120ème jour de grève à Marseille : LA DIRECTION DE LA POSTE TIMBREE PAR LA CONCURRENCE LIBRE ET NON FAUSSEE !!!!

Publié le par FSC

 

LA DIRECTION DE LA POSTE TIMBREE PAR LA CONCURRENCE LIBRE ET NON FAUSSEE !!!!

                   120éme jour de grève à Marseille !

 

Le Front Syndical de Classe a rencontré des facteurs grévistes dans une situation de lutte assez incroyable, mais bien réelle. Dans le 2ème arrondissement de Marseille, les facteurs ont déclenché une grève locale pour défendre deux d’entre eux en CDD.  Par la suite, cette grève s’est mutée petit à petit en combat de niveau national face au mutisme de leur direction.

 

Depuis le 07 octobre les postiers de cet arrondissement se sont arrêtés de travailler suite à la non prolongation de CDD de 2 jeunes, l'une qui travaillait depuis 7 mois et qui donnait toute satisfaction avec déjà de la famille dans ce service et l'autre, une étudiante, qui a travaillé tout l'été jusqu'à cette date, et a repris ses études avec raison. Objectifs de la direction supprimer ces 2 emplois et prendre  un intérimaire. Les agents de ce secteur furent scandalisés. Ils ont toujours refusé l’intérim chez eux. Ce 7 octobre, après des négochantages, il fut accepté l’embauche de l'intérim à condition que les 2 jeunes soient reprises.

Aigri et certainement rappelé à l’ordre par la hiérarchie, le 8 octobre à 6h30, prise de service, un intérim (Adecco), avec qui la poste est en contrat se présente bien sûr, et là, surprise! Au moment de partir en tournée, vers 8h30-9h, le chef d'établissement indique aux deux jeunes réintégrées qu'elles n'ont rien à faire là.

Le prétexte,  elles n’ont pas de contrat ! Souvent l'habitude vaut que  les contrats soient parfois faits plusieurs jours après. Le chef d'établissement a réussi à faire pleurer l’une d’entre elle et pour cause ?

Un huissier était là, comme par hasard, pour constater «vol et détournement de matériel de la poste». Quelques jours plus tard, les 2 jeunes sont convoquées au commissariat, suite à la plainte de la poste.

Face à cet acte injuste, l’ensemble du personnel état présent, toute la matinée avec banderoles, pour les soutenir. Voyant la supercherie et le rapport de force, la police déboute la plainte et laisse libre les 2 employées.

Les postiers de ce secteur sont dans le" collimateur "de la direction revancharde. Il faut savoir qu’ils sont le seul bureau de tout Marseille à ne travailler qu'un samedi sur deux, à être aux 32 h, à avoir une petite indemnité (dite" de panier") de 1,50 euro par jour, acquis après de nombreuses  luttes locales : 3 mois en 92, 4 mois en 95….

Sur le fond, leur lutte a pour objectif la défense du secteur public de distribution, préserver l’emploi à statuts… Dans certains arr. de Marseille, comme le 15è ou le 16è, il y a près de 50 à 60% d'intérimaires. Ces  arr. sont en majorité des quartiers défavorisés, à l’inverse dans les beaux quartiers, le 8è par exemple (Neuilly parisien), il n'y a que des professionnels avec des facteurs « fonctionnaires » qui ont prêtés serment devant Mr le juge, sur la confidentialité, l'éthique, etc.

Historiquement, un postier déclare : « …quand je suis rentré à la poste en 1982 il n'y avait que des fonctionnaires, puis sont arrivés les CDI, puis les CDD, maintenant, depuis quelques années arrivent les intérimaires, (comme "variable d'ajustement"), à quand les serfs et les esclaves ? »

Pour contrer la lutte et les revendications, la direction de la poste a embauché une soixantaine d'intérimaires. Une équipe trie, l'autre distribue 2 à 3 fois par semaine, pour "continuité de service » ; pas très légal en terme de déontologie. Le constat est là : beaucoup d'erreurs de distribution (erreurs de rue, de numéro, etc.), sur une tournée il a été trouvé un sac poubelle derrière une porte avec près de 200 lettres à l'intérieur ! « Quand on veut abattre son chien on lui trouve toutes les maladies du monde ! »

 

L’avenir qui est réservé au service public de proximité de la poste : des intérims hors statuts, payés maximum au smic, corvéables à merci, sans protection statutaire et jetables du jour au lendemain. Tous les ingrédients sont réunis pour casser la motivation et le professionnalisme.

Ceci n’est pas risible, mais ne vous étonnez pas si le courrier vous revient avec la mention «  boite introuvable  ou adresse illisible ».  Certains citent l’exemple d’un distributeur qui ne savait pas lire, il venait avec ses enfants pour l'aider à trouver les noms sur les boites!

