Les dérives de la CGT ?
Les dérives de la CGT
Les récents déboires de la CGT au sein du Comité des Œuvres Sociales de Montreuil donnent une fois de plus à réfléchir sur les dérives internes au sein de la CGT.
Personne n'est dupe de la soudaine "leçon de morale" de Dominique Voynet, maire écologiste de Montreuil. Comme ce fut naguère le cas pour la CCAS d'EDF pu plus récemment à la RATP, l'attaque contre le COS de Montreuil est avant tout politique et destinée notamment, en ces temps préélectoraux, à discréditer la CGT, alliée du Front de Gauche.
Malheureusement, force est de constater que les libéraux de tout poil peuvent appuyer leurs attaques sur certaines dérives internes de la CGT, dérives le plus souvent individuelles. Ainsi, dans le cas du COS de Montreuil, les chiffres sont suffisamment clairs : "Sur un budget total passé en trois ans de 801000 € à 1,11 M€, les frais de vacances et les voyages ont fait un bond spectaculaire. Résultat : ils ont absorbé cette année 90% du budget, ne laissant que des miettes aux activités culturelles et sportives (9%) et aux aides sociales (0,7%)." "…non seulement une minorité des personnels de la mairie est gâtée par le COS, mais les principaux bénéficiaires ne sont autres que... les élus CGT eux-mêmes. En deux ans et demi, 4 élus CGT, accompagnés de leur famille, ont voyagé aux frais du COS pour un montant de 153024 €. Soit 6 fois plus que les aides sociales distribuées durant cette période. A lui seul, un élu s’est offert 10 voyages (Egypte, Maroc, week-end plongée à La Ciotat...) en 2009, 9 l’an dernier (Kenya, Crète...) et 8 ces six derniers mois (Québec, Méribel, Thaïlande...). Montant de la facture pour cet élu et sa famille : 44000 €." (source : Aujourd'hui, du vendredi 9 décembre).
Gestion maladroite ou clientélisme, volonté délibérée de profiter d'un mandat ou erreur de stratégie, finalement peu importe : il reste que des élus CGT profitent, légalement ou non, de façon directe ou indirecte, de l'argent qui leur est confié. Que ce soit justifié ou pas, l'attaque contre la CGT est difficilement parable aux yeux de l'opinion publique.
D'autant que d'autres "affaires" risquent bien de surgir par la suite. Ainsi, selon certaines informations, il semblerait que la CFDT ait porté plainte en 2010 contre les membres CGT de l'Assistance Publique au sein de l'AGOSPAP, l'organisme qui gère les œuvres sociales de la Ville de Paris. L'affaire serait en cours d'instruction, aussi convient-il d'en attendre le résultat…
Quoi qu'il en soit, le problème de fond reste le même : des dérives individuelles mettent à chaque fois la CGT en porte-à-faux. Comment ces dérives sont-elles possibles au sein du syndicat ? Pour nous la réponse est évidente.
La CGT est une structure syndicale bien rôdée. Mais alors qu'elle se rassemblait jadis sur la base d'une idéologie clairement définie, elle est aujourd'hui elle-même dans une dérive idéologique patente. D'un côté certains qui veulent la tirer vers un réformisme qui ne dit pas son nom, de l'autre des militants qui veulent rester sur une ligne de lutte des classes. Cette division interne, parce qu'elle se fait largement au mépris de la démocratie syndicale, est un champ ouvert pour les "prédateurs" de toute sorte. Lesquels, même lorsque leur responsabilité est manifeste, peuvent bénéficier du vieux réflexe de solidarité…
Certes, comme précisé au début de cet article, les attaques contre la CGT sont avant tout motivées par des raisons politiques ou syndicales. Mais en ne faisant pas le ménage parmi ces propres troupes, ou en n'instaurant pas des règles simples (comme par exemple interdire à tout élu CGT de bénéficier lui-même des avantages de sa charge), la CGT risque de se gangrener peu à peu et de prêter de plus en plus le flanc à ses ennemis.
Michel Strausseisen