Israël : l’ex-procureure générale de l’armée arrêtée après la fuite d’une vidéo prouvant la torture d’un Palestinien dans une prison

Publié le par FSC

L'Humanité du 03 novembre 2025

 

Le 2 novembre 2025, des militaires israéliens sont mobilisés pour retrouver Yifat Tomer-Yerushalmi. Sa voiture avait été abandonnée le 1er novembre, deux jours après sa démission du poste de procureur en chef de l’armée israélienne.© REUTERS/Nir Elias

 

La juriste la plus haut gradée de la hiérarchie militaire israélienne, Yifat Tomer-Yerushalmi avait démissionné il y a 5 jours sous la pression du gouvernement israélien. Accusée d’avoir fait fuiter une vidéo prouvant la torture d’un Palestinien dans la prison militaire de Sde Teiman en juillet 2025, elle a été arrêtée par le gouvernement israélien ce 3 novembre.
Pendant quelques heures, dimanche, personne ne savait où elle se trouvait. Yifat Tomer-Yeroushalmi, générale de division de l’armée et ex « avocate militaire en chef », soit la juriste la plus haut gradée de la hiérarchie militaire, avait seulement laissé un mot dans sa voiture abandonnée. Ce lundi 3 novembre, le ministre d’extrême droite de la Sécurité nationale israélienne, Itamar Ben Gvir, a mis fin aux spéculations.
L’ex-procureure de l’armée israélienne a été arrêtée dans la nuit du 2 au 3 novembre. Plusieurs médias israéliens ont ensuite indiqué qu’un tribunal de Tel-Aviv avait décidé de prolonger la détention d’Yifat Tomer-Yeroushalmi jusqu’à mercredi à la mi-journée.


La magistrate de 51 ans est accusée d’avoir secrètement autorisé la diffusion d’une vidéo de caméra de surveillance montrant un groupe de soldats israéliens qui entourent un détenu palestinien pour le brutaliser et le violer, en juillet 2024, dans la base militaire de Sde Teiman.
Cette prison militaire, située dans le désert du Neguev, est connue pour ses conditions de détentions particulièrement difficiles où des Palestiniens arrêtés à Gaza depuis le 7 octobre 2023 sont humiliés, battus, torturés… Et parfois donc violés.

Cinq soldats ont fini par été arrêtés


Après la diffusion de cette vidéo sur une chaîne israélienne en août 2024, des enquêtes avaient mené à l’inculpation de plusieurs soldats : « Le procureur militaire a inculpé cinq soldats réservistes pour avoir commis des agressions dans des circonstances aggravantes et causé des blessures à un détenu », indiquait alors l’armée dans un communiqué. Ces cinq soldats ont fini par été arrêtés, mercredi 29 octobre.
Le même jour, Israël Katz, le ministre de la défense, annonçait qu’une enquête criminelle était en cours. Pas sur les tortures infligées aux détenus palestiniens par des soldats, mais sur la fuite de la vidéo prouvant les sévices. Deux jours plus tard, Yifat Tomer-Yeroushalmi démissionnait.


Dans sa lettre diffusée par la presse, elle reconnaît que ses services avaient diffusé la vidéo aux médias, avant d’insister sur son « devoir » d’enquêter quand il existe une « suspicion raisonnable d’actes de violence contre un détenu » dans les prisons israéliennes.
Depuis, des sources militaires ont confié à Haaretz qu’elle aurait refusé d’ouvrir des enquêtes sur des crimes de guerres potentiels, comme la frappe aérienne qui a tué sept employés de l’ONG World Central Kitchen, le 1er avril 2024, ou l’exécution de quinze travailleurs humanitaires gazaouis par l’armée israélienne à Rafah, le 23 mars 2025, par crainte du « harcèlement » de l’extrême droite.

« Côtes fracturées, un poumon perforé et une déchirure rectale interne »


Dans un message sur Telegram, le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, a annoncé lundi qu’il « a été convenu qu’à la lumière des événements de la nuit dernière, le Service pénitentiaire agirait avec une vigilance accrue pour assurer la sécurité de la détenue dans le centre de détention où elle a été placée en garde à vue ».
Il a souligné l’importance de « mener l’enquête de manière professionnelle afin de découvrir toute la vérité concernant l’affaire qui a conduit à une accusation » contre des soldats. Une manière de les blanchir ?
Pourtant, selon l’acte d’accusation menée à l’époque par les services de l’ex-procureure, les soldats ont « agi contre le détenu avec une grande violence ». Ces brutalités « ont causé de graves blessures physiques au détenu, notamment des côtes fracturées, un poumon perforé et une déchirure rectale interne ».


Les faits se sont produits le 5 juillet 2024 lors d’une fouille du détenu conduit dans une zone adjacente à la prison, les yeux bandés, menottes aux mains et aux chevilles, selon la même source. L’acte mentionne aussi de nombreuses preuves recueillies au cours de l’enquête, notamment des images extraites des caméras de surveillance et des documents médicaux.
Le centre de détention de Sde Teiman a été aménagé dans une base militaire pour y incarcérer des Palestiniens arrêtés notamment à Gaza depuis le 7-Octobre. En juillet 2024, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, avait publié un rapport selon lequel, depuis l’attaque du 7-Octobre, de nombreux Palestiniens avaient été
emprisonnés dans le secret avec dans certains cas un traitement pouvant s’apparenter à de la torture.

 

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