Notre lutte est en prise directe avec la défense du service public et à l’encontre des directives européennes de casse de système de la distribution du courrier et des suppressions des bureaux de proximités. A noter, dès les premiers jours « de négociations » avec la direction, un huissier a toujours été présent.

Réponse de la direction à nos revendications : un NON franc et massif.

Un soutient important de toute part nous est apporté. Plusieurs personnalités politiques sont venues nous rencontrer, la maire du 2 et 3ème, le président du conseil régional Michel Vauzelle, du conseil  général, Guerini, Benoit Hamon porte-parole du PS, Marie-George Buffet, Olivier Besancenot, sont aussi venus. Ils nous ont demandé comment nous faisions pour réussir une grève à 100%, cadres compris. La logique,  90% de syndiqués CGT, une volonté de lutte de classes et du tous ensemble, tout ceci explique certainement cela !

Les autres bureaux de Marseille ne sont-ils pas concernés ? Beaucoup moins, pour ne pas dire du tout. Explications, au cours de notre action nous sommes allés les voir. Or,  la notion de la défense du service public et de l’emploi à statuts passe après celle de la promotion. Comme dans beaucoup d’autres entreprises, l’individualisme catégoriel prime sur l’action de masse. Dans ces  bureaux marseillais, il faut savoir qu’ils sont tous déjà passés à «FACTEUR D'AVENIR », nom bien mal choisi. Ils ont perdu la notion de ce qu’est un facteur, un quartier. Le tout est remplacé par un travail en équipe de 6,7 ou 8 facteurs, où il faut se remplacer en cas d'absence, de maladie, de vacances, etc., avec plusieurs postes disparus lors de la réorganisation. En échange de quelques promotions et petites augmentations. Puis ils se sont retrouvés divisés, avec un climat de jalousie naissant suivi d’une grosse pression au niveau du boulot. Nous l’avons constaté, ces collègues avaient à  peine le temps de s'arrêter pour nous écouter. Course au rendement, à la productivité oblige pour être mieux noté. Jusqu’à quand les jambes et bras vieillissants et surchargés tiendront-ils : 62, 65 ou 70ans ??

Le piège, une fois que" facteur d'avenir » est instauré, un an après, parfois moins, voilà qu'arrive « facteur d'avenir 2, puis 3 » et, bientôt le système OTS, (Organisation du Travail en Sécabilité). Cet autre vocable, à la même méthode de suppression de poste, de pression supplémentaire, système pernicieux avec une surveillance entre collègues à des fins de rendement pour atteindre les objectifs et « la prime »….. comme dit le proverbe  : « Comment scier la branche sur laquelle on est assis ».

Dans le bureau du 2ème  fort de la lutte, nous avons refusé la promo « facteur d'avenir » depuis le début, sachant ou cela risquait de nous mener et, qui plus est, ceux qui l’ont acceptée, nous disent leur difficulté, leur erreur et leurs regrets.

Des actions multiples. Après avoir visité tous les bureaux de Marseille, le tunnel du Prado carénage (payant à 2,60 €), envahi et laissé gratis durant une heure et demie, une "course des facteurs sans avenir » de la Joliette à Château Gombert (14 km), avec Christophe Vissant, le « coureur de l'extrême » cadre à la poste, ce qui a bloqué tout Marseille. L’espace d'une matinée, manif devant la tour FR3 pour pousser les médias à s'occuper un peu de cette action. Il est vrai qu’avec  la réforme des retraites, les médias avaient peut-être d'autres chats à fouetter, mais quand même. Au 100ème jour, un vendredi, manif à notre dame de la Garde, la banderole verticale a été arrachée par le sacristain, le tout enfin filmé par la télé ! Désormais les médias sont présents et couvrent cette lutte. 

 

 

Financièrement, comment tenir dans ce genre de lutte aussi longue ? Un  fonctionnaire facteur ne touche que 425 euros par mois dans ce cas, à peu près autant pour les CDD ? Nous sommes là en présence de déclaration contradictoire quand le secrétaire général de la CGT dit : «  …pas de grèves reconductibles, celles-ci coûtent trop chères aux travailleurs… » ?

Ce mouvement se poursuit, dit un facteur, grâce à une belle solidarité de la population, du syndicat, du parti communiste, des unions locales, (qui sont en voie de disparition), de collectes dans les manifs. De nombreux particuliers participent spontanément. Nous avons vendu nos calendriers du facteur dans la rue ! La direction jouait sur cette période sachant que les facteurs des autres bureaux ne nous suivraient pas à ce moment. Elle pensait également que nous reprendrions pour l’argent que cela peut rapporter, erreur.

