La dangereuse fuite en avant de Netanyahou pour les Palestiniens, mais aussi les Israéliens

Publié le par FSC

Pierre Barbancey
L'Humanité du 22 avril 2025

 

Benyamin Netanyahou se lance dans une fuite en avant dangereuse pour les Palestiniens. Ohad Zwigenberg/UPI /ABACAPRESS

 

En rompant la trêve à Gaza, le 18 mars, le premier ministre israélien a décidé d’aller jusqu’au bout de son projet génocidaire et d’annexion des territoires palestiniens. Les parlementaires étrangers ne peuvent plus se rendre en Cisjordanie. Derrière les révélations du chef du Shin Bet apparaît un dictateur prêt à tout, surtout au pire.
Benyamin Netanyahou se lance dans une fuite en avant dangereuse pour les Palestiniens, mais également pour les Israéliens. L’autoritarisme fait force de loi pour le premier ministre et ses sbires d’extrême droite Bezalel Smotrich, ministre des Finances, et Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité intérieure. Arc-boutés sur leur but ultime, la négation même de l’existence du peuple palestinien, soumis à une guerre génocidaire à Gaza et un nettoyage ethnique de plus en plus violent en Cisjordanie, ils font feu de tout bois et se distribuent les rôles.
Au premier ministre le soin de rallier l’internationale d’extrême droite en rendant visite à Viktor Orban en Hongrie, puis à Donald Trump aux États-Unis, bénéficiant au passage de la mansuétude des dirigeants européens, notamment de la France. Paris a assuré que le mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) ne serait pas appliqué, moyennant quoi l’avion qui transportait le premier ministre israélien a vraisemblablement utilisé l’espace aérien français.

La contestation des réservistes Israéliens
La rupture du cessez-le-feu par Israël dans la bande de Gaza, le 18 mars, a exacerbé les critiques contre Netanyahou dans le monde entier mais également dans son propre pays. Les manifestations pour mettre fin au massacre dans le territoire palestinien se multiplient partout sur la planète, y compris dans les capitales occidentales. Les accusations d’antisémitisme à l’encontre de ceux qui s’émeuvent du sort des populations palestiniennes ne tiennent plus. En Israël, la stratégie du gouvernement est conspuée par des centaines de milliers de personnes qui comprennent bien que les Israéliens retenus à Gaza vont très certainement être tués par le déluge de feu.


Les réservistes eux-mêmes sont de plus en plus nombreux, dans tous les corps d’armes, à ne plus vouloir s’engager dans une guerre amorale qui ne vise que des civils. Dans l’Humanité du 18 avril, le capitaine de réserve Ron Feiner témoignait ainsi :

« Ce ne sont que les symptômes d’un problème plus grave : la politique de mon gouvernement, qui choisit délibérément de détruire l’avenir de la région et de sacrifier tant de vies, dont des otages israéliens et des milliers de Palestiniens, au nom de rêves illusoires qui ne passionnent pas la plupart des Israéliens. »


Après presque vingt mois de guerre, la situation a évolué et la perception du monde aussi. Netanyahou ne veut pas en tenir compte, préférant sa survie politique à celle, physique, des soldats israéliens et des civils palestiniens sous prétexte d’éradiquer le Hamas, but illusoire. Alors, il isole Israël. Au début du mois d’avril, deux députées travaillistes britanniques se sont vu refuser l’entrée en Israël alors qu’elles voulaient se rendre en Cisjordanie occupée.
La semaine dernière, plus d’une vingtaine d’élus français – parmi lesquels la sénatrice Marianne Margaté, la députée Soumya Bourouaha, toutes deux parlementaires communistes, le maire PCF de Grigny, Philippe Rio – n’ont pas pu voyager, leur autorisation, pourtant délivrée au mois de mars par les autorités israéliennes, ayant finalement été retirée sans explication.

Standing Together se voit interdire l’utilisation du mot « génocide »
En Israël même, la répression contre les manifestants qui dénoncent la politique gouvernementale est de plus en plus violente et, dans les territoires palestiniens, n’a plus de limites. Samedi, la police a averti l’organisation progressiste Standing Together qu’il était interdit de brandir des photos d’enfants palestiniens tués par les bombardements et même d’utiliser le mot « génocide ». « Sous la pression publique, ils ont fait marche arrière. Nous ne nous tairons pas ! », a écrit Alon-Lee Green, le président de cette organisation.


Plus grave cependant, Ronen Bar, jusque-là à la tête du Shin Bet, les services de renseignement intérieur, que Netanyahou tente de limoger, vient de révéler devant la justice des faits d’une gravité exceptionnelle. « Bar a décrit une situation dystopique dans laquelle le premier ministre se comporte comme un dictateur ou le chef d’une organisation criminelle, souligne le quotidien israélien Haaretz. Il a exigé que Bar le sorte de son procès pénal en invoquant faussement un risque pour la sécurité. Il a exigé que Bar prenne des mesures contre les manifestants qui manifestaient contre lui dans les rues. »


Au mois de novembre, Bezalel Smotrich promettait l’annexion des territoires palestiniens occupés, en 2025. Depuis, la violence des colons a décuplé sans qu’aucune sanction ne soit prise contre Israël. Si Netanyahou a choisi la voie de la confrontation, n’est-ce pas parce qu’il est soutenu par Donald Trump et son délire d’une Riviera du Moyen-Orient à Gaza et qu’aucune sanction n’est prise, ni politique ni économique ? La grande crainte du régime israélien réside dans la reconnaissance d’un État de Palestine par la communauté internationale. Toute l’action gouvernementale vise à l’éviter car, alors, la vision d’un Grand Israël de la mer Méditerranée au fleuve Jourdain s’effondrerait définitivement. Pour l’empêcher, Netanyahou est prêt à tout.

 

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