Après le Canada, au tour du Portugal d’envisager de reconnaître l’État de Palestine en septembre prochain

Publié le par FSC

Tom Demars-Granja
L'Humanité du 31 juillet 2025

 

Le premier ministre du Canada Mark Carney lors d’une conférence de presse à Ottawa, le mercredi 30 juillet 2025.© Zuma/ABACA

 

Ottawa a annoncé, mercredi 30 juillet, qu'il allait reconnaître l’État de Palestine en septembre prochain. Une décision suivie moins de vingt-quatre heures plus tard par le Portugal, dont le gouvernement a annoncé envisager de se joindre au Canada, à la France et au Royaume-Uni lors de l'assemblée générale des Nations unies. En réaction, les États-Unis ont lancé des sanctions contre des responsables de l’Autorité palestinienne et de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP)


Troisième membre du G7 a avoir annoncé son intention de reconnaître l’État de Palestine en septembre, le Canada s’est attiré les foudres d’Israël et des États-Unis. Donald Trump a immédiatement critiqué la décision du premier ministre Mark Carney… et averti qu’elle compliquerait les négociations avec Ottawa au sujet des droits de douane. « Wow ! Le Canada vient d’annoncer qu’il soutient un État palestinien, a-t-il ainsi lancé sur son réseau Truth Social. Cela va devenir très difficile pour nous de conclure un accord commercial avec eux. O Canada !!! »
L’annonce de Mark Carney a été réalisée lors d’une conférence de presse, mercredi 30 juillet. Moins de vingt-quatre heures plus tard, dans l’après-midi du jeudi 31 juillet, c’est au tour du gouvernement portugais d’annoncer une possible reconnaissance de l’État de Palestine en septembre. Le cabinet du premier ministre, Luís Montenegro, a ainsi prévu de consulter le président, Marcelo Rebelo de Sousa, et le Parlement, afin de lancer une procédure qui serait entérinée lors de la 80e session de l’Assemblée générale des Nations unies (ONU), prévue en septembre 2025.

« Relancer une perspective de paix dans la région »


Face au choix du Canada, l’ambassade d’Israël à Ottawa a décrié une « campagne de pression internationale déformée », venant « durcir la position du Hamas à la table des négociations à un moment critique ». Le ministère israélien des Affaires étrangères a enfin fustigé, dans une publication sur X, le changement de position du gouvernement canadien, qui « récompense le Hamas et nuit aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza et un cadre pour la libération des otages ». La manœuvre paraît claire : Washington et Tel-Aviv tentent, par la menace et les accusations, de pousser le Canada à revenir sur sa décision.
Ottawa affiche ainsi son intention de s’inscrire dans la lignée de la France et du Royaume-Uni, ce qui ferait des trois puissances occidentales les 149e, 150e et 151e pays à reconnaître l’État de Palestine. L’Élysée a salué l’annonce du premier ministre canadien et s’est réjoui « de pouvoir travailler de concert avec le Canada pour relancer une perspective de paix dans la région », précisant qu’Emmanuel Macron s’est entretenu avec Mark Carney « un peu plus tôt dans la journée » à ce sujet.


« La mobilisation paye », s’est réjouie la députée européenne Rima Hassan. La juriste franco-palestinienne met l’accent sur la pression de plus en plus pressante contre Tel-Aviv, alors que quinze États occidentaux – France, Canada, Espagne, Portugal, Australie, Andorre, Finlande, Islande, Nouvelle-Zélande, Norvège, Irlande, Luxembourg, Malte, Saint-Marin, Slovénie – appellent à la reconnaissance de la Palestine.
Ces choix apparaissent donc autant comme le symbole d’un changement de ligne – en réaction au génocide en cours dans la bande de Gaza – qu’à celui d’une longue indulgence ayant préparé le terrain à la politique meurtrière de Tel-Aviv. Mark Carney a justifié le choix de son gouvernement par « le niveau de souffrance humaine intolérable » au sein de l’enclave palestinienne, tout en rappelant le soutien « de longue date » du Canada en faveur d’une solution à deux États.

« Un moment historique critique »


Or, « cette possibilité s’érode sous nos yeux », a fustigé l’élu libéral, alors que le peuple palestinien est victime d’un génocide et que leurs rares territoires non colonisés sont rasés par les bombes et les bulldozers. Sa prise de position s’inscrit donc dans le retournement de veste des puissances occidentales face aux massacres à répétition des 2,4 millions de Palestiniens assiégés à Gaza, la transformation de l’enclave en un ghetto frappé par la famine et le harcèlement quotidien des Cisjordaniens.


Mark Carney a ainsi critiqué « l’incapacité persistante » d’Israël à empêcher une catastrophe humanitaire à Gaza, ainsi que l’expansion des colonies en Cisjordanie occupée et à Jérusalem-Est annexée par Israël – considérées comme illégales au regard du droit international. Le premier ministre a néanmoins estimé qu’un « processus de paix fondé sur un accord négocié entre le gouvernement israélien et l’Autorité palestinienne n’est plus tenable ». La cause, selon lui : le « terrorisme du Hamas » et « le rejet violent et de longue date par le groupe du droit d’Israël à exister ».
L’intention du Canada se base aussi « sur la volonté de l’Autorité palestinienne de mener des réformes essentielles », a annoncé le premier ministre, citant l’engagement pris par le président Mahmoud Abbas d’organiser des élections générales en 2026 et de ne pas militariser l’État palestinien. Le chef de l’Autorité palestinienne lui a bien rendu en saluant, mercredi 30 juillet, la décision « courageuse » du Canada, qui « intervient à un moment historique critique pour sauver la solution à deux États ».


Les États-Unis n’ont pas tardé à réagir en annonçant, jeudi 31 juillet, des sanctions contre des responsables de l’Autorité palestinienne et de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). La Maison Blanche accuse les deux organismes d’avoir pris des mesures pour « internationaliser leur conflit avec Israël », selon un communiqué du département d’État états-unien. Washington les accuse en outre de « continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l’incitation et la glorification de la violence ». Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres de l’OLP et de l’Autorité palestinienne.
 

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