Interventions au Conseil National du PCF en vue de la conférence nationale du 14 décembre
La prochaine Conférence nationale s’articule autour de trois questions qui risquent de limiter les débats à des aspects purement électoraux et organisationnels.
Pourtant, dans le contexte mondial actuel, il est crucial de dépasser ce cadre étroit. Nous devons adopter une analyse globale, tenant compte des racines internationales de la crise que nous traversons. Seule une compréhension d’ensemble, qui embrasse les dynamiques géopolitiques mondiales, peut éclairer correctement les défis auxquels nous faisons face en France.
La question internationale n’est pas secondaire. Nous vivons une période charnière, marquée par le déclin relatif de l’impérialisme occidental. Le manque d’alternative révolutionnaire est un frein, mais il n’empêche pas les mouvements de résistance de se structurer. L’impérialisme reste le moteur des dynamiques globales actuelles. Il faut considérer l’impérialisme comme une espèce, et le colonialisme comme un genre, à la fois dans ses formes historiques et contemporaines.
Aujourd’hui, nous assistons à une deuxième phase de décolonisation. Contrairement à la première vague du XXe siècle, celle-ci remet en question l’hégémonie américaine. Les BRIC, puis les BRICS, et désormais les BRICS+, incarnent cette volonté de rompre avec la domination unipolaire occidentale. Ces blocs défendent un multilatéralisme réaffirmé, basé sur des principes comme le respect de la Charte des Nations Unies et la dédollarisation des échanges commerciaux.
Ce processus est irréversible. Pour les classes dominantes des anciennes puissances coloniales, il s’agit d’une marginalisation. Pour les classes populaires, en France et ailleurs, c’est une opportunité historique. Cela ouvre la voie à une nouvelle ère de changement social et à la construction de relations internationales plus justes. Ce moment est une chance pour notre parti de redéfinir un projet politique en phase avec les réalités actuelles.
Cela m’amène à une critique de notre position actuelle sur les affaires internationales. Trop souvent, notre discours semble décalé de la situation mondiale, ce qui trouble les militants les plus engagés. Il est impératif de retrouver une grille de lecture globale, capable de fournir une analyse objective des événements internationaux. Cette réflexion doit reposer sur des bases philosophiques et idéologiques solides, pour contrer efficacement la propagande impérialiste.
Prenons la guerre en Ukraine et les événements du 7 octobre. Ces crises étaient tout sauf imprévisibles. Elles s’inscrivent dans des logiques géopolitiques profondes, souvent dissimulées par les récits médiatiques dominants. Ces conflits sont les conséquences de tensions accumulées, non des ruptures soudaines. Partout, l’impérialisme américain, soutenu par ses alliés, poursuit un agenda belliciste, qu’il s’agisse de maintenir sa domination en Europe ou de préparer l’affrontement avec la Chine.
Sur ces questions, la différence entre Kamala Harris et Donald Trump ne réside pas dans la volonté de guerre, mais dans la priorité donnée. Les deux camps partagent la même obsession : contenir la montée en puissance de la Chine, perçue comme la principale menace à l’hégémonie américaine.
Notre parti doit viser l’unité la plus large possible du mouvement anti-guerre et transformer cette mobilisation en un mouvement de masse. Les masses perçoivent les enjeux humains et financiers des conflits actuels. La compréhension correcte de ces questions est essentielle pour la construction d’un parti porteur des attentes populaires et capable de proposer une véritable alternative.
Nous devons revisiter notre analyse à la lumière de l’histoire. Contrairement aux récents courants populistes, les communistes inscrivaient leur action dans le temps long, avec des repères solides. Le matérialisme historique servait à comprendre le mouvement de l’histoire. En Occident, l’effondrement de l’Union soviétique a parfois poussé notre parti à abandonner ces outils au lieu de les adapter, nous laissant ballotés par les événements.
