Violences antisémites et racistes à Amsterdam : les faits derrière l’emballement

Publié le par FSC

Eh il semble sans doute encouragés par la protection  (Macron, Retailleau, Hollande, Sarkosy ...)et l'impunité dont ils bénéficient, les supporters de l'équipe d'Israël dont on peut se demander ce qu'elle vient faire dans un championnat européen se sont livrés à des exactions contre des supporters français !

 

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Gwenaelle Lenoir
Médiapart du 14 novembre 2024

 

       Des supporters du Maccabi Tel-Aviv à Amsterdam (Pays-Bas), jeudi 7 novembre. © Photo Jeroen Jumelet / ANP / AFP

 

Les incidents en marge d’une rencontre européenne de football, le 7 novembre, ont donné lieu à des émotions considérables et des instrumentalisations politiques et médiatiques. Retour sur ces événements, alors qu’un match France-Israël a lieu jeudi à Saint-Denis.

Les vidéos sont tombées sur les réseaux sociaux par dizaines, ont tourné et tournent encore en boucle. Certaines ont donné lieu à des interprétations radicalement différentes, voire opposées, d’autres ont été mal décryptées, volontairement ou non ; toutes ont soulevé émotion, indignation, colère.


Les événements d’Amsterdam (Pays-Bas) en marge du match de Ligue Europa Ajax Amsterdam-Maccabi Tel-Aviv de jeudi 7 novembre ont suscité une foule de réactions. Immédiatement après la rencontre et les violences qui l’ont suivie, le gouvernement israélien, les dirigeants et la plupart des médias occidentaux ont parlé d’antisémitisme et ont condamné avec virulence.


D’autres voix, plus éparses, ont dénoncé des manipulations et nié que ces violences soient une démonstration de haine des juifs, assurant qu’il s’agissait de heurts entre hooligans, israéliens d’un côté, néerlandais de l’autre.


Avant le match France-Israël prévu jeudi 14 novembre au Stade de France, Mediapart décrypte cet épisode dans un contexte où le traitement médiatique est également en cause, et particulièrement scruté, comme en témoigne un reportage diffusé, puis retiré pour modifications, de la chaîne britannique Sky News.

Un climat de tension raconté par les habitants


La semaine passée, des milliers de supporters du club de football israélien Maccabi Tel-Aviv sont arrivés dans leur majorité l’avant-veille et la veille du match, qui a eu lieu dans la soirée du 7 novembre (2 600 « visiteurs israéliens juifs » précisément, ont indiqué les autorités néerlandaises).


Comme l’ont également rappelé Le Monde et Libération, des violences sont signalées dès le mercredi après-midi et puis dans la soirée. Elles sont le fait de supporters israéliens qui, en groupes, attaquent au moins un chauffeur de taxi et vandalisent son véhicule, parcourent le centre-ville en chantant des slogans racistes, jettent de la bière et agressent des passants aux alentours de la place Dam, au cœur de la ville, détruisent des drapeaux palestiniens.
On voit aussi, sur une vidéo tournée, en plein jour, un homme hissé par deux autres jusqu’au premier étage d’un immeuble s’échiner à en arracher un, sous les encouragements de ses compagnons.


Le chef de la police, Peter Holla, a confirmé lors d’une conférence de presse vendredi 8 novembre la responsabilité des fans du Maccabi Tel-Aviv dans ce premier épisode de violences.
Selon plusieurs récits, les actions des supporters sèment la peur parmi une partie de la population, notamment les résident·es racisé·es et les habitant·es qui soutiennent la cause palestinienne. « Je ne suis pas allé dans le centre-ville pendant tous ces jours. Je suis égypto-néerlandais et j’ai une apparence arabe, je risquais d’être pris à partie par la police, très nerveuse, ou attaqué à coups de bouteilles par ces hooligans du Maccabi qui circulaient en groupes », raconte à Mediapart Mounir Samuel, politologue, journaliste et écrivain.


D’après son récit, « dès le mardi soir, les réseaux sociaux faisaient état d’agressions, de chants haineux et les gens étaient prévenus par les boucles WhatsApp de ne pas marcher seuls dans les rues car c’était trop dangereux. Ils risquaient d’être encerclés par ces groupes du Maccabi à l'improviste et attaqués, ou d’avoir leur keffieh arraché ». Mounir Samuel raconte aussi que sur les réseaux sociaux, l’attaque d’un chauffeur de taxi et l’arrachage d’au moins un drapeau palestinien circulent très vite le mercredi soir.


