Attaque de drone sur l’un de ses bateaux en route vers Gaza !
L'Humanité du 9 septembre 2025
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| Arrivée des participants de la Global Sumud Flotilla à Sidi Bou Said en Tunisie, le 7 septembre 2025.© Hasan Mrad/ZUMA Press Wire/ABACAPRESS.COM |
Stupeur, colère et solidarité, voilà les sentiments qui habitaient les centaines de personnes qui, jusqu’à 3 heures du matin, au moins, ont afflué ce 9 septembre, sur le port de Sidi Boussaïd, en Tunisie, suite à un départ de feu sur le Family, bateau-mère de la Global Sumud Flotilla.
La réunion des capitaines d’embarcations devant quitter Tunis, dans les prochains jours, pour rejoindre les 22 navires partis une semaine plus tôt de Barcelone, vient à peine de se terminer. Il est bientôt minuit quand sur les boucles des messageries cryptées des participants à cette action citoyenne internationale inédite, visant à casser le blocus imposé par l’État israélien à la population de Gaza, la nouvelle tombe : « Le Family a été attaqué par un drone. Il y a le feu à bord ! »
Immédiatement, la consigne est donnée à tous les membres de la flottille présents sur des bateaux de mettre leur gilet de sauvetage et de se préparer à l’évacuation des navires. Le capitaine du Family fait, toutefois, rapidement savoir que le feu est maîtrisé et qu’aucune des six personnes à bord n’est blessée. Les secours arrivent.
« Ils ont tout intérêt à nous faire peur avant que la flottille ne soit allée plus loin »
« Nous ne savons pas qui a fait cela, précise Saïf Abukeshek, un des principaux organisateurs de la Flottille, au milieu de la foule venue soutenir les embarqués attaqués. Mais on sait bien que ce type d’action ne peut servir que les intérêts d’Israël. Ce ne serait pas très étonnant de la part d’un État qui n’hésite pas, à Gaza, à bombarder des écoles et des hôpitaux. »
Les participants ont bel et bien suivi plusieurs journées de formation avant d’embarquer, durant lesquelles ils ont pu imaginer tout type de réactions de la part des autorités israéliennes, mais pas celui d’une attaque aussi précoce. « En même temps, ils ont tout intérêt à nous faire peur avant que la flottille ne soit allée plus loin », considère Jean-François, un des responsables de la délégation française. L’attaque est, en effet, susceptible de faire renoncer certains des militants.
« On ne sait pas encore bien ce qu’il s’est passé, nuance l’actrice Adèle Haenel, elle aussi venue à Sidi Boussaïd rejoindre les manifestants. Mais en tout cas, tout cela ne fait que conforter ma détermination à naviguer jusqu’à Gaza. » Toutes les personnes présentes et engagées dans cette initiative tiennent le même discours. Conscient du danger, personne ne semble vouloir remettre en question son engagement à acheminer par la mer les produits d’aide humanitaire dont a besoin la population gazaouie.
Les autorités tunisiennes démentent malgré une vidéo
Les accusations évoquant la présence d’un drone « sont dénuées de tout fondement », ont, de leur côté, déclaré les autorités tunisiennes, préférant s’appuyer sur l’hypothèse d’un départ de feu imputable à un mégot de cigarette. Pourtant, les images prises par les caméras fixées à bord du Family, comme c’est le cas sur tous les bateaux de la flottille, sont parlantes.
Sur des vidéos partagées par la rapporteuse spéciale des Nations unies sur les territoires palestiniens, Francesca Albanese, on distingue très bien le son d’un objet volant puis une explosion à l’avant du bateau et des cris, « Nous avons besoin d’aide ! », répétés à plusieurs reprises.
« 1. Bruit de ce que l’équipage a identifié comme étant un drone.
2. L’équipage déclenche l’alerte et appelle à l’aide.
3. Explosion. À vous d’en tirer les conclusions, écrit la juriste. S’il est confirmé qu’il s’agit d’une attaque de drone, ce serait (…) une agression contre la Tunisie et la souveraineté tunisienne. »
Dans les autres navires, comme ceux qui sont en préparation sur le port de Gammarth, au Nord-Ouest de la capitale tunisienne, on digère l’évènement et tente d’envisager la suite. « Ce serait compréhensible que certains participants renoncent après ce qui vient de se passer, pointe Mourad, assis dans le cockpit du Mia Mia, le prochain voilier dans lequel doit embarquer l’Humanité. Ça ne peut leur être reproché mais c’est exactement l’objectif de ce type d’attaque. »
En tout cas, pour l’heure personne n’a exprimé l’intention de rebrousser chemin. Les navires venus de Barcelone, encore en mer suite à une escale de plusieurs jours sur l’ïle de Majorque, font toujours cap sur Tunis, tandis que le premier navire, devant rejoindre la flottille depuis Catane, en Sicile, vient de prendre le large avec douze personnes à bord. Un vent espagnol semblable à celui qui, en 1936, a porté les combattants internationaux opposés à la réaction fasciste guidée par le Général Franco, semble désormais gonfler les voiles de la Global Sumud Flottilla. Ce type de bourrasque historique emporte la promesse de tout renverser, même les pouvoirs les plus brutaux.
À 3 heures du matin, ce 9 septembre, l’enthousiasme et la motivation des embarqués de la flottille de la liberté ne sont, en tout cas, pas en berne. L’Humanité les accompagne.
