GAZA : Le deux-poids-deux-mesures hypocrite et cynique de l'Union européenne
Pierre Barbancey
L'Humanité du 29 août 2024
Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, a explicitement visé ces deux ministres d’extrême droite. Il a demandé aux 27 ministres des Affaires étrangères d’agir contre les « messages de haine » que ceux-ci diffusent.
En fin de mandat, le chef de la diplomatie européenne tape (enfin) du poing sur la table. À l’occasion de la réunion informelle regroupant les ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne (UE), Josep Borrell a indiqué leur avoir demandé s’ils voulaient imposer des sanctions à certains ministres israéliens pour « messages de haine » contre les Palestiniens. Bien qu’il n’ait pas nommé les ministres en question, le simple fait de poser une telle question s’agissant de dirigeants politiques israéliens est déjà inhabituel. Inhabituel mais pas totalement étonnant.
Des déclarations terribles sur X
Depuis plusieurs semaines à présent, Josep Borrell multiplie les apostrophes, particulièrement sur son compte X. Le mercredi 28 août, il écrivait ainsi, en référence à l’opération militaire dans les camps de réfugiés de Jénine, Tulkarem et Toubas, ainsi que dans celui de Shuafat, à Jérusalem-Est : « La grande opération militaire israélienne en Cisjordanie occupée ne doit pas constituer le lieu d’une extension de la guerre depuis Gaza, qui inclut une destruction totale. Le parallèle établi par le ministre Katz, notamment sur l’évacuation des résidents palestiniens, menace d’alimenter davantage l’instabilité. »
Israël Katz, qui détient le portefeuille des Affaires étrangères dans le gouvernement de Benyamin Netanyahou, est en effet coutumier des déclarations les plus terribles. Sur X, il a ainsi appelé à agir en Cisjordanie « avec la même détermination (…) qu’à Gaza, avec des évacuations temporaires de Palestiniens ». Au mois d’août, 16 ordres d’évacuation ont été délivrés dans la bande de Gaza, entraînant le déplacement forcé de plus de 250 000 personnes, dont des centaines, voire des milliers le sont pour la troisième ou la quatrième fois en plus de dix mois de guerre.
Des sanctions possibles avec l’unanimité
Ces dernières semaines, Josep Borrell a publiquement critiqué le ministre israélien de la Sécurité, Itamar Ben-Gvir, et celui des Finances, Bezalel Smotrich, pour des déclarations qu’il a décrites comme « sinistres » et « une incitation aux crimes de guerre ». Les deux extrémistes se sont réparti les rôles.
Le premier multiplie les provocations sur l’esplanade des Mosquées, à Jérusalem, tentant de briser le statu quo en vigueur depuis l’occupation de 1967 et propose même d’y faire construire une synagogue. Le second approuve toutes les constructions de nouvelles colonies en Cisjordanie et légalise les avant-postes. Les deux ne cachent pas, comme la majorité de la Knesset (Parlement), leur refus de la création d’un État de Palestine.
Comme il l’a expliqué le 29 août, le responsable de la diplomatie européenne a lancé une « procédure » pour savoir s’il était opportun d’inclure ces dirigeants israéliens sur la liste des sanctions ! Or, le règlement européen indique que, pour imposer des sanctions, les 27 États membres doivent être unanimes. Autant dire que cela n’arrivera pas. Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Micheal Martin, a cependant fait savoir : « Nous soutiendrons la recommandation de Josep Borrell pour des sanctions à l’égard des organisations de colons en Cisjordanie qui facilitent l’expansion des colonies, et aussi aux ministres israéliens. »