« Je me suis réveillé jeudi matin avec, sur mon téléphone, toutes ces vidéos des hooligans de Maccabi qui s’étaient comportés horriblement dans la ville, hurlant des chants célébrant le génocide à Gaza, avec des paroles comme “il n’y a plus d’écoles à Gaza parce qu’il n’y a plus d’enfants à Gaza”, arrachant des drapeaux palestiniens, tout ça dans un moment de très forte tension à cause du Proche-Orient et dans une ville où il y a beaucoup de signes évidents de solidarité avec les Palestiniens, explique à Mediapart Jelle Zijlstra, directeur de théâtre et membre de la communauté juive d’Amsterdam. Là, je me suis dit : mais comment a-t-on pu autoriser des milliers de supporters israéliens de football violents à fondre comme ça sur le centre-ville ? »


Le jeudi, jour de match, la tension est très forte. Mounir Samuel, auteur d’un livre, à paraître sous peu, sur les discriminations dans la société néerlandaise, participe à un atelier avec des acteurs de la justice. Il fait part de ses craintes : « Je leur ai dit : “La ville va exploser, les gens sont à fleur de peau, ils ont peur. Si aucune mesure n’est prise pour les protéger, ils vont le faire eux-mêmes”, se souvient-il. Ils n’avaient pas pris la mesure de ce qui se passait, parce que les grands médias n’en avaient pas parlé. »
Les forces de sécurité se focalisent sur les propalestiniens. Un rassemblement qui devait se tenir à proximité du stade est interdit.

Du hooliganisme et du racisme anti-arabe


Certains supporters du Maccabi, eux, continuent de se comporter comme des hooligans classiques, racisme anti-arabe et soutien à la guerre contre les Palestiniens en plus. Ils sont filmés place Dam, en plein jour, entonnant un de leurs chants habituellement destiné au club de football israélien rival du Hapoel Tel-Aviv, dans lequel il est question de pendre des communistes, violer des femmes, et boire le sang des ennemis.
Plus tard dans la soirée, on les voit s’engouffrer dans le métro pour se rendre au match. Sur les escalators, à pleins poumons, ils chantent : « Laissez Tsahal [l’armée israélienne – ndlr] gagner, nous allons enc… les Arabes. »


Dans le stade, au début du match, une minute de silence est respectée en l’honneur des victimes espagnoles des inondations de Valence. Sauf par une partie des supporters du Maccabi qui, dans leur coin de tribune, sifflent et agitent des couvertures de survie dorées – le jaune étant la couleur du club de football de Tel-Aviv. L’Espagne a reconnu l’État de Palestine, ce qui met en rage les ultranationalistes israéliens.
Sur le terrain, l’Ajax Amsterdam l’emporte largement face au Maccabi Tel-Aviv, par cinq buts à zéro.
Après le match, les récits sont parcellaires, ce qui est habituel dans les moments de forte tension et de violences de rue. Il est difficile de reconstituer précisément le fil des événements.


Une longue vidéo – 17 minutes – tournée par Bender, un jeune homme populaire chez les fans de l’Ajax Amsterdam et postée sur sa chaîne YouTube, offre un suivi assez complet d’une partie de la soirée dans un secteur du centre-ville. Bender suit des groupes de supporters du Maccabi Tel-Aviv et commente chaque action.
Il les filme chargeant des passants devant la gare centrale, volant des tubes métalliques sur des échafaudages, se mettant à poursuivre des gens et jetant des tubes sur un car de police. Plus tard, ils ramasseront des planches de bois.


Bender souligne le petit nombre de policiers présents : seulement deux véhicules. Des taxis suivent les fans du Maccabi et klaxonnent. En colère et mécontents, explique le jeune reporter, des actes des hooligans qui s’en sont pris à un de leurs collègues. L’instant d’après, Bender, essoufflé, raconte qu’ils ont exigé qu’il arrête de filmer.
Cette vidéo montre le comportement de hooligans d’une partie des supporters israéliens.

Des supporters du Maccabi agressés et des actes antisémites


D’autres images décrivent d’autres histoires, très différentes, qui se sont pourtant déroulées la même nuit, dans la même ville. Les personnes malmenées sur ces vidéos, filmées par leurs agresseurs, sont isolées.