L’évidence est quand même là, cela ne suffit pas pour faire chauffer normalement la gamelle. Heureusement que le Secours Populaire Français, la Confédération Française des Familles livrent de temps en temps des colis alimentaires, des initiatives qui font chaud au cœur et au porte-monnaie ! D’autres, comme le théâtre de Lenche  a versé l'intégralité de sa recette d'un soir, le bar- Jac, place de Lenche, également avec les lotos, le cirque Médrano a invité les grévistes gratuitement. Un comité des usagers du 2ème arr. s'est créé.  Il a manifesté devant la direction, mais personne n’a daigné les recevoir.

Au centième jour la direction de la poste a enfin délégué quelqu'un  pour dialoguer avec les grévistes !

Grossière tactique : en guise de négociations, la direction voulait imposer ses propres exigences en jouant sur l’épuisement du mouvement pour nous imposer « le facteur d'avenir » est accepter, difficilement les 47 revendications des grévistes dont les principales sont :

 -remplacement des 2 emplois vacants,

-paiement du reliquat des jours de congés,

- remplacement des départs à la retraite,

- maintien du trafic dans le centre, notre bureau est en plein Euro-méditerranée et ce sont les autres bureaux qui le desservent,

- restitution du jour de pentecôte,

 - réembauche d’une des 2 jeunes,

- attribution de points promotionnels pour certains,

-……

Le combat continue, contre la précarité et le statut de l'intérim, dont sa non-cotisation pour les retraites. Une  manifestation devant la direction Adecco avec le comité des usagers a été faite pour que s’ouvrent des négociations à ce sujet. Pour nous aider et faire pression sur ces négociations, des sites de soutien sont en place. Le Président du conseil général va faire une intervention auprès de l’assemblée nationale, du ministre de l'économie, ainsi qu’auprès de  Bailly, le président de la Poste. Une question orale sera aussi posée à ce sujet au Maire de la ville  de Marseille lors du conseil municipal du 7 février par  le conseiller municipal communiste Pellicani.

 Un appel à signature est fait en ligne sur www.bayopostemarseilledeux.org  ou sur www.millebabords.org. Soutien financier et signature de pétitions auprès de "post café" ou de la  CGT Marseille.

 

Pour le Front Syndical de Classe, cette action locale qui dure démontre la volonté de s’opposer à la casse d’un service public de proximité et à sa privatisation ce, malgré des pressions de tout part et le refus du dialogue. Cette lutte des facteurs est de fait en opposition totale au syndicalisme d’accompagnement habillé de partenariat social.

Ce combat exemplaire montre à quel point les consciences s’éveillent et l’aiguisement de la lutte de classes prévaut sur les prétentions européennes. Malheureusement les dirigeants de la poste, aux méthodes managériales indigestes, s’acharnent pour dépecer l’entreprise publique de ses missions, afin de satisfaire les directives libérales européennes votées à Bruxelles, Lisbonne et Barcelone.

Seuls objectifs en vue pour ces nouveaux manageurs hors statuts : augmenter les gains de productivité, en s'appuyant sur des emplois non statutaires, jetables et corvéables à merci.

Et les usagers et administrés locaux dans tout cela ? Ils sont imposables mais pas écoutés !

L’Europe, l’œil du cyclone, avec louverture à la concurrence libre et non faussée, qui est inscrite dans la constitution, repoussée majoritairement lors du référendum de 2005 en France et détournée par Sarkozy, fait que l’Etat est responsable de ce conflit suite à son désengagement. Résultats : dégradation des services rendus aux usagers, des conditions de travail, baisse des rémunérations et des emplois à statuts, sans compter la chasse au faciès.

Médicalement, la situation est inquiétante, depuis la mise en place de « facteur d'avenir » une augmentation de 38 à 40% des TMS (troubles musculosquelettiques) a été constatée. Les médecins du travail sont à même d’en apporter  la preuve. Par ailleurs, ils ont déjà, dans un rapport, tiraient  le « signal d’alarme », quant à l’augmentation des troubles physiques et psychiques des facteurs. Quant aux  médecins de familles, ils  sont inquiets  de voir défiler à ce point dans leurs cabinets  des employés de la poste exténués. 

Cela se traduira inexorablement, comme celle déjà connue dans de nombreuses entreprises, à l’exemple de Télécom, IBM et autres, par une souffrance et un harcèlement moral au travail au risque de se terminer dans certains cas par le suicide ou des prises inconsidérées d’antidépresseurs.

 

                                                                                                                                                             MARSEILLE LE : 6 février 2011

Publié dans Luttes - actualités

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