À Gaza, les femmes enceintes et leurs bébés sont « constamment exposés au risque d’une mort évitable », dénonce un rapport de Human Rights Watch

Publié le par FSC

Marie Penin
L'Humanité du 28 janvier 2025

 

Dans une clinique privée de Rafah, au sud de l’enclave, une jeune mère raconte avoir été contrainte de quitter l’hôpital seulement quatre heures après avoir accouché. Ici, à Rafah, dans un abri, le 29 février 2024.© AFP

 

Attaques contre les établissements médicaux, bombardements systématiques ciblant les civils et entraves à l’aide humanitaire : Human Rights Watch documente, dans un rapport publié ce mardi 28 janvier, les graves violations des droits des Palestiniens par Israël.
« Je l’ai tenu pendant quatre minutes, puis ils me l’ont pris et l’ont enveloppé. » Enceinte de neuf mois, Shaima a tragiquement accouché en urgence d’un enfant mort-né, trois jours seulement après avoir perdu deux de ses 4 autres enfants dans un bombardement au sud de la bande de Gaza. À travers ce témoignage glaçant d’une Palestinienne, l’ONG Human Rights Watch illustre, dans un rapport publié ce mardi 28 janvier, les violences systématiques infligées aux femmes et à leurs enfants par la politique destructrice d’Israël, qu’elle qualifie de « crime de guerre ».


L’ONG documente, témoignages à l’appui, le traitement effroyable infligé par la force occupante : refus délibérés d’accès aux centres médicaux, conditions d’hygiène désastreuses dans les hôpitaux ciblés par les bombardements, privation de nourriture… Des experts de l’ONU avaient déjà alerté, en mai 2024, sur ces pratiques (violations des droits des femmes enceintes), mettant gravement en danger les 50 000 femmes palestiniennes enceintes et les 20 000 nouveau-nés dans le territoire occupé.


Les femmes parturientes et leurs bébés sont « constamment exposés au risque d’une mort évitable », dénonce Human Rights Watch. Depuis la reprise des bombardements aériens israéliens sur Gaza (déjà sous blocus depuis 2007) et l’intensification de la guerre après l’attaque du Hamas du 7 octobre, les attaques contre les établissements de santé sont incessantes.

« J’étais épuisée, je ne pouvais pas marcher »


À cette date, seulement 7 des 18 hôpitaux de Gaza encore en état de fonctionnement disposent d’un service de soins d’urgence obstétriques, ainsi que 4 des 11 hôpitaux de campagne et un centre de santé communautaire. Dans une clinique privée de Rafah, au sud de l’enclave, une jeune mère raconte avoir été contrainte de quitter l’hôpital seulement quatre heures après avoir accouché. « J’étais épuisée, je ne pouvais pas marcher », témoigne-t-elle, forcée d’évacuer avec son bébé dans les bras vers le camp de Khan Younès, situé à plus de 8 kilomètres, pour « vivre sous tente ».


Au manque criant d’infrastructures de santé, fréquemment bombardées par l’armée israélienne, s’ajoutent des carences dans l’accès aux soins en raison des sévères restrictions imposées par Tel-Aviv sur l’acheminement de l’aide humanitaire. Les pénuries de médicaments et d’anesthésiques nécessaires aux péridurales contribuent aux conditions d’hygiène déplorables auxquelles sont confrontées les femmes enceintes, pour celles qui parviennent à atteindre les maternités de l’enclave.


La dégradation des conditions d’accompagnement des femmes pendant leur grossesse ainsi qu’au moment de l’accouchement, décriée par l’ONG, serait responsable d’une augmentation des fausses couches de près de 300 % depuis le début du blocus, selon des estimations de la Fédération internationale pour la planification familiale.


Le manque de nourriture et l‘accès restreint à l’eau potable, aggravés par l’interdiction d’accès au territoire de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa), votée par le Parlement israélien en octobre dernier et censée entrer en vigueur ce mois-ci, sans oublier les traumatismes physiques et psychiques des mères, pèsent lourdement sur les familles ; une violation de l’article 16 de la convention de Genève de 1949, qui prévoit la « protection » et un « respect particulier » pour les femmes enceintes. Un énième camouflet au droit international humanitaire.
 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article