Liban : pourquoi Israël menace encore de bombarder Beyrouth ?
L'Humanité du 2 Novembre 2025
Dans le sud du pays, les attaques israéliennes ne sont jamais interrompues depuis le cessez-le-feu signé il y a un an. Tel-Aviv continue d’affaiblir son voisin dans l’objectif d’entériner ses droits sur le territoire libanais.
Dans la guerre à bas bruit qu’Israël continue de mener contre le Liban malgré le cessez-le-feu, Beyrouth paraît bien seul. Ce 1er novembre, lors d’un entretien à la chaîne israélienne 14, le ministre de la Défense, Israël Katz, a menacé de bombarder la capitale libanaise en cas de « tentative d’attaque » du Hezbollah sur le nord d’Israël, avant de prévenir dès le lendemain de l’intensification de la campagne de bombardements au Sud.
Une manière de mettre le gouvernement libanais sous pression, alors que le Hezbollah dit avoir reconstitué sa force militaire – dont Israël assurait pourtant avoir détruit 70 % à 80 % en 2024 – et être prêt à se lancer dans une nouvelle confrontation avec Tel-Aviv, malgré l’objectif de désarmement contenu dans l’accord de cessez-le-feu.
Le parti de Naïm Kassem souffle le chaud et le froid. Malgré la démonstration de force, il certifie se tenir derrière l’État, à qui reviendrait la protection du Liban. S’il reste impossible d’évaluer les forces réelles du mouvement chiite, il paraît peu probable que ce dernier ait réussi à se reconstruire en une année, du fait de la poursuite des bombardements et surtout de la rupture quasi-totale des voies d’approvisionnement iraniennes, via la Syrie.
Une zone tampon sur le modèle de Gaza
Israël a toutefois intérêt à faire valoir un niveau de menace élevé pour maintenir ses positions, alors que le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, n’a jamais abandonné sa vision messianiste d’un Grand Israël auquel serait intégré le sud du Liban, jusqu’au fleuve Litani. Selon des informations du quotidien libanais l’Orient-le jour, l’envoyé de Donald Trump, Tom Barrack, Beyrouth pourrait se voir imposer la création d’une zone tampon sur le modèle de Gaza.
En clair, une appropriation en bonne et due forme de son territoire, dissimulée sous le nom de « zone économique », et dont l’administration pourrait être confiée à un comité international de technocrates. « Nous allons aller chercher les partenaires du Golfe pour le Liban. La zone tampon deviendra une zone industrielle, avec des panneaux solaires, des resorts (stations balnéaires – NDLR) », se délecte Tom Barrack.
Ce 30 octobre, le président libanais, Joseph Aoun, a en outre donné ordre à l’armée de faire face aux incursions israéliennes. Cette annonce est intervenue après la frappe contre un bâtiment municipal à Blida, qui a tué un employé, qualifiée de « flagrant assaut contre la souveraineté et les institutions de l’État libanais ». Alors que le Liban est exposé à une reprise de la guerre, les États-Unis insistent pour mettre fin au mandat de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), régulièrement attaquée par Israël.
« L’ONU a violé son mandat, le temps de la Finul est révolu », a appuyé l’ambassadeur d’Israël auprès des Nations Unies, Danny Danon après que les casques bleus ont abattu de façon inédite un drone israélien, le 26 octobre à Kfar Kila. Plutôt qu’un prélude à la paix, le cessez-le-feu ne sert donc qu’un rapport de force favorable à Israël qui continue d’affaiblir son voisin. On voit mal, malgré l’insistance états-unienne et israélienne, comment, dans ce contexte, Beyrouth pourrait décemment normaliser ses relations avec Tel-Aviv qui l’occupe et le bombarde.