Sur l’une d’elles, un fan du club israélien, reconnaissable à sa veste jaune, est assis par terre, serré de près par des hommes qui lui assènent des coups de pied. L’un d’eux lui lance : « Ça, c’est pour les enfants [de Gaza – ndlr], tu veux tuer des enfants, espèce d’enfoiré ? » Il répond « prends mon argent, prends mon argent », s’entend exiger « dis Free Palestine ! » – ce qu’il finit par faire. Et comme un autre, il est jeté dans un canal.
D’autres vidéos témoignent d’actes clairement antisémites. On entend sur l’une un homme parler de « chasse aux juifs ». Sur une autre, un jeune, frappé violemment, s’exclame, terrorisé : « Je ne suis pas juif, je ne suis pas juif. »


« Je me suis réveillé le vendredi matin avec ma messagerie saturée de messages d’amis juifs des Pays-Bas, d’Israël et des États-Unis me demandant si j’allais bien !, reprend Jelle Zijlstra. Et j’ai vu sur les réseaux sociaux ces images terribles, ces images de personnes battues dans les rues, de juifs battus dans les rues, qui peuvent évoquer bien sûr des émotions très fortes chez les juifs qui vivent ici et dont beaucoup d'ancêtres ont traversé les attaques contre leur peuple et bien sûr l’Holocauste. Une de mes amies l’a très bien décrit. Elle a dit : “Lorsque j’ai vu les vidéos, c'était comme si une chorale ancestrale avait commencé à chanter dans mon corps, me disant que j’étais en danger.” »
La maire écologiste d’Amsterdam a évoqué mardi un « cocktail toxique d’antisémitisme et de hooliganisme ». Femke Halsema a ajouté que « des injustices ont été commises à l’égard des juifs de [leur] ville ainsi que des personnes appartenant à des minorités qui sympathisent avec les Palestiniens ».
« Les supporters juifs israéliens étaient des invités dans notre ville et ils ont été traqués, chassés et attaqués par des appels antisémites sur les réseaux sociaux et dans les rues », a déclaré la bourgmestre. « Mais les Amstellodamois ont également été attaqués par des hooligans du Maccabi qui ont scandé des slogans racistes et haineux dans notre ville », a-t-elle indiqué.
Femke Halsema a précisé que les institutions juives de la ville, y compris les synagogues, n’avaient pas été visées et que les attaques étaient « purement destinées aux supporters israéliens du Maccabi ».
La police d’Amsterdam a déclaré que les agresseurs avaient été mobilisés par des appels lancés sur les réseaux sociaux pour s’en prendre aux juifs. « Nous devons prendre des mesures urgentes pour faire en sorte que notre communauté juive se sente en sécurité dans ce pays », a déclaré mardi le premier ministre, Dick Schoof, après avoir rencontré des membres de la communauté juive dans sa résidence officielle de La Haye.


Le chef du gouvernement, à la tête d’une coalition de partis de droite et d’extrême droite, a de nouveau appelé à des arrestations rapides dans cette affaire, ajoutant qu’il y avait un « problème d’intégration aux Pays-Bas » et que son équipe présenterait vendredi des plans plus concrets pour lutter contre l’antisémitisme.

Récupération
Ce foisonnement de séquences très différentes rend compte de la complexité des événements, un mélange de hooliganisme, de violences commises par des ultranationalistes israéliens, de représailles menées par des défenseurs de la cause palestinienne et d’actes antisémites.
Cette complexité a été niée par une grande partie des classes politiques occidentales, dirigeant·es en tête, et par la majorité des médias, y compris en France.


À la suite du premier ministre israélien, les communiqués officiels n’évoquant que l’antisémitisme et rapprochant les événements d’Amsterdam de la mémoire de la Shoah se sont multipliés. Benyamin Nétanyahou est allé jusqu’à les comparer à la Nuit de cristal, les pogroms qui se sont déroulés en Allemagne, en Autriche et dans la région des Sudètes, dans la nuit du 9 au 10 novembre 1938, et qui est commémorée chaque année dans la grande synagogue d’Amsterdam.
Personne, aux Pays-Bas, n’a oublié que 75 % des juifs du pays ont péri lors de l’Holocauste. Le gouvernement israélien a annoncé aussi l’envoi immédiat de deux avions, montrant ainsi à son opinion publique à la fois sa préoccupation et l’urgence du sauvetage.