Hervé Poly – Pas-de-Calais
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Pour affronter réellement le combat de classe en cours ! Intervention de Fabienne Lefebvre (94)
Les membres du conseil national en lien avec le réseau Faire Vivre et Renforcer le PCF ont joué un rôle utile dans le débat du CN pour faire évoluer les prises de position du parti en phase avec nos décisions de congrès et réaffirmer clairement le choix des communistes contre la guerre, contre l’impérialisme, contre l’OTAN. L’intervention de Fabienne Lefebvre (94) en fait partie.
Face à l’offensive des forces du capital annonçant une nouvelle guerre mondiale menée par l’impérialisme états-uniens, et ses bras armés que sont l’OTAN et le dollar, il y a urgence à définir un cap ! D’autant que ce système de domination parasitaire est de plus en plus contesté et que de nombreux peuples se tournent vers les BRICS+. Cette disqualification le rend d’autant plus dangereux.
Pour poursuivre son hégémonie, il s’exonère même de pratiques dites démocratiques, dont il n’a plus besoin pour s’accumuler : il s’assoit en 2005 sur le référendum français relatif au traité de constitution pour l’Europe, rejeté à 54,68% et réimposé via le traité de Lisbonne.
Tout comme il s’assoit en 2015 sur le référendum grec, concernant la proposition de la Troïka sur la dette rejetée à 61,31%, et balayé par Juncker, alors Président de la commission européenne, car dixit : « Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens » ; citation devenue Théorème, reprise par Macron à la suite de la dissolution de l’Assemblée nationale et qui acte de fait, qu’il ne peut y avoir de choix démocratique contraire aux intérêts de la bourgeoisie, c’est à dire ceux de la classe dominante.
Prédation impérialiste, refus démocratique, montée du fascisme et choix de la guerre s’organisent donc implacablement contre la classe du travail qui produit les richesses.
L’Ukraine en est l’exemple depuis 2014, avec le coup d’état de Maïdan soutenu par l’occident, devenue depuis base de l’OTAN au cœur de l’Europe, pour l’intérêt exclusif du capital avec l’aide (excusez-moi du peu) des néonazis des bataillons Azov. Ukraine où le Parti Communiste et l’ensemble des forces progressistes sont interdites, tout comme le droit de grève.
Prédation impérialiste et choix de la guerre également en Palestine, au Liban, provocations en direction de l’Iran et grandes manœuvres en mer de Chine pour imposer par la force un système obsolète et dangereux.
Pour appréhender cette situation et afin de nous différencier du discours dominant y compris à gauche, nous avons donc besoin d’avoir une véritable analyse basée sur des contenus de classe.
Contenus qui doivent être clairement identifiables dans toutes nos campagnes (celles sur l’austérité, l’emploi, les services publics…) y compris et surtout dans nos combats pour la paix, en s’opposant notamment à toutes formes d’envois d’armes !
Nous devons également réfléchir à la manière de nous organiser contre l’essor du fascisme, en sachant qu’il est illusoire de croire que l’on puisse réaliser un Front populaire antifasciste sans établir au préalable, l’unité d’action des travailleurs.
Pour se faire, il parait nécessaire de poursuivre et d’approfondir la réorientation engagée par le "Manifeste" lors du 38e Congrès, en l’enrichissant des débats qui ont suivis (39e), notamment celui si nécessaire du socialisme comme système économique, politique et social abolissant l’exploitation capitaliste, ce dernier n’étant pas réformable.
L’objectif n’est pas la mise en œuvre d’un dogme, mais bien celui d’un guide pour l’action disait Lénine, dans la perspective d’une réelle prise du pouvoir, vocation in fine, d’un Parti communiste. Cela nécessite néanmoins deux conditions, au-delà de notre renforcement :
• Le respect des décisions de Congrès.
• Et un véritable travail d’organisation, pour que ces décisions soient réellement appliquées.
Au regard de la gravité de la situation, nous ne pouvons plus faire l’impasse de cette réappropriation idéologique et organisationnelle, c’est l’un des enjeux majeurs de la Conférence nationale, si nous voulons nous donner des bases solides, pour affronter réellement le combat de classe en cours !
Fabienne Lefebvre