« Le démantèlement permanent de la cause des réfugiés est une illusion », explique Adnan Abu Hasna, porte-parole de l'Unrwa

Publié le par FSC

Axel Nodinot
L'Humanité du 29 octobre 2024

 

L'Unrwa est présente dans tous les territoires palestiniens occupés par Israël, ici, à Hébron, en Cisjordanie. © Hazem Bader/AFP

 

Le droit au retour des réfugiés palestiniens est inaliénable, rappelle Adnan Abu Hasna, porte-parole de l’Unrwa. Il déplore toutefois une décision qui pourrait avoir de lourdes conséquences sur « la crédibilité des instances internationales ».


« Désolé, j’étais en direct à la télévision et j’ai un autre entretien dans quelques minutes… » Comme ses collègues, Adnan Abu Hasna n’a pas une minute à lui. Le porte-parole de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa) voit dans l’emballement médiatique un autre marqueur de l’indignité du vote de la Knesset.
Interdisant les activités de l’agence sur le sol israélien, cette décision pourrait avoir des conséquences sur la vie de dizaines de milliers de réfugiés palestiniens et bien au-delà.

Quelle est votre réaction à chaud après ce vote du Parlement israélien ?


Nous pensons qu’il est parfaitement injuste de décider d’interdire l’Unrwa de travailler dans les territoires palestiniens, c’est-à-dire à Jérusalem, en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.


Ce vote pourrait avoir des conséquences catastrophiques sur la vie des habitants, mais aussi sur tout le travail humanitaire mené par les différentes associations et organisations non gouvernementales. Si cette décision est mise en œuvre, elle se concrétisera par un effondrement total de Gaza, de la vie de sa population… C’est une exécution, une condamnation à mort.

Outre les conséquences désastreuses sur les travaux de l’agence dans les territoires palestiniens, comment une interdiction de poursuivre vos activités en Israël va-t-elle vous impacter ?


Notre siège et nos bureaux se situent à Jérusalem-Est, dans le quartier de Sheikh Jarrah (au nord de la ville – NDLR). C’est à partir de là que nous nous organisons et que nous fournissons de nombreux services à des dizaines de milliers de réfugiés, à l’intérieur et en dehors de la ville.
Nous y avons des écoles, des cliniques, où nous pouvons assurer santé et éducation auprès des réfugiés. Mais nous attendons désormais de voir de quelle manière et dans quels délais le gouvernement israélien mettra en application cette nouvelle loi, si cela va se concrétiser immédiatement sur le terrain ou après plusieurs semaines.

Justement, que signifie cette loi pour les nombreux réfugiés palestiniens, notamment pour le statut même de réfugié ?


Cela ne change absolument rien ! Toutes les décisions ayant trait au statut des réfugiés ont été prises avant celles qui ont précédé la création de l’Unrwa. C’est la résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations unies qui a affirmé le droit au retour des réfugiés, et elle a été adoptée le 11 décembre 1948.


Quant à l’Unrwa, elle a été créée le 27 décembre 1949, à la suite de la résolution 302 de cette même Assemblée générale des Nations unies, qui s’était réunie le 8 décembre 1949. Donc, même si l’Unrwa se retrouve un jour complètement anéantie, absolument rien ne changera quant au statut des réfugiés palestiniens. Le démantèlement permanent de la cause des réfugiés est une illusion.

Beaucoup de vos membres ont été tués à Gaza, et les dirigeants israéliens ont une attitude de plus en plus belliqueuse envers les Nations unies…


Oui, c’est complètement fou, c’est une attitude très dangereuse. Ils ont aussi déclaré Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, persona non grata sur leur sol. Ils ont également ciblé notre commissaire général, Philippe Lazzarini. Ils ont arrêté plusieurs de nos agents, nous ont accusés de nombreuses choses…
Israël souhaite que l’Unrwa ferme ses portes. C’est le signe d’un État qui n’est pas en harmonie avec le droit international, le droit humanitaire et les valeurs humaines. Cette défiance vis-à-vis des Nations unies est vraiment quelque chose qui nous surprend et qui nous choque, à vrai dire.

Selon vous, quels sont les moyens pour arrêter cette folie meurtrière dans la région ?


Toutes les nations du monde doivent s’unir et parler d’une même voix pour condamner les actes d’Israël. Trop, c’est trop. Nous avons les Nations unies, nous avons des textes internationaux, nous avons le multilatéralisme hérité de la Seconde Guerre mondiale.
Tout cela doit nous fournir un cadre pour arrêter ce qui est en train de se profiler et qui pourrait avoir des conséquences dangereuses et sans précédent sur la crédibilité des instances internationales. Les États membres des Nations unies doivent absolument s’impliquer.

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