Dans la ville de Gaza, cible d’un récent raid israélien, le siège de l’UNRWA a subi de lourdes destructions

Publié le par FSC

Par Laure Stephan
Le Monde du 17 juillet 2024

 

       Une femme récupère des objets dans le complexe de bâtiments détruits de l’UNRWA, dans le quartier Al-Sinaa, à Gaza, le 12 juillet 2024, après le retrait des troupes israéliennes de la zone. OMAR AL-QATTAA / AFP

 

L’armée israélienne affirme avoir livré bataille contre des combattants du Hamas et du Jihad islamique, embusqués dans le complexe onusien. L’agence chargée des réfugiés palestiniens demande une enquête.

Plus de 40 millions de tonnes de débris de guerre gisent dans la bande de Gaza, selon les Nations unies. Les ruines qui s’amassent au sein du principal complexe de l’UNRWA dans l’enclave, en abritant le siège, en font désormais partie. Philippe Lazzarini, le chef de l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens dans le Proche-Orient, a dénoncé sur X, lundi 15 juillet, la destruction massive des bâtiments de l’organisation, transformés en « champ de bataille », et fustigé un « mépris flagrant pour le droit humanitaire international ».


Les bombardements menés sur ce territoire par l’Etat hébreu, depuis octobre 2023, à la suite de l’attaque sanglante du Hamas, ont redoublé d’intensité depuis le début du mois. L’armée israélienne a déclaré dans un communiqué, vendredi 12 juillet, qu’elle avait lancé, quelques jours plus tôt, une « opération de contre-terrorisme » dans le centre de la ville de Gaza, zone où se trouve le quartier général de l’UNRWA. Elle affirme que ses unités ont affronté des combattants du Hamas et du Jihad islamique, retranchés dans les bâtiments, et qu’elles y ont découvert d’importantes quantités d’armes et des ateliers d’assemblage.


L’UNRWA, de son côté, n’est pas en mesure de dire aujourd’hui si le Hamas ou d’autres groupes palestiniens ont profité du chaos pour s’installer dans ses locaux. L’organisation a quitté ceux-ci le 12 octobre 2023, après une nuit d’intenses bombardements aux alentours, et alors que l’armée israélienne avait donné l’ordre d’évacuer la ville, où vivaient plus de 700 000 personnes avant le conflit.


Le service vidéo du Monde a analysé des images fournies par l’armée israélienne et par un média local, ainsi que des images satellites : il conclut que les destructions massives dans le complexe de l’UNRWA ont eu lieu entre les 8 et 12 juillet. Les documents scrutés ne permettent pas, à eux seuls, de déterminer si des combats se sont déroulés dans ce laps de temps.


Selon Lex Takkenberg, conseiller de l’ONG jordanienne Arab Renaissance for Democracy and Development et ancien cadre de l’UNRWA, ayant été en poste à Gaza, les bâtiments abritant le centre de formation professionnel font partie de ceux qui ont été les plus détruits. Celui abritant le siège « paraît endommagé, mais toujours debout ». L’armée israélienne avait ordonné de nouvelles évacuations de la ville de Gaza, le 8 juillet, y compris du centre de formation où une dizaine de familles avaient trouvé refuge. Le même jour, selon l’UNRWA, douze personnes déplacées et trois gardes ont été blessés par une frappe aérienne ciblant la salle des gardes.

Immunité violée à de multiples reprises


Dans la bande de Gaza, l’immunité dont les installations de l’UNRWA sont censées bénéficier a été violée à de multiples reprises depuis le début du conflit, « par toutes les parties belligérantes », dénonce Juliette Touma, directrice de la communication de l’agence, qui appelle à une enquête.
La dévastation du complexe onusien, situé dans le quartier d’Al-Sinaa, fait partie des récits de désolation qui émergent de la ville de Gaza, depuis vendredi 12 juillet. C’est à cette date que l’armée israélienne s’est redéployée hors du centre et que les habitants ont pu s’aventurer hors de leurs abris, découvrant des rues jonchées de cadavres et jalonnées d’immeubles rasés ou incendiés. Selon l’Agence France-Presse, les combats ayant opposé les troupes israéliennes au Hamas ont été très intenses.


Lors d’une précédente incursion, début février, l’armée israélienne avait affirmé avoir découvert un tunnel du Hamas sous le siège de l’organisme. M. Lazzarini avait assuré que l’agence n’en avait pas connaissance et avait demandé une enquête. Le quartier général de l’UNRWA à Gaza est l’un des deux dont dispose l’organisation – l’autre est à Amman, en Jordanie. Son établissement dans l’enclave a fait suite aux accords d’Oslo, signés en 1993, entre Palestiniens et Israéliens.


L’UNRWA est la cible d’une campagne de déstabilisation israélienne sans précédent, depuis le début de la guerre. M. Takkenberg voit dans la destruction du QG de Gaza « un gage donné par [le premier ministre] Benyamin Nétanyahou à ses alliés d’extrême droite au gouvernement », qui veulent la liquidation de l’agence, symbole des réfugiés palestiniens. Le complexe sera-t-il reconstruit ? « Le futur de l’UNRWA à Gaza n’est pas isolé du futur des Palestiniens de l’enclave. Or, le “jour d’après” reste très opaque », dit-il.

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