Guerre à Gaza : Benjamin Netanyahou et Donald Trump imposent une paix sans État palestinien
Pierre Barbancey
L'Humanité du 02 juillet 2025
Le président états-unien a présenté des propositions comprenant un cessez-le-feu de soixante jours mais ne veut pas imposer la fin de la guerre à Israël. Il cherche à forcer la normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et Israël sans création réelle d’un État de Palestine.
Donald Trump, paraît-il, se verrait bien lauréat du prix Nobel de la paix. Après tout, Barack Obama l’a été sans que l’on sache trop pourquoi. C’est peut-être pour cela que, ces derniers jours, il a donné l’apparence d’un homme totalement engagé dans cette quête. Mais la « pax americana », qui rejoint la « pax hebraica », passe par des injonctions, des menaces voire des actes de guerre.
Donald Trump assure ainsi qu’Israël avait accepté les conditions pour finaliser un cessez-le-feu de soixante jours (et la libération de la moitié des otages en échange de prisonniers palestiniens et des dépouilles d’autres Palestiniens) « pendant lequel nous travaillerons avec toutes les parties pour mettre fin à la guerre ». Les représentants du Qatar et de l’Égypte devraient remettre cette « proposition finale » au Hamas.
Le blocus israélien de Gaza : une catastrophe humanitaire
« J’espère, pour le bien du Moyen-Orient, que le Hamas acceptera cet accord, car la situation ne s’améliorera pas ; elle ne fera qu’empirer. Merci de votre attention ! » a ajouté, menaçant, le président états-unien.
En clair, ce qu’il présente comme une négociation n’est autre qu’un oukase. Admettre ou se démettre. Le Hamas, de son côté, s’est déclaré prêt à libérer les otages restants mais dans le cadre de tout accord mettant fin à la guerre. Mercredi 2 juillet, l’organisation palestinienne faisait savoir qu’elle étudiait les propositions qui avaient été transmises.
C’est aussi ce que veulent les Palestiniens, qui n’en finissent plus de mourir, happés par les bombes, qu’ils se trouvent sous leurs abris de fortune, au bord de la mer ou à la recherche de nourriture et d’eau. Des centaines tués chaque semaine, 142 en 24 heures entre le 1er et le 2 juillet. 280 patients qui ont besoin de dialyse rénale pourraient perdre la vie par manque de fuel et d’électricité à l’hôpital Shifa.
Comme si ce n’était pas suffisant, les médecins de Gaza mettent en garde contre une « catastrophe silencieuse » qui menace la vie de milliers de bébés et de nourrissons. Le blocus israélien de Gaza a entraîné une pénurie de lait maternisé, et les mères affamées ne peuvent plus allaiter leurs enfants.
Israël-Iran : un cessez-le-feu fragile
Preuve de l’insanité – de la forfaiture même mais qui s’en étonnera ? – des propositions de Trump : Israël se déclare d’accord avec les propositions états-uniennes mais se permet d’ajouter que la guerre ne pourra prendre fin que si le Hamas est désarmé et démantelé. Une condition qui, si elle n’est pas remplie, sera de fait un motif de reprise des attaques contre Gaza, ont fait savoir plusieurs responsables israéliens.
Trump semble penser qu’après les bombardements sur l’Iran par Israël et les États-Unis (ces derniers sur trois sites nucléaires au mépris de tout danger) et le cessez-le-feu imposé, il pourrait se présenter aux yeux du monde – et de ceux des membres du comité qui attribuent le prix Nobel – comme l’artisan de la paix à Gaza.
Mais « nous avons de sérieux doutes sur le respect des engagements (par Israël), y compris du cessez-le-feu, et nous sommes prêts pour une riposte forte », a prévenu le chef d’état-major des forces armées iraniennes, Abdolrahim Mousavi, lors d’un entretien téléphonique avec le ministre saoudien de la Défense, le prince Khaled ben Salmane.
Téhéran a réclamé à l’ONU que ses deux ennemis soient désignés responsables de la guerre, dans un courrier diplomatique, pointant une façon de vouloir humilier l’adversaire qui ne vise certainement pas à apaiser la région et permettre aux peuples de vivre en paix.
Trump et Netanyahou veulent redessiner la carte du Moyen-Orient
D’ailleurs, le président iranien, Massoud Pezeshkian, a promulgué mercredi une loi adoptée par le Parlement la semaine dernière suspendant la coopération avec l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA), l’organisme de surveillance nucléaire des Nations unies. Quand au détroit d’Ormuz, par où transitent un cinquième des expéditions mondiales de pétrole et de gaz, il est l’objet de toutes les attentions.
Donald Trump reçoit lundi 7 juillet Benyamin Netanyahou. Le premier ministre israélien est un habitué de la Maison-Blanche, quel qu’en soit l’hôte, démocrate ou républicain. Pourtant, la presse israélienne présente ce déplacement comme le plus important jamais effectué.
Comme si les deux hommes se préparaient à mettre la dernière pierre à l’acte final de leur projet moyen-oriental : forcer la main (une fois n’est pas coutume) de l’Arabie saoudite pour normaliser ses relations avec Israël, sous prétexte d’une bande de Gaza sous contrôle arabe (mais sous surveillance militaire israélienne). Les deux faussaires vont imposer au monde une nouvelle photo du Moyen-Orient. Les Palestiniens et leur État ne seront pas dans le cadre.