Comment nos media traitent la déportation envisagée des Palestiniens


N° 911 06/02/2025 Le projet impérialiste de déportation des Palestiniens de Gaza
Le président US Donald Trump vient, dans une des formules cyniques dont il a le secret, d’annoncer que les USA souhaitaient prendre le contrôle de la Bande de Gaza, en chasser les habitants et organiser la reconstruction afin de transformer le territoire en « riviera du Moyen Orient ».
Cette déclaration tonitruante et scandaleuse appelle plusieurs remarques. Deux sont essentielles.
Il est loin d’être réalisé
D’abord ce n’est pas parce que Trump annonce une chose qu’elle va se réaliser, contrairement à ce que semble penser la valetaille idéologique des media, en France, nous y reviendrons. Le peuple palestinien a suffisamment prouvé sa capacité de Résistance, les Gazaouis ont montré leur volonté de ne pas quitter leur terre, ils sont Palestiniens, veulent rester en Palestine et obtenir un État où ils soient citoyens pleins et entiers.
Ensuite, Trump peine déjà à réaliser ce qui ne tient qu’à lui (nous attendons encore les « révélations » sur la mort de JF Kennedy ou celles, via son admiratrice Candace Owens sur le couple Macron), il va avoir du mal à chasser et à déporter les Palestiniens de Gaza. Enfin, l’armée d’occupation n’a pas réussi à vaincre la Résistance armée palestinienne, loin de là, on voit mal ce que des soldats US, dont certains sont en réalité déjà présents sur place, pourraient faire de plus. En résumé, il y a loin de la coupe aux lèvres !
Rien de nouveau
Secondement, ce qu’annonce le président US est tout sauf nouveau. La déportation des Palestiniens, des autochtones, c’est le projet des émigrants européens sionistes depuis le début. Les déclarations de Ben Gourion ou de Moshé Dayan dès les années 50 sont sans ambiguïté à ce sujet. Le premier ministre Levi Eshkol, en poste pendant et après la « Guerre des Six Jours » avait envisagé et mis à l’étude un projet de déportation de la population de Gaza dans le Sinaï alors occupé par les colonisateurs sionistes, en particulier dans la ville d’El Arish.
Le génocide en cours et les actes de l’armée d’occupation et des gouvernements successifs de l’entité sioniste montrent à l’envi que le but des sionistes est l’éradication ou la déportation des Palestiniens. C’est le sens profond de la colonisation de substitution ou de peuplement qu’ils mettent en place depuis 1948, et même avant.
Quelques remarques subsidiaires
Il s’agit donc d’une énonciation claire d’un projet connu de n’importe qui voulant s’intéresser à l’histoire du Proche Orient. Avec peut-être une différence n’ayant pas échappé au génocidaire Netanyahu, qui faisait un peu la grimace à Washington. Trump a annoncé que les USA allaient prendre en main la Bande de Gaza, et non aider les sionistes à le faire.
D’ailleurs, les politiciens israéliens essaient de reprendre la main. Ainsi, le ministre de la défense israélien Israel Katz a ordonné jeudi, à l’armée de se préparer à la mise en œuvre d’un plan visant à permettre le « départ volontaire » des habitants de la bande de Gaza. Katz a précisé dans un communiqué que le plan comprendrait « des options de sortie aux points de passage terrestres ainsi que des dispositions spéciales pour les sorties par voie maritime et aérienne ».
Katz s’est senti obligé de rendre hommage au président US :« Je salue le plan audacieux du président Trump, les habitants de Gaza devraient avoir la liberté de partir et d’émigrer, comme c’est la norme dans le monde entier », a-t-il déclaré. On comprend que Katz souhaite garder la maîtrise de l’événement et que son discours sur l’émigration volontaire cache mal une adhésion pleine et entière au projet de déportation.
Par ailleurs, Donald Trump, descendant des colons européens qui ont massacré, chassé et marginalisé les autochtones amérindiens est parfaitement logique. L’héritier de la première colonisation de peuplement donne un coup de main intéressé aux promoteurs de la seconde.
L’état désastreux des media en France
L’enseignement le plus intéressant, après cette annonce est dans la façon dont nos media, notamment les plus opposés à Trump, comme le « service public », ayant fait campagne pour Kamala Harris rendent compte de l’affaire. Aucun ne prononce ou n’écrit le mot de déportation alors que c’est le terme, selon même le fameux « droit international », dont tous se gargarisent. Enfin, et c’est une constante depuis la reprise de la guerre coloniale, personne ne se demande ce qu’en pensent les intéressés, à savoir les Palestiniens eux-mêmes.
