Jean LEVY
Syndiqué à la CGT depuis septembre
1944.
Ancien Délégué Syndical National CGT au Crédit du
Nord
Ancien membre de la direction de la Fédération des
Employés
(groupant alors la Banque, l’Assurance, le Commerce et la
Sécurité Sociale)
52, avenue Pierre Brossolette
94300 VINCENNES
jean.levy@dbmail.com
A Bernard THIBAULT
Secrétaire Général de la CGT
Après le 23 mars, nous étions nombreux à attendre une
« suite » rapide et d’envergure aux manifestations, qui ont rassemblé, ce jour la, 800.000 salariés et retraités dans toute la
France.
Certes, ce n’était pas encore les foules du printemps dernier, ces
millions d’hommes et de femmes dans nos rues, clamant leur impatience et leur colère, face à la politique de contre-révolution sociale du pouvoir. Mais la stratégie syndicale mise en pratique
l’an dernier, une manifestation trimestrielle sans perspective, avait conduit à l’échec, en juin, et à une démobilisation totale du monde du travail. Cette situation avait permis au pouvoir et au
patronat de poursuivre et d’accentuer massivement son offensive contre les travailleurs.
Du fait de cette situation, la manifestation du 23 mars suscitait
une inquiétude dans les syndicats, quant à la mobilisation envisagée. Elle s’est révélée plus ample et déterminée, certainement en relation avec le scrutin du 21 mars, et le
désaveu massif du pouvoir par les électeurs.
Aussi, l’intersyndicale du 30 mars était attendue avec l’espoir d’un
calendrier de manifestations à court terme, qui prenne en compte l’expérience malheureuse de l’an passé et la volonté d’accentuer crescendo la pression populaire.
Las, les médias nous apprennent au matin du 31
mars qu’aucune initiative nouvelle n’était prévue au niveau confédéral, hormis la manifestation traditionnelle du Premier Mai. La nouvelle était tellement surprenante qu’elle aurait été, annoncée
24 heures plus tard, considérée comme « un poisson d’Avril ».
Malheureusement, la nouvelle était vraie. La CGT, en se
ralliant à une décision démobilisatrice, ne faisait que poursuivre sa stratégie d’abandon de la lutte, développée depuis 2007.
Cette année-là, au lendemain de l’accession de Nicolas Sarkozy à la
présidence de la République, vous déclariez, au nom de la confédération, que la CGT allait s’enquérir « des intentions du nouvel hôte de l’Elysée », avant de prendre des
initiatives revendicatives, comme si le programme de Nicolas Sarkozy n’était pas connu, comme si vous vouliez ignorer que les « réformes »,
annoncées par lui, n’étaient pas la simple transcription législative des intentions hautement exprimées par le Medef…
Et la première grande initiative, que vous avez prise, fut de briser
la grève des cheminots, en novembre 2007, en « négociant » personnellement avec Nicolas Sarkozy, le premier jour d’un mouvement unitaire qui s’avérait encore plus puissant que celui de
1995. Il est vrai qu’en 2003, déjà, en pleine lutte de masse pour les retraites, vous déclariez que vous n’étiez pas là pour « paralyser la
France » par une grève généralisée…
Et depuis près de trois ans, ignorant les souffrances subies par des
millions et des millions de salariés, de privés d’emploi, de retraités, victimes de la politique du grand capital, développée chaque jour davantage, par le pouvoir sarkozien, vous avez
délibérément freiné et saboté toute mobilisation populaire d’envergure pour mettre un terme à la misère grandissante de la population.
Il est vrai que votre engagement pour la construction européenne,
moteur de l’offensive contre le mouvement ouvrier et les conquêtes sociales qu’il a acquise par ses luttes historiques, vous vous êtes aligné sans problème sur les orientations de collaboration
de classe de la Confédération Européenne des Syndicats, avec les autorités de Bruxelles et BusinesEurope du baron Seillière.
Votre prise de position, en 2005 au sein de la CGT, contre le NON à
la constitution européenne, alors proposée par l’U E, n’est qu’une simple illustration de votre position fondamentale en la matière. Vous avez été mis en minorité, à l’époque, au sein des
instances de la Confédération. Ce que vous n’avez pas digéré.
Aujourd’hui, face au peuple français, hostile dans sa grande
majorité au carcan européen, vous poursuivez, à la tête de la CGT, une orientation contraire aux intérêts fondamentaux de notre peuple et désavouée massivement par les jeunes, les ouvriers et les
employés.
Aussi, votre maintien à la tête de la CGT constitue un frein
dangereux au développement des luttes d’ampleur nationale, qui s‘avèrent plus nécessaires que jamais. Les chemins de l’Elysée et de la Poterne, que vous empruntez, conduisent le monde du travail
de notre pays, et le pays lui-même, à la catastrophe.
Il faut que notre Confédération retrouve la route tracée par la CGT
de Benoît Frachon, de Georges Séguy et d’Henri Krasucki.
Reçois mes sentiments syndicalistes de lutte de
classe.
Jean LEVY