La Santé malade de la peste libérale…

Publié le par FSC

 

 

A l’hôpital Cochin, 50 000 jours dus au personnel.

La Santé malade de la peste libérale…

 

La loi Bachelot en 2007 (loi HPST) mise en place sans résistance significative a engendré une déréglementation des horaires, un sous-effectif chronique, des budgets en baisse constante, etc., entraînant de graves problèmes psychosociaux.

Par exemple à l’hôpital Cochin (AP-HP) où le manque de personnel atteint 30% des effectifs, une Aide Soignante de réanimation travaillant en 12h/jour génère des repos récupérateurs (RR) sensés compenser les longs temps de travail. Or ces repos lui sont refusés quasi systématiquement sous prétexte de sous-effectif. Inutile de dire que les 35h à l’hôpital sont largement dépassés ! Ainsi, Cochin se retrouve avec près de 50 000 jours dus au personnel, ce qui correspond au minimum à 250 emplois manquants.

Dans les hôpitaux publics l’impossibilité pour les agents de prendre leurs repos entraîne une accumulation de fatigue, un stress avec la crainte d’erreurs professionnelles, des dépressions, voire des suicides.

Les organisations de travail sont désormais basées sur la polyvalence et non plus sur les corps de métiers, ceci bien sûr pour pallier aux sous-effectifs et satisfaire une logique de rentabilité à tout prix : l’humanité n’est plus depuis longtemps le souci principal des gestionnaires et décideurs de l’AP-HP…

Au nom de la rentabilité, il a par exemple été décidé par l’Agence Régionale de Santé que tous les blocs opératoires fonctionneront 24h/24 à partir du 1er janvier à Cochin. Auparavant, seules étaient assurés les urgences et les accouchements. Ceci s’insère dans la politique actuelle de réduction de l’offre de soin, puisque en effet un seul hôpital (Cochin) assurera les interventions chirurgicales en lieu et place de plusieurs hôpitaux. Le personnel est ainsi mis de force à contribution, puisque cette mesure ne s’accompagne pas d’augmentation d’effectifs ou de salaire : astreintes obligatoires plus nombreuses (une astreinte est payée 40 euros pour 24h).

Toujours dans cette optique de rentabilité, une nouvelle maternité est en voie d’ouverture au mois de mars 2012 sur le site de Cochin. Cette maternité est prévue pour 7000 accouchements par an. Elle doit absorber et remplacer 2 maternités actuelles, celle de Port Royal et celle de Saint-Vincent de Paul. Or, ce regroupement de maternités est accompagné d’une diminution du personnel de 30%. Une expertise a démontré que les deux maternités initiales étaient déjà en sous-effectifs. C’est donc avec un sous-effectif encore accru de 30% qu’ouvrira la nouvelle maternité. Plus de naissances avec moins de personnel : cela mettra inévitablement les patientes et leurs bébés en danger, avec des relations humaines quasi inexistantes. Le personnel de Cochin a déjà surnommé cette future maternité « l’usine à bébés »…

L’importante dégradation des conditions de travail dans les hôpitaux s’accompagne d’une perte de salaire très sensible pour les agents. Ainsi ceux de catégorie C (non diplômés) débutent et restent pendant 5 ans au-dessous du SMIC. Plus généralement, le gel des salaires des fonctionnaires depuis plusieurs années entraîne une baisse réelle des salaires (-10% en 8 ans). Cette baisse est due à l’inflation, mais aussi à l’augmentation des charges sociales, le patronat se délestant de plus en plus de ses propres charges sur les salariés. Cerise sur le gâteau : la Direction Générale de l’AP-HP a remis en cause la défiscalisation de nos cotisations mutuelles qui, auparavant, n’étaient pas imposables. Ceci entraînera une augmentation de l’impôt sur le revenu, avec possible passage à la tranche supérieure. La mutuelle est obligatoire pour les agents de l’AP-HP depuis que les soins gratuits pour le personnel ont été supprimés.

 

Diminution de notre pouvoir d’achat, dégradation des conditions de travail, perte de nos acquis, attaque de nos statuts (avec la légalisation des CDI et des CDD), déshumanisation et fermeture des hôpitaux, diminution de l’offre de soins, augmentation insupportable des charges de travail…

Précarité des postes et incertitude de l’avenir, désorganisation des horaires (donc de la vie familiale), fatigue accumulée, stress, dépressions (sur Cochin, un médecin du travail pour plus de 4000 agents…), suicides…

Tel est actuellement le triste bilan de l’APHP, reflet de l’ensemble des hôpitaux publics. La Santé est réellement malade de la peste libérale… La fameuse « dette » dont on nous rebat les oreilles serait responsable de tous les maux. Mais n’oublions pas qu’il s’agit de la dette d’un système, le système capitaliste. Pour échapper à la désintégration de notre système de santé et à la privatisation rampante de nos hôpitaux, la solution n’est certes pas dans des économies sans fin, mais bien dans le changement du système.

 

Marise Dantin et Bernard Giusti (Secrétaires Généraux CGT Cochin-St-Vincent de Paul)

 

Article publié dans l’Huma-Dimanche paru le 15 décembre 2011

Publié dans Luttes - actualités

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