"Le syndicalisme poursuit la coordination des efforts ouvriers, l'accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d'améliorations immédiates. (...) Mais cette besogne n'est qu'un côté de l'œuvre du syndicalisme : il prépare l'émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l'expropriation capitaliste."
Charte d'Amiens
CONGRES de la CGT : suite des réactions ... très mauvaise nouvelle pour le gouvernement
Publié le
par FSC
Importance de ce congrés dans le contexte actuel que soulignent la diversité et le nombre des réactions dans la presse, les médias et les réseaux.
Voyons donc 2 nouvelles réactions :
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France Info :
"C'est une très mauvaise nouvelle pour le gouvernement" : ce que change l'élection de Sophie Binet à la tête de la CGT dans la lutte contre la réforme des retraites
Si son élection à la succession de Philippe Martinez est perçue positivement pour l'avenir de l'intersyndicale, elle l'est beaucoup moins pour l'exécutif.
Dans la salle de son 53e congrès, à Cournon d'Auvergne (Puy-de-Dôme), vendredi 31 mars, la CGT affiche un front uni. A la tribune, la nouvelle secrétaire générale de la centrale syndicale, Sophie Binet, a un message pour Emmanuel Macron, en pleine contestation contre la réforme des retraites. "Nous ne lâcherons rien, à commencer par notre exigence de retrait de cette réforme", prévient celle qui a été élue à la surprise générale, un peu plus tôt dans la journée. Jusqu'alors secrétaire générale de la Fédération des cadres (Ugict), cette conseillère principale d'éducation de 41 ans poursuit, sous les applaudissements : "Il n'y aura pas de trêve, pas de suspension, pas de médiation. On ne reprendra pas le travail tant que cette réforme ne sera pas retirée."
Après une semaine de congrès houleux, Sophie Binet, première femme à diriger la CGT, aura la lourde tâche de recoller les morceaux d'un syndicat profondément divisé. "C'est un choix de compromis, qui permet de résoudre les tensions internes à l'organisation, ou du moins les oppositions à la direction sortante de Philippe Martinez", explique à franceinfo Pierre Rouxel, maître de conférences en sciences politiques et spécialiste du syndicalisme.Engagée sur les questions environnementales et coautrice du livre Féministe, la CGT ? Les femmes, leur travail et l'action syndicale (éditions de l'Atelier, 2019), elle apparaît moins radicale qu'Olivier Mateu ou Céline Verzeletti, dont les noms étaient cités pour prendre la tête de la CGT.
"Personne n'avait intérêt à rompre l'intersyndicale"
Avec Sophie Binet, l'avenir de l'intersyndicale semble s'inscrire dans la continuité."Le fait que la voix du compromis ait triomphé rend peu probable à court terme toute fracturation de l'intersyndicale", analyse ainsi Pierre Rouxel. "Personne n'avait intérêt à la rompre, y compris les plus farouches opposants à la ligne de Philippe Martinez", abonde Maxime Quijoux, sociologue au CNRS et au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).
"On évite une crise assez forte à la CGT, donc on évite une catastrophe qui aurait pu emporter de façon directe ou indirecte l'intersyndicale."
Maxime Quijoux, sociologue au CNRS et au Cnam
Son élection a été saluée par d'autres syndicats, à l'instar du secrétaire général de l'Unsa, Laurent Escure. "Je veux dire que je suis très heureux pour elle", a-t-il écrit sur Twitter. Même enthousiasme chez les opposants politiques à la réforme des retraites. "Les dangers étaient la fracture interne et l'affaiblissement du front contre la retraite à 64 ans. Ils sont évités. C'est une bonne nouvelle à mes yeux", souffle à France Télévisions un député de la Nupes.
La nouvelle patronne de la CGT a confirmé que l'intersyndicale se rendrait mercredi 5 avril à Matignon pour rencontrer Elisabeth Borne. "Nous irons unis pour exiger le retrait de cette réforme de façon ferme et déterminée", a-t-elle lancé. Plus question de médiation ou de pause, comme le réclame Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, auquel Philippe Martinez avait semblé emboîter le pas. "Cela a provoqué un moment de flottement dans le congrès. Là, on revient au retrait de la réforme, ce qui envoie un signal clair en interne", décrypte Maxime Quijoux.
