s’il veut voir son bail renouvelé.


L’inflexion du ton, constaté depuis quelques semaines, a donc été accompagnée d’une tentative d’acte avec la présentation d’une résolution. Celle-ci n’appelait pourtant pas à un cessez-le-feu immédiat mais évoquait « l’impératif d’un cessez-le-feu ». Elle mentionnait également « les opérations en cours et à venir à Gaza », soit un possible feu vert à une opération terrestre à Rafah à laquelle cette même administration Biden affirme s’opposer.


La Russie et la Chine y ont donc répondu par leur veto. Un autre projet de résolution, commencé par le Mozambique et soutenu par la Chine, « exigeant un cessez-le-feu humanitaire immédiat pour le mois du ramadan », pourrait être mis aux voix dès ce lundi. Si la diplomatie américaine y met son veto, cela démontrera que le changement de rhétorique ne constitue qu’un écran de fumée pour masquer une position intangible de défense de Benyamin Netanyahou.


C’est en dehors du cadre de l’ONU que des pourparlers se sont poursuivis durant le week-end afin de trouver un accord qui permettrait un cessez-le-feu. Dans une proposition transmise la semaine dernière aux médiateurs, le Hamas s’était dit prêt à une trêve de six semaines, avec des libérations d’otages en échange de prisonniers palestiniens.
Mais, samedi, le responsable du mouvement islamiste palestinien interrogé par l’AFP a fait part de « profondes divergences » et accusé Israël de vouloir « un cessez-le-feu temporaire, après quoi il pourra reprendre son agression contre notre peuple ». Tel-Aviv n’a pas commenté les négociations en cours.

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article