Netanyahou ravive le spectre de la guerre à Gaza avec son « plan Enfer »
Tom Demars-Granja
L'Humanité du 04 mars 2025
Le premier ministre israélien Benyamin Netanyahou déploie son plan de « pression maximale » sur le Hamas, afin d’obliger le mouvement à prolonger la première phase du cessez-le-feu, censée s’être terminée samedi 1er mars. Si l’organisation palestinienne reste sur sa position, le gouvernement israélien envisage d’enclaver de nouveau la bande de Gaza, voire de reprendre son entreprise génocidaire.
Le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas, entré en vigueur le 19 janvier dernier, est toujours plus proche de la rupture. Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, continue de menacer l’organisation palestinienne de conséquences qu’elle ne peut « pas imaginer » si elle ne relâche pas les otages israéliens retenus dans la bande de Gaza.
Quitte à relancer son entreprise destructrice et génocidaire sur place, comme le confirment plusieurs médias israéliens. Selon ces derniers, Benyamin Netanyahou aurait un plan de « pression maximale » sur le mouvement islamiste pour le contraindre à accepter une prolongation de la première phase de la trêve – qui s’est achevée samedi 1er mars – aux conditions posées par Israël.
« Il envisage de reprendre les combats »
Selon la radiotélévision publique israélienne Kan, le premier ministre souhaite ainsi prolonger la première phase d’au moins une semaine, dans l’attente d’une visite de l’émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steven Witkoff. Surtout, toujours selon Kan, il attendrait de voir si les médiateurs parviennent à persuader le Hamas de transiger, faute de quoi « il envisage de reprendre les combats » dans la bande de Gaza.
C’est pourquoi ces derniers jours ont été le théâtre de nouvelles attaques d’Israël à l’encontre de Gaza. Baptisé « plan Enfer », le plan de Benyamin Netanyahou prévoit de couper de nouveau le territoire du monde extérieur. L’aide humanitaire a ainsi été suspendue, dimanche 2 mars, à l’aide d’un siège total sur l’enclave. « Malheureusement, la prise de contrôle des biens par le Hamas en a fait un moteur économique pour lui, a justifié Gideon Saar, ministre des Affaires étrangères israélien. Ils utilisent cet argent pour le terrorisme, pour restaurer les capacités terroristes et pour inciter davantage de jeunes terroristes à rejoindre leur organisation. »
« En privant à nouveau deux millions de personnes de nourriture, de médicaments et d’autres équipements essentiels, les autorités israéliennes condamnent les plus vulnérables », alerte ainsi Morgane Rousseau, directrice de Médecins du Monde Suisse, dans un communiqué. Soit un « chantage mesquin, un crime de guerre et une violation flagrante de l’accord », fustige le Hamas, qui a appelé « les médiateurs et la communauté internationale à faire pression » sur Israël.
La pression exercée par Israël ne devrait ainsi pas faiblir dans les prochains jours. Au contraire, même, selon le porte-parole du premier ministre, Omer Dostri, qui a confirmé, mardi 4 mars, que « plus le Hamas persiste dans son refus, plus Israël a de poids à exercer sur lui ». Le gouvernement israélien envisage par exemple un déplacement forcé des Gazaouis du nord du territoire palestinien vers le sud et l’interruption de l’approvisionnement en électricité.
Ce à quoi le commissaire général de l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens, l’Unrwa, a répondu, mardi 4 mars, sur X : « L’eau, les hôpitaux, les centres de santé et l’électricité sont essentiels pour compléter l’aide alimentaire de base. L’aide et ces services de base ne sont pas négociables. Ils ne doivent jamais être utilisés comme des armes de guerre. »
« Les portes de l’enfer s’ouvriront »
La mesure ultime prévue par le gouvernement israélien serait un retour complet à la guerre, en utilisant les bombes lourdes récemment mises à disposition par la nouvelle administration américaine de Donald Trump, en plus des armes et équipements militaires qu’elle envoie à Israël. « Si le Hamas ne libère pas bientôt les otages, les portes de Gaza se fermeront et les portes de l’enfer s’ouvriront, a ainsi prévenu le ministre de la Défense, Israël Katz, selon un communiqué de son ministère. Nous reviendrons à la lutte et ils se heurteront à (une armée) dotée de forces et de méthodes qu’ils n’ont jamais connues. »
Israël affirme avoir accepté un compromis états-unien prévoyant l’extension de cette première phase pendant le ramadan (commencé samedi 1er mars) et la Pâque juive, soit jusqu’à la mi-avril. Le Hamas souhaite, lui, que les deux étapes restantes de l’accord de trêve initial soient mises en œuvre.
Une « visite éclair » aux États-Unis
En parallèle, le ministre des Finances israélien, Bezalel Smotrich, partisan de l’annexion de la Cisjordanie, a annoncé, mardi 4 mars, avoir décollé pour une « visite éclair » aux États-Unis. Il a prévu de rencontrer des responsables du gouvernement, notamment le secrétaire au Trésor américain, Scott Bessent, alors que Donald Trump pourrait se prononcer officiellement dans les jours qui viennent sur la question de l’annexion de tout ou partie de la Cisjordanie.
« L’objectif de cette visite est de renforcer la coopération économique entre Israël et les États-Unis, de promouvoir des initiatives économiques conjointes et d’approfondir l’alliance stratégique entre nos deux pays », a annoncé Bezalel Smotrich, représentant de l’extrême droite israélienne et partisan d’une accélération de la colonisation des territoires palestiniens. Il plaide ainsi, notamment depuis le 7-Octobre, pour l’« émigration » des Gazaouis et de la Cisjordanie afin de régner sur ces territoires.
L’annonce de sa visite à Washington survient alors que se tient au même moment un sommet extraordinaire de la Ligue arabe, au Caire (Égypte). L’objectif de la rencontre est d’établir une contre-proposition au projet annoncé le 4 février par Donald Trump d’une prise de contrôle de la bande de Gaza par les États-Unis, pour la transformer en une « Riviera du Moyen-Orient » après avoir déporté la population locale vers des pays voisins.
L’Égypte y a justement présenté un plan pour la reconstruction de la bande Gaza. Au programme : une première étape de six mois axée sur le déblaiement des débris, l’enlèvement des mines et des matériaux non explosés et la fourniture de logements temporaires, la reconstruction des infrastructures (routes, services publics, zones industrielles, un port de pêche, un port commercial et un aéroport) d’ici 2030. Le tout grâce à la création d’un fonds supervisé au niveau international, puis une prise du contrôle de l’enclave par l’Autorité palestinienne. Soit l’inverse de ce que souhaite Benyamin Netanyahou et Donald Trump, obsédés par leur projet de « Riviera du Moyen-Orient ».
Interrogé lors de la présentation de ce plan sur son éventuel soutien au principe d’une annexion de la Cisjordanie par Israël, Donald Trump avait déclaré qu’il ferait probablement une « annonce » sur ce sujet dans un délai de quatre semaines. Alors que l’échéance approche, le destin du cessez-le-feu comme de la bande de Gaza est de nouveau en suspens.