L'exécutif "pariait sur les divisions de la CGT"
Dans ce contexte, l'arrivée de Sophie Binet est-elle une bonne ou une mauvaise nouvelle pour l'exécutif ? Officiellement, la majorité salue son élection. "Personne ne peut souhaiter que la radicalité s'impose à la CGT. Sa désignation est d'abord une bonne nouvelle pour le dialogue social", assure à France Télévisions le député Renaissance Marc Ferracci, proche d'Emmanuel Macron. "On ne peut que se réjouir de voir une réformiste à la tête de la CGT", approuve également le député Horizons Paul Christophe, chargé des retraites pour son groupe. "Je trouve préférable d'avoir des syndicats forts et réformistes que faibles et radicaux. Les premiers peuvent faire bouger les choses en mettant en place un rapport de force utile, les seconds montent les tensions dans le pays sans rien apporter de positif", appuie de son côté Nicolas Turquois, député du MoDem.
Au gouvernement, l'entourage du ministre du Travail, Olivier Dussopt, joue le détachement : "On n'a pas du tout regardé les différentes options sous le prisme de ce qui, supposément, nous arrangerait ou pas." La Première ministre a, elle, affirmé vendredi qu'elle ne connaissait pas personnellement Sophie Binet et qu'elle n'allait "pas interpréter" ce quise passe à la CGT, mais qu'elle serait "à l'écoute". Sacha Houlié, le président Renaissance de la commission des lois, anticipe "une situation identique" à l'actuelle.
En réalité, l'arrivée de Sophie Binet est "une très mauvaise nouvelle pour le gouvernement", analyse Maxime Quijoux. Selon lui, l'exécutif "pariait sur les divisions de la CGT pour faire prospérer la stratégie du pourrissement, mais il n'y a finalement pas de crise à la centrale, ce qui maintient le front syndical uni".
Le profil de Sophie Binet n'est pas non plus un atout pour le pouvoir en place. "Cette femme jeune, qui vient de l'encadrement, rafraîchit l'image de la CGT. Elle va renvoyer une image différente dans l'opinion publique, sur laquelle le gouvernement aura peu de prise", anticipe le sociologue."Elle modernise la CGT, abonde le politologue Dominique Andolfatto. Elisabeth Borne et Emmanuel Macron ne pourront pas caricaturer la CGT en opposants stériles, car l'histoire personnelle de Sophie Binet est en contradiction avec cette caricature."
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Rapport de Forces
L’élection de Sophie Binet modifie les équilibres dans la CGT
Sophie Binet est devenue secrétaire générale de la CGT ce vendredi 31 mars. Si son accession à la tête de la centrale syndicale est particulièrement inattendue, c’est parce qu’elle résulte d’une tentative de trouver un compromis au sein d’une CGT divisée. Son élection, et celle de son nouveau bureau confédéral, rebat donc les équilibres internes.
« Ce congrès s’est tenu sur une terre volcanique… et nous avons empêché l’éruption. Il a été très difficile, violent parfois. » À la tribune du 53e congrès de la CGT, l’allocution de Sophie Binet, première femme secrétaire générale de la CGT, évoque une dernière fois les tensions de la semaine pour mieux les dépasser.
Elle le sait : son accession inattendue au poste de numéro un de la centrale syndicale, lors de ce congrès de Clermont-Ferrand, est avant tout le fruit d’une tentative de trouver un compromis au sein d’une CGT divisée. À la tête de l’union générale des ingénieurs, cadres et techniciens (UGICT), cette ancienne CPE, dirigeante de l’Unef et passée par le PS, dispose à première vue d’un profil éloigné des standards de la confédération : pas assez ouvrier, jamais passé par le PCF.
Trois personnes avaient déclaré leur candidature au poste de secrétaire général de la CGT. Marie Buisson, proposée par Philippe Martinez et secrétaire générale de la fédération de l’enseignement, de la recherche et de la culture (FERC-CGT) Céline Verzeletti, secrétaire générale de l’union fédérale des syndicats de l’État (UFSE) et Olivier Mateu, secrétaire général de l’union départementale des Bouches-du-Rhône (UD 13). Aucun n’est parvenu à l’emporter. Ce que change l’élection de Sophie Binet, ce n’est pas tant la « combativité » de la confédération, comme on peut le lire parfois, mais une partie de ses équilibres internes.