Les Palestiniens sont totalement invisibilisés, leur point de vue passé sous silence et les doctes penseurs en tous genres, même celles et ceux qui ne se disent pas pro-sionistes, passent leur temps à gloser sur ce qui pourrait bien advenir de Gaza sans mentionner en quoi que ce soit la colonisation et son histoire. On se souvient que ces mêmes penseurs se sont arrogé le droit de dire qui est un Résistant palestinien et qui ne l’est pas, alors que cela ne regarde que les Palestiniens eux-mêmes.
Ainsi le journal « Les Échos » a pu publier un article en ligne se demandant si l’Egypte accepterait des « colons » palestiniens et a fini par corriger devant les protestations et remplacer par « réfugiés », mais pas « déportés », bien sûr. L’article par ailleurs, ne se place que du point de vue du gouvernement Egyptien, pas de celui des habitants de Gaza.
Mais c’est France-Info (le « service public » donc) qui remporte le césar de l’ignominie journalistique. Voilà qu’ils invitent un dirigeant de l’UMIH (l’association des patrons hôteliers), pour savoir « en-dehors de toute question politique » (sic), si la transformation de la Bande de Gaza en riviera est possible. L’invité va d’abord se féliciter que Trump ait rendu hommage à la riviera française, premier lieu d’accueil des touristes dans le monde (on a les victoires qu’on peut) et discute de la faisabilité, comme au café du commerce.
Afin d’éclairer son propos sur ce qui pourrait rendre moins attractive la zone pour les touristes, il évoque « la grève des poubelles » (sic) à Paris. Il est heureux que personne chez les « journalistes » n’ait pensé à lui demander si la présence de Palestiniens ne serait pas un repoussoir. On peut ainsi débattre de la déportation d’un peuple, sur un ton badin, de la reconstruction de ce qui est sur sa terre, sans jamais lui demander son avis. Ces gens-là, « journalistes » ou invités n’ont aucune vergogne !
Rappelons que cette même chaîne a suspendu un journaliste pour avoir osé parler « d’otages palestiniens ». Les bonnes âmes qui hurlent à raison contre les chaînes tenues par les milliardaires (enfin surtout contre certaines), mais seulement contre elles, devraient s’intéresser aux messages frelatés que délivre le soi-disant service public.
En conclusion
Plus que jamais, il faut continuer à exiger la vérité dans le traitement de « l’information » autour du conflit colonial de Palestine. Il ne faut pas laisser sans réponse la propagande de la classe dominante qui soutient le prolongement organique de l’impérialisme occidental qu’est l’entité sioniste. Il ne faut pas laisser invisibiliser les Palestiniens, ne pas laisser des « spécialistes » évoquer le sort de la terre palestinienne sans jamais convoquer l’avis de ces mêmes palestiniens.
La sortie de Trump ne change rien à l’affaire, la situation est toujours identique : génocide, menace d’éradication et de déportation. Pour le Parti Révolutionnaire Communistes, il est important de continuer à parler de la situation réelle, sans perdre son temps à discuter des annonces de Washington. Ce qui compte c’est la Résistance héroïque du peuple palestinien et la solidarité active des travailleurs du monde. Il faut donc continuer d’exiger le retrait total des forces d’occupation et de colonisation de Gaza, de la Cisjordanie et de Jérusalem. Mais cela ne saurait suffire.
Une paix juste c’est le démantèlement des colonies, le retour des réfugiés et un Etat palestinien indépendant. L’existence d’un Etat colonial empêche une telle paix. Les travailleurs d’Israël ne peuvent être libres s’ils ne rompent pas avec le sionisme et continuent de se trouver objectivement dans le camp des colonisateurs. La solidarité avec la Palestine ne peut se contenter de phrases générales sur la paix. Il faut un Etat où tous les habitants jouissent des mêmes droits et puissent vivre ensemble, quelle que soit leur origine, en l’occurrence, un État palestinien démocratique.
De même, la lutte de libération nationale du peuple palestinien n’a pas besoin de compassion, mais d’un réel soutien politique et d’actions de solidarité internationaliste. Et pour la France, où les Révolutionnaires, comme ailleurs, doivent combattre d’abord leurs capitalistes, cela commence par la lutte politique contre le soutien de l’impérialisme français à l’État colonial sioniste.
Le Parti Révolutionnaire Communistes, après la trêve et la poursuite du massacre en Cisjordanie, soutient plus que jamais les revendications fondamentales du mouvement de libération nationale palestinien : fin intégrale de l'agression militaire sioniste, droit au retour des réfugiés et formation d'un État palestinien sur le territoire de la Palestine mandataire.