Emmanuel Macron a assumé l’assimilation entre attaques contre des Israéliens et antisémitisme : « Les violences contre des citoyens israéliens à Amsterdam rappellent les heures les plus indignes de l’Histoire. Je les condamne fermement et j’adresse mon soutien aux blessés. La France continuera de lutter contre l’odieux antisémitisme sans relâche », a-t-il écrit sur le réseau social X.
Joe Biden n’a pas été en reste, assurant : « Les attaques antisémites contre des supporters de football israéliens à Amsterdam sont méprisables et font écho à des moments sombres de l’Histoire où les juifs ont été persécutés. » Le Canadien Justin Trudeau, la ministre allemande des affaires étrangères, celui de Grande-Bretagne, et bien d’autres ont réagi de la même façon.


Même unanimité dans les médias, avec des erreurs grossières. Plusieurs d’entre eux, dont la BBC, mais aussi BFMTV, ont parlé d’agression contre un supporter du Maccabi sur une vidéo d’un groupe d’hommes armés d’objets contondants poursuivant et tabassant un passant. Seulement, l’auteure de ces images, la photographe néerlandaise Annet de Graaf, a envoyé un rectificatif : il s’agit précisément du contraire. Les agresseurs sont des fans israéliens et la victime un piéton néerlandais. À ce jour, seul le journal télévisé allemand Tagesschau a présenté des excuses.
De rares voix publiques se sont élevées pour rappeler que les fans du Maccabi Tel-Aviv ont eu des comportements à la fois violents et provocateurs.


Ofer Cassif, député du parti de gauche judéo-arabe Hadash au Parlement israélien, s’est ainsi exclamé sur X : « L’esprit du fascisme israélien a atteint Amsterdam : les supporters se déchaînent violemment, frappant, déchirant les drapeaux palestiniens dans les rues comme s’ils étaient une force d'occupation et criant des slogans nazis en faveur de l'extermination d’une nation, et se lamentant lorsque la situation dégénère en un chaos complet et la violence leur revient comme un boomerang. Toute violence est obscène et inacceptable. Les deux camps devraient être tenus responsables de leur hooliganisme. » Hasard ou non, il a été, le 13 novembre, interdit d’activité parlementaire pour six mois.
De son côté, le directeur de théâtre amstellodamois Jelle Zijlstra dément toute action concertée et généralisée : « Dire qu’il s’agit d’une explosion aléatoire d’antisémitisme visant des personnes juives au hasard dans la rue simplement parce qu’elles sont juives ne rend pas justice à l’ensemble du tableau. »


Avant de rajouter : « Et puis, en tant que personnes vivant à Amsterdam, sommes-nous supposés accepter le fait que des centaines d’Israéliens traversent nos rues et chantent d’horribles chansons anti-arabes, racistes et antipalestiniennes ? Je ne veux pas justifier la violence, mais je trouve vraiment incroyable la façon dont ces hooligans ont été présentés comme des victimes innocentes dans toute cette affaire. »
Arrivés à l’aéroport de Tel-Aviv, en lieu sûr, les supporters du Maccabi ont entonné à nouveau à tue-tête leur chant, celui qui dit notamment « Laissez Tsahal gagner, nous allons enc… les Arabes. » À Amsterdam, plusieurs procédures judiciaires sont en cours. Elles devront aussi permettre de démêler les faits, précisément.

 

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P
Si Israël n' avait pas été abusivement admise au sein de l' Uefa, elle ne participerait pas à la coupe des nations européennes et le match n' aurait pas eu lieu ainsi que les incidents. A l' origine et en raison de sa position géographique Israël faisait partie des fédérations asiatiques sportives qui l' ont exclu du fait de sa politique colonisatrice. La Russie, elle, est exclue des compétitions en raison de l' invasion de l' Ukraine, visiblement pour l' Uefa, le génocide des palestiniens ne mérite pas qu Israël subisse le même sort que la Russie.<br /> En boycottant massivement ce match les français ont exprime' à leur manière leur soutien au peuple palestinien, bravo à eux et honte à Macron, Hollande, Sarkozy qui par leur scandaleuse présence ont légitimise ce génocide
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