La direction sortante désavouée
Élue au sein de la commission exécutive confédérale (voir notre encadré), Marie Buisson a, comme annoncé, proposé sa candidature au poste de secrétaire général. Mais elle n’a pas réussi à réunir suffisamment de voix. « On pensait avoir certains votes qu’on n’a finalement pas eu », confie un de ses proches. Ce résultat n’a pas totalement été une surprise tant, depuis le début du congrès, les critiques pleuvent contre le secrétaire général sortant, muet tout au long du congrès.
Dès le deuxième jour de débat, un vote contre le rapport d’activité a mis la direction confédérale sortante en difficulté. Une légère majorité de délégués (50,32%) a ainsi désavoué le bilan de Philippe Martinez, ce qui a ricoché sur sa dauphine. La candidature de Céline Verzeletti n’a pas non plus été victorieuse. Et celle d’Olivier Mateu n’a pas été présentée au comité confédéral national (CCN), ce dernier n’étant pas parvenu à obtenir suffisamment de voix pour intégrer la CEC. Ces candidatures avortées il a fallu trouver un équilibre entre au moins deux pôles de taille quasiment équivalente.
[en réalité la candidature d'Olivier Mateu n'a pu être retenue, la liste des 66 noms étant présentée par ceux issus de la direction sortante comme une liste bloquée issue des discussions de la nuit précédente ayant exclue et Olivier Mateu et emmanuel Lépine et un représentant du Comité de chômeurs et précaires]
Quelles équipes, quels soutiens ?
D’un côté, on trouve un pôle en soutien à la candidature de Marie Buisson et proche de la direction sortante. Il regroupe certaines fédérations comme celle de la métallurgie (fédération d’origine de Philippe Martinez) ainsi que de nombreux secrétaires généraux d’unions départementales. De l’autre, un pôle en soutien à la candidature de Céline Verzeletti, notamment constitué des deux puissantes fédérations que sont la CGT-cheminots et la fédération des mines et énergie (FNME-CGT).
Un troisième pôle, moins large, a tenté de sortir son épingle du jeu. Il est constitué par le trinôme Olivier Mateu, Emmanuel Lépine et Amar Lagha, respectivement secrétaire général de l’UD 13, secrétaire général de la fédération de l’industrie de la chimie et secrétaire général de la fédération du commerce. Un pôle qui se désigne parfois lui-même sous le nom d’Unité CGT et dont Emmanuel Lépine confie qu’il pourrait s’organiser pour devenir un « courant » de la CGT. « Ce ne serait pas une scission car nous sommes la CGT », précise le secrétaire général de la FNIC. Ces derniers n’ont toutefois pas présenté de candidature au poste de secrétaire général de la CGT et se sont rapprochés de Céline Verzeletti.
Sophie Binet : une tentative de synthèse
L’élection de Sophie Binet a permis de sortir de cette situation de blocage. Pilote du collectif Femmes mixité, son profil peut rappeler celui de Marie Buisson et a convenu aux proches de la direction sortante. En contrepartie, la CCN a fait rentrer au bureau confédéral le secrétaire général de la fédération de l’énergie, Sébastien Ménesplier et celui des cheminots, Laurent Brun. Ce dernier, membre du PCF et connu pour sa proximité avec Fabien Roussel, assure même le poste d’administrateur, c’est-à-dire de numéro 2 de la confédération. Céline Verzeletti, également membre du PCF, siégeait déjà au bureau confédéral et y conserve sa place.
L’élection de ce bureau met cependant à mal un autre équilibre : celui entre les unions départementales et les fédérations. Ces dernières « fonctionnent en vertical et ont un poids politique fort », soutient Benoît Martin, secrétaire de l’UD 75. Alors que les unions départementales « plutôt horizontales » regroupent toute une diversité de métiers mais pèsent moins sur les orientations politiques nationales de la CGT. Or elles risquent de perdre de l’influence au sein du bureau confédéral fraîchement élu, puisque seuls 2 de ces membres sont issus des UD contre 4 auparavant. Lauren Brun le souligne lui-même : « Il va falloir trouver un moyen de rééquilibrer cela. »
Quelle politique mener ?
