6 septembre : l'attaque anti-syndicale et anti-CGT
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SOURCE : Le Monde
La gendarmerie convoque un dirigeant après des coupures d’électricité menées pendant la mobilisation contre la réforme des retraites
Rendez-vous est pris devant la gendarmerie de Montmorency (Val-d’Oise). Un rassemblement et un appel à la grève sont attendus en soutien au secrétaire général de la Fédération nationale des mines et de l’énergie (FNME) CGT, Sébastien Menesplier. A proximité de son domicile, le dirigeant syndical est convoqué à une audition libre dans la matinée du mercredi 6 septembre. Le 8 mars, sur le site de la radio France Bleu, il avait assumé, au nom des militants de son organisation, la coupure de courant effectuée, la veille, à Annonay (Ardèche). Une ville symbolique. Celle d’où est originaire le ministre du travail, Olivier Dussopt.
En marge d’une manifestation contre la réforme des retraites, qui est finalement entrée en vigueur le 1er septembre, la coupure avait privé d’électricité quelque 2 400 « clients » pendant une partie de l’après-midi, selon le préfet de l’Ardèche. Elle avait également entraîné « plusieurs interventions des sapeurs-pompiers pour secours à personnes », toujours selon l’administration.
« Une attaque politique »
Le secrétaire général de la FNME-CGT sera entendu en raison de coupures constatées à Annonay et à Boulieu-lès-Annonay, confirme la procureure de la République de Privas. Sans entrer dans le détail de l’enquête, et donc sans indiquer si le préfet a porté plainte. Enedis, filiale du groupe public EDF, dit l’avoir fait contre X. Le gestionnaire du réseau de distribution électrique signale toujours ainsi, explique-t-il, « tout acte illégal » sur ses infrastructures. Accompagné d’un avocat, M. Menesplier ignore ce qui lui est reproché. Si ce n’est qu’il sera auditionné en tant que dirigeant syndical. D’après sa convocation, il est « soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre l’infraction de “mise en danger d’autrui par personne morale (risque immédiat de mort ou d’infirmité) par violation manifestement délibérée d’une obligation réglementaire de sécurité ou de prudence” ».
Derrière la procédure, le syndicaliste voit surtout « une attaque politique ». Depuis fin mars, Sébastien Menesplier prend aussi place au bureau confédéral de la CGT. « Toute la CGT est visée », déclare-t-il désormais en « une » de L’Humanité, dans l’édition du 5 septembre. Plusieurs responsables de gauche lui témoignent leur « solidarité », dans un appel publié par le quotidien. « Nous dénonçons cette politique d’intimidation, cette criminalisation du syndicalisme », affirment les signataires, parmi lesquels le communiste Fabien Roussel, l’« insoumis » Jean-Luc Mélenchon, le socialiste Olivier Faure ou encore l’écologiste Cyrielle Chatelain.
« Cette convocation marque un nouveau cap dans la répression de l’activité syndicale », critique Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, dans une lettre ouverte à la première ministre, Elisabeth Borne, le 24 août. « L’action syndicale ne peut s’inscrire que dans l’Etat de droit et ne peut, en tout état de cause, justifier la commission d’infractions », répond au Monde l’entourage de Mme Borne. Tout en refusant de commenter la situation de M. Menesplier, car « l’autorité judiciaire agit de manière indépendante ».
Près de 400 plaintes
Ces derniers mois ont placé les industries électriques et gazières aux avant-postes des grèves et des manifestations. Les actions contre la réforme des retraites ont fait l’objet de près de 400 plaintes dans cette branche, selon la CGT. Sur ce total, la direction d’Enedis précise en avoir déposé « près de 300 », « contre X ». Par ailleurs, le décompte syndical mentionne « une quarantaine de conseils de discipline » internes à GRDF, gestionnaire du réseau gazier.Ce dernier s’abstient de commentaire.
Certes, le climat social avait viré à l’orage avant même cette longue séquence. Chargée du réseau de transport d’électricité, l’entreprise RTE avait licencié quatre de ses agents, en décembre 2022. Elle leur reprochait une intervention informatique, durant un précédent conflit pour la hausse des salaires contre l’inflation.
Cet été, le cas de Sébastien Menesplier a aussi fait réagir la Confédération européenne des syndicats. Laquelle fustige « une attaque inacceptable contre les syndicats et les droits syndicaux ». Pour le 6 septembre, la Fédération syndicale européenne des services publics annonce un rassemblement à Bruxelles devant l’ambassade de France en Belgique.