9 janvier EXEMPLES de mobilisation : CLERMONT-FERRAND
Des témoignages de la presse régionale qui viennent contredire la petite musique de l’essoufflement

La CFDT n’avait pas appelé à la grève mais tous les autres syndicats, et les gilets jaunes, étaient, hier matin à Clermont-Ferrand, unis derrière la banderole réclamant « le retrait immédiat du projet Macron-Delevoye ».
Moins nombreux que pour la première manifestation le 5 décembre, ils étaient tout de même près de 10.000 salariés du privé, fonctionnaires, retraités, étudiants et élus (6.000 selon la préfecture, entre 15 et 20.000 pour les syndicats) à battre le pavé, ce jeudi matin à Clermont-Ferrand. Réunis pour dire leur rejet viscéral de la réforme des retraites portée par le gouvernement et du projet de société qui le sous-tend : « une société capitaliste, individualiste qui prime sur la solidarité ».

A l'exception de la CFDT qui n'appelait pas à manifester, les syndicats ont fait front commun pour réclamer «le retrait immédiat du projet Macron-Delevoye».
« Un projet ni juste, ni universel »
« Ce projet n’est ni juste ni universel, et nous pénalisera tous et plus encore les précaires, les jeunes et les femmes que le gouvernement s’obstine à prétendre gagnantes. Tout est fait pour abaisser mécaniquement le montant des pensions quand on sait que ce gouvernement a qualifié les retraités touchant 1.000 € par mois de privilégiés et ceux percevant 2.000 € de nantis ! Mais nous voulons une retraite pour vivre pas pour survivre ! », ont tempêté les syndicats (*).

« Non, assurent-ils, le mouvement ne s’essouffle pas, preuve en est les 216 appels à manifester enregistrés contre 197 le 17 décembre et l’entrée dans le mouvement des avocats.

Depuis lundi le barreau de Clermont-Ferrand est entré dans la contestation à l'image de tous les barreaux de Métropole et d'Outre-Mer, en faisant la grève des audiences. photo Franck Boileau et Jean Louis Gorce
« 100 % des barreaux de métropole et d’Outre-mer sont engagés, depuis lundi, dans une grève des audiences. Notre régime est autonome et solidaire puisqu’il verse 100 millions d’euros au régime général et assure 1.400 € de retraite minimum à chaque avocat. Il est aussi pérenne jusqu’en 2070 mais on veut doubler nos cotisations ! On nous dresse les uns contre les autres pour nous diviser » a expliqué Me Borie.
Poursuivre la grève «car il n'y a rien à négocier avec ce gouvernement»
Une stratégie dénoncée par les syndicats qui, au pied de la statue de Vercingétorix, ont appelé « à la résistance car il n'y a rien à négocier avec ce gouvernement» et « à ne rien lâcher en amplifiant le mouvement » et en rejoignant, ce vendredi 10 janvier, à 11 h 30 à la gare SNCF de Clermont-Ferrand, les cheminots engagés dans leur 37e jour de grève. De même, une retraite aux flambeaux est prévue samedi, à 17 heures, entre le carrefour de l’Europe, à Chamalières et la préfecture. Les gilets jaunes eux ont appelé à s’engager « sans violence, dans une action résolue de blocage de l’économie marchande ».

Dans le cortège, ils étaient en tout cas nombreux à rester motivés comme au premier jour:
«Il est certain qu'en prenant en compte toute la carrière, je vais perdre beaucoup»Sébastien, 47 ans, employé Michelin

«J'ai fait la grève à chaque fois, et c'est sur que la fin du mois est raide mais je préfère perdre un "peu" maintenant qu'énormément beaucoup plus tard. On ne connaît pas la valeur du point qui sera variable et il est certain qu'en prenant en compte toute la carrière je vais perdre beaucoup. Et puis je suis là aussi pour mon fils de 19 ans qui est étudiant.»
«Entre les études, les grossesses, les temps partiels, il ne me restera pas grand-chose»Marion, 28 ans, professeur de collège

«Je suis là pour exprimer mon opposition à ce projet et à tout ce qui est passé malgré nos protestations. Lorsque je vois des collègues qui n'en peuvent déjà plus je ne me vois pas continuer jusqu'à 64 ans. Et puis entre mes études qui m'ont fait attaquer tard, mes grossesses et les temps partiels que j'ai pris pour élever mes enfants il ne me restera pas grand-chose».
«On oublie la pénibilité! Les patrons savent bien qu'on ne pourra pas travailler en usine jusqu'à 64 ans !»Thierry ( à gauche), 42 ans, agent de maintenance et délégué syndical CGT chez Trelleborg

«Il y a des cas particuliers partout, mais les patrons savent bien qu'on ne pourra pas travailler jusqu'à 64 ans en usine. D'ailleurs, ils ne veulent pas. Dès qu'ils le peuvent, ils foutent les plus de 55 ans à la porte et à chaque plan social, ce sont les plus vieux qui partent».
«Macron installe la précarité, et déconstruit tout ce qui faisait le ciment de notre société. Je suis écoeurée»Joëlle, 58 ans, retraitée de l'enseignement.
«J'ai commencé de travailler à 18 ans et j'ai pu prendre ma retraite il y a un an puisque j'étais en carrière longue. J'estime l'avoir bien méritée. Je suis très heureuse et très fière d'avoir pu le faire et j'aimerais que d'autres en profitent. Beaucoup d'enseignants ont une fin de carrière catastrophique et sont prêts à partir avec une énorme décote. L'an dernier 90 enseignants ont pris leur retraite mais seuls dix étaient allés jusqu'à 62 ans. Ce qui se prépare est une énorme injustice. Macron installe la précarité, et déconstruit tout ce qui faisait le ciment de notre société. Je suis écoeurée.»

«Je combats la logique de division. Je suis pour le salaire à vie!»Patrick
«Que je sois chômeur, retraité ou travailleur est secondaire. Je combats la logique de division qui est soutenue par les manifestants alors qu'ils disent la combattre. La retraite rentre dans la logique du salariat avec son lien de subordination qui dit qui à le pouvoir économique, le pouvoir verbal, etc. Moi je suis pour le salaire à vie qui n'est pas le revenu universel. Je suis pour la remise en cause du capitalisme.»
(*) CGT, FO, Solidaires, FSU, CFE-CGC et UNEF
Texte: Géraldine Messina
Photos: Franck Boileau, Jean-Louis Gorce et Géraldine Messina