Comment ce nouvel équilibre interne va-t-il peser sur la stratégie de la CGT dans le futur ? Impossible à dire. Lors de son allocution à la tribune, Sophie Binet a d’abord voulu donner des gages de combativité face à la réforme des retraites. « Nous ne lâcherons rien, il n’y aura pas de trêve, il n’y aura pas de suspension, il n’y aura pas de médiation ». Une manière de se démarquer de Philippe Martinez, qui avait déclaré soutenir la proposition de médiation formulée par Laurent Berger le 28 mars. Mais aussi de rompre avec son image de cadre, soupçonné d’être plus à l’aise avec le compromis qu’avec la lutte.
Elle a également esquissé plusieurs priorités, comme le lancement d’une grande campagne de syndicalisation, la lutte pour la réindustrialisation du pays, contre les violences sexuelles au travail et dans la CGT ou encore le combat écologique, affirmant que « les questions environnementales ne sont pas sociétales et extérieures, mais doivent être portées au quotidien sur nos lieux de travail ». Reste à voir comment Sophie Binet mettra en œuvre ces orientations. Et quel sera le rôle de son entourage dans ce processus.
Les élections à la CGT, comment ça marche ?
Pour comprendre cette élection surprise, il faut expliquer comment fonctionnent les élections dans les différentes instances de la confédération.
Le comité confédéral national (CCN) : constitué de tous les secrétaires généraux des unions départementales et des fédérations (128 membres). Il est considéré comme un parlement de la CGT. Il vote pour élire le bureau confédéral à partir de la liste présentée par la CEC.
La commission exécutive confédérale (CEC) : constituée de 66 membres pour ce 53e congrès. Elle est élue par les quelque 1000 délégués qui ont siégé au congrès pour représenter leurs syndicats. Elle siège deux fois par mois pour gérer les affaires courantes.
Le bureau confédéral : composé de 10 membres à l’issue de ce 53e congrès. Il comprend le secrétaire général et l’administrateur. Il est élu parmi les 66 membres de la CEC.
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L'avis de Jean LEVY dans ça n'empêche pas Nicolas
Pendant quatre jours - et combien de nuits ? - les délégués CGT ont discuté de la vie de leur centrale syndicale dans les prochaines années.
Philippe Martinez et la direction sortante avaient l'ambition de modifier de fond en comble l'ADN de la CGT, en ajoutant aux luttes sociales, un axe féministe marqué et une coloration écolo bien teintée.
Dans cette perspective, de nouveaux noms étaient suggérés pour diriger la CGT, et en particulier, celui de Marie Buisson, comme future secrétaire-générale. Mais son organisation, la FD de l'Education et de la Culture, et sa personnalité, ne lui ont pas permis de s'imposer, sa candidature se trouvant à deux voix rejetée.
Les membres de la Commission Exécutive Confédérale ont alors réfléchi à une autre équipe. Non sans mal, ils ont choisi la dirigeante de l'UGICT, l'organisation des ingénieurs et des techniciens affiliés à la CGT, Sophie Binet, qui succède donc à Martinez.
Quoi penser de ce Congrès et des débats qu'il a engendrés ?
Martinez souhaitait un changement de cap, et une autre CGT. Ce que les délégués ont repoussé en votant par mandats contre le rapport activité.
Mais, les délégations, dans leur majorité, ne se sont pas exprimé sur les sujets d'actualité, les problèmes de l'heure posés à la CGT, tels son appartenance à la CES et le maintien de la France dans l'Union européenne, la guerre en Ukraine, ses causes et le danger d'un conflit mondial, la dictature de classe, que Macron fait peser sur la population, et comment y faire fasse au-delà des retraites... et bien d'autres questions.
Malgré quelques interventions - celle par exemple, d'Olivier Mateu - au nom de l'UD des Bouches-du-Rhône - aucun débat de fond n'a eu lieu.
C'est regrettable au moment historique que nous vivons.
Tout tournait, de près ou de loin au fonctionnement interne de la CGT, aux problèmes de personnes, en ayant cependant, conscience que ceux-ci étaient bien liés à nos autres soucis.
Malgré tout, à Clermont-Ferrand, la CGT a évité le pire : sa dislocation dans un magma fumeux, plus vert que rouge. Nous gardons intacte notre Confédération pour les combats en cours et les batailles